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La Régente noire

Titel: La Régente noire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
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veillerai moi-même à ce que tous vos biens vous soient maintenus ; et cela, votre vie durant !
    Là-dessus, François I er s’approcha du connétable de Bourbon pour lui donner une accolade fraternelle. Charles frissonna de plus belle.
    — Que Votre Majesté parte pour l’Italie l’esprit en paix ; et qu’elle sache bien, surtout, qu’il n’existe et n’existera aucune intelligence entre ses ennemis et son serviteur.
    Le roi respira ; son regard s’adoucit, ses yeux s’embuèrent.
    — Mais mon cousin, répondit-il, je n’ai nulle intention de partir sans vous. Nous traverserons les monts ensemble !
    — Hélas, cousin... Ce qu’il y a de maudit dans cette fièvre, c’est qu’elle me prive de marcher à vos côtés.
    — Allons, aucune fièvre n’est éternelle ! Nous attendrons le temps qu’il faudra. Et vous reprendrez votre place au premier rang de mes armées, comme au beau temps de Marignan !
    François serra fermement la main de Charles, qui s’efforçait de soutenir son regard ; puis il se dirigea vers la porte.
    — À propos, mon cousin... J’aimerais laisser chez vous un ou deux écuyers, afin de me tenir bien au courant des progrès de votre santé.
    — Ils seront les bienvenus, lâcha le connétable en essuyant avec sa manche la sueur de son visage. Adieu, sire !
    — À demain, cousin ! Ou après-demain...

    François rejoignit, dehors, les quelques gentilshommes qui l’avaient accompagné. Parmi eux, l’amiral de Bonnivet se montrait, de loin, le plus échauffé. Il se précipita au-devant de son maître, et oubliant toute civilité, manifesta sa révolte.
    — Sire, dit-il, cet homme-là vous trompe !
    — Allons, amiral...
    — Fiez-vous à moi ! Saisissez-vous céans de sa personne !
    — Mais non, sûrement pas.
    Le souverain se remit en selle et fit signe d’approcher à son capitaine.
    — Longueville, ordonna-t-il à mi-voix. Nous allons lever le camp en bon ordre.
    Puis il revint vers Bonnivet toujours bougon.
    — Les choses n’en sont pas là, trancha-t-il. Il ne serait pas raisonnable, et ce serait injure à un tel prince, que de le faire saisir comme un bandit, sur de simples rumeurs...
    — Mais le grand sénéchal et l’évêque de Lisieux...
    — Ni l’un ni l’autre ne me rendront Milan, lança d’un ton cassant le roi de France.
    Il donna le signal du départ, et le petit cortège se mit en branle, en direction du gros de l’escorte, qui attendait plus bas, sur la place.

    Depuis sa chambre, figé derrière les petits carreaux d’une croisée, le connétable devinait le retrait des troupes royales. Son visage trahissait une grande agitation intérieure. D’un poing fébrile, il serrait sur son cœur la miniature figurant Mme de Beaujeu « du temps de sa gloire ».
    En Bourbonnais.
    L e 25 août, le roi étant à Lyon, Gautier de Coisay avait quitté la capitale des Gaules pour se rendre, sur son ordre, auprès du connétable. À Moulins. Il était porteur d’une lettre de créance où François I er , prenant au mot son « cousin », lui redisait que jamais il ne franchirait les monts sans lui. Le faux malade avait renvoyé ce messager bien vite, avec moult assurances lénifiantes sur sa fidélité, sa convalescence, son désir de rejoindre au plus tôt l’host royal...
    Renvoyé dès le 3 septembre vers le séditieux, Gautier devait retrouver celui-ci à Saint-Gérand-de-Vaulx, près de Varennes. Plus invalide que jamais, le connétable affectait de ne pouvoir cheminer qu’en litière, par très petites étapes ; ce qui ne pouvait, protesta-t-il, que retarder son arrivée à Lyon... Lors d’une halte à La Palisse, le duc de Bourbon franchit même un palier dans la feinte : il se déclara si faible, tellement souffrant, qu’il retint les médecins à son chevet, malgré eux. Pendant la nuit, ses gens firent exprès grand tapage dans toute la maison, s’agitant, courant, s’apostrophant comme on peut le faire autour d’un agonisant. Dans le même temps, il se murmurait sous cape que le soir même, le connétable irait coucher à Gayette, à quatre lieues de La Palisse ; or Gayette n’était pas sur la route de Lyon, mais bien sûr sur celle de Moulins !
    Pour la seconde fois, le jeune Coisay rendit compte au monarque ; et pour la seconde fois, François le renvoya au duc, muni cette fois d’une mise en garde à peine voilée, ainsi que d’une demande d’explication dans les formes. Le roi jugeait « bien

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