La Prophétie des papes
emmerdements de lâuniversité. Je vais parler au professeur Rinaldi. Je pense quâil fera un bon directeur de recherches. Je sais quâil est assez occupé, mais je le convaincrai de vous prendre. Tout ira bien. »
Elisabetta contempla le visage de De Stefano marqué par la culpabilité et décida quâil nây avait rien dâautre à dire, si ce nâétait « Bon Dieu », dans un souffle.
Â
Une heure plus tard, elle était encore assise devant son bureau, les mains posées sur ses genoux. Elle regardait par la fenêtre le parking vide plongé dans le noir, derrière la faculté de lettres et de philosophie, dos à la porte.
Ils entrèrent tout doucement, chaussés de semelles de crêpe, et pénétrèrent dans le bureau sans être vus.
Ils retinrent leur souffle de crainte quâelle puisse entendre lâair sâéchapper de leur nez.
Lâun dâeux tendit le bras.
Soudain, une main se posa sur lâépaule de la jeune fille. Elisabetta laissa échapper un petit cri.
« Hé, jolie ! On tâa fait peur ? »
Elle fit pivoter sa chaise et ne sut pas si elle devait être soulagée ou fâchée à la vue des deux policiers en uniforme.
« Marco ! Tu nâes quâun monstre ! »
Il nâétait pas un monstre, bien entendu, il était grand et beau, son Marco.
« Ne sois pas fâchée contre moi. Câétait lâidée de Zazo. »
Zazo sautait sur place comme un gamin, étourdi par le succès de sa plaisanterie ; son holster en cuir claquait contre sa cuisse. Depuis quâelle était toute petite, il sâamusait à faire peur à sa sÅur et à la faire hurler. Toujours en train de mijoter quelque chose, toujours farceur, toujours un moulin à paroles, son surnom dâenfant, Zazo â « tais-toi, ferme-la » â lui était resté.
« Merci, Zazo, dit-elle, ironique. Jâen avais besoin, surtout ce soir.
â Ãa ne sâest pas bien passé ? demanda Marco.
â Un désastre, marmonna Elisabetta. Un désastre complet.
â Tu pourras me raconter pendant le dîner, proposa Marco.
â Tu nâes pas de service ?
â Eh, non ! dit Zazo. Moi, si je fais des heures sup, je nâai pas de petite amie pour me nourrir.
â Je la plaindrais si elle existait », dit Elisabetta.
Dehors, ils se courbèrent pour se protéger de la morsure du vent. Marco boutonna son pardessus pour cacher sa chemise bleue amidonnée et son ceinturon blanc. Lorsquâil nâétait pas de service, il ne voulait pas ressembler à un flic, surtout sur un campus universitaire. Zazo, lui, sâen fichait. Leur sÅur Micaela se plaisait à dire quâil était tellement heureux dâappartenir à la police quâil gardait probablement son uniforme pour se coucher.
Dehors, tout bougeait et claquait dans le vent, à lâexception de la colossale statue en bronze de Minerve, la déesse vierge de la sagesse, qui projetait son ombre sur sa pièce dâeau baignée de lune.
La voiture de patrouille de Zazo était garée juste devant les marches. « Je peux vous ramener. » Il se mit au volant.
« On va marcher, répondit Elisabetta. Jâai besoin dâair frais.
â Comme tu voudras, dit son frère. On se voit chez papa dimanche ?
â Après lâéglise, dit-elle.
â Dis bonjour à Dieu pour moi, dit Zazo dâun ton léger. Je serai au lit. Ciao . »
Elisabetta fit deux tours de son écharpe autour de son cou et partit, bras dessus bras dessous, avec Marco vers son appartement sur la via Lucca. Généralement, à neuf heures, le campus grouillait de monde, mais la chute vertigineuse des températures avait semblé prendre les gens par surprise et les piétons étaient rares.
Lâappartement dâElisabetta nâétait quâà dix minutes de là . Câétait un modeste deux-pièces quâelle partageait avec une interne en orthopédie qui était souvent de garde. Marco vivait chez ses parents, de même que Zazo, qui occupait sa chambre dâenfant, comme un gamin trop grand. Aucun dâeux ne gagnait suffisamment dâargent pour louer son propre logement, même si lâidée dâune colocation dès
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