La Prophétie des papes
paraître par ailleurs, il pourrait, parmi les cardinaux rassemblés par un jour ensoleillé, être inévitablement remarqué dans la foule à cause de ses immenses lunettes de soleil Prada si caractéristiques qui le faisaient ressembler à un metteur en scène de cinéma. Il pouvait se détendre, maintenant quâil nâétait plus inquiet à lâidée dâêtre en retard. Il y avait eu un embouteillage sur le chemin du retour depuis la via Napoleone où il avait présidé la réunion annuelle de la Commission pontificale dâarchéologie sacrée.
« Les lumières sont allumées, au-dessus », dit Diaz, en pointant le doigt vers le plafond.
Lâappartement du pape se situait deux étages au-dessus de leur tête dans le palais du Vatican.
« Câest bon signe, jâimagine, dit Aspromonte. Peut-être son état sâest-il amélioré aujourdâhui.
â Quand lâavez-vous vu pour la dernière fois ? demanda Giaccone.
â Il y a deux jours. Jây retournerai demain.
â Comment vous a-t-il paru ? demanda Diaz.
â Faible. Pâle. La souffrance se lit sur son visage, mais il ne se plaint jamais. »
Aspromonte regarda Diaz.
« Venez avec moi demain. Je nâai pas de question officielle à régler avec lui. Je suis sûr quâil voudra vous voir. »
Diaz hocha sèchement la tête, ramassa le verre de prosecco quâAchille avait posé à côté de son fauteuil et regarda les minuscules bulles qui montaient vers les cieux.
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La douleur était moins vive depuis une bonne heure au moins et le pape parvint à avaler un bol de bouillon. Il eut une envie soudaine de se lever et de profiter de ce rare sursaut dâénergie. Il fit retentir sa sonnette et sÅur Emilia apparut si promptement quâil lui demanda â ce qui se voulait une plaisanterie â si elle avait lâoreille collée contre la porte.
« Allez chercher les pères Diep et Bustamante. Dites-leur que je veux descendre dans mon bureau et dans ma chapelle. Et faites venir Giacomo pour quâil mâaide à mâhabiller.
â Mais, Votre Sainteté, objecta la nonne, ne devrions-nous pas demander au docteur Zarilli si câest bien raisonnable ?
â Laissons Zarilli où il est, grogna le pape. Laissons-le dîner tranquillement en famille. »
Giacomo Barone était un laïc, au service du pape depuis vingt ans. Il nâétait pas marié et vivait dans une petite chambre du palais ; il semblait nâavoir dâautres intérêts que le football et le souverain pontife. Il parlait seulement lorsquâon lui adressait la parole et, quand le pape était plongé dans ses réflexions et peu enclin à bavarder tranquillement, ils pouvaient passer une demi-heure dans un silence complet, enchaînant ablutions et habillage.
Giacomo entra, le visage assombri par une barbe de trois jours. Il apportait avec lui lâodeur des oignons quâil était en train de cuisiner.
« Je veux me laver et mâhabiller », dit le pape.
Giacomo sâinclina docilement et demanda :
« Que souhaitez-vous porter, Votre Sainteté ?
â Juste la tenue dâintérieur. Ensuite, emmenez-moi en bas. »
Giacomo avait des épaules et des bras puissants, et il déplaça le pape dans sa chambre comme un mannequin, lâépongeant, le poudrant, empilant les vêtements, pour finir avec une soutane blanche et une ceinture armoriée, une croix pectorale, des pantoufles rouges souples et un zucchetto blanc en lieu et place du bonnet tricoté. Lâhabillage parut fatiguer le souverain pontife, mais il insista pour aller au bout de son projet. Giacomo le souleva pour lâinstaller dans son fauteuil roulant.
Ils prirent un ascenseur pour descendre au premier étage où deux gardes suisses en tenue dâapparat bleue et orange avec des rayures rouges se tenaient à leur poste habituel devant la conciergerie. Ils semblèrent choqués de voir le pape. Tandis que Giacomo poussait le fauteuil, le pontife les salua et les bénit. Ils traversèrent les salles officielles de lâÃtat désertes jusquâau bureau privé du pape contenant son grand bureau, lâendroit quâil préférait pour travailler et lire ses documents.
Le bureau
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