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La Régente noire

Titel: La Régente noire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
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étreinte l’en dissuada.

    Marguerite n’avait pas eu le cœur d’avouer à son frère que, sur les conseils éclairés de Montmorency, elle avait elle-même fait capoter le plan d’évasion. Tous deux avaient estimé, en fin de compte, qu’une telle initiative, même couronnée de succès – ce qui déjà était douteux – aggraverait, sans rien régler, la crise diplomatique affectant la France et l’Empire.

    Elle prit congé de Madrid, l’abdication soigneusement serrée contre elle, aussi lentement qu’elle y était entrée en hâte. L’idée de s’éloigner du roi, de l’abandonner pour ainsi dire à son terrible sort, lui paraissait insurmontable. Et d’autant plus qu’à mesure que s’allongeait la distance entre eux, les lettres de son frère faisaient état de sa mélancolie, de son abattement, bientôt de sa rechute ! La princesse avait choisi de repartir par voie de terre, afin de pouvoir, le cas échéant, faire demi-tour. Et plus d’une fois, elle hésita. Mais les villes d’Espagne s’égrenaient tout de même : Alcalá, Siguenza, Medina Celi... Chaque nuit, Marguerite rêvait de son frère qu’elle embrassait en songe, qu’elle tenait par la main ; chaque jour, elle lui écrivait, tâchant de calmer, par des mots sans cesse plus tendres, son désespoir et le sien... Montreal d’Aragon, Bovierca.
    Un ordre exprès de l’empereur ayant interdit aux Grands d’Espagne, depuis le complot avorté, d’adresser la parole à la duchesse d’Alençon, elle se confiait du moins à leurs épouses, à leurs filles, à leurs cousines... Elle fut reçue en reine au palais de Guadalaxara, chez le duc de l’Infantado ; elle se fit acclamer, de nouveau, à Saragosse, par une population qui voyait dans son périple l’odyssée d’une héroïne de romans courtois.

    Un peu avant Noël, un ordre mystérieux de son frère lui intima de se hâter. En effet, le duc de Bourbon s’était entendu avec Gattinara pour tenter de faire obstacle à Marguerite, de la coincer quelque part, de lui reprendre l’acte d’abdication dont ils avaient eu vent.
    Le connétable félon avait débarqué en Espagne, au grand dam d’une noblesse qui le haïssait. Une anecdote circulait, qui donna le ton, l’empereur ayant prié l’un de ses vassaux d’héberger le connétable : « Sire, aurait dit ce grand seigneur, je ne puis refuser ma maison à Votre Majesté. J’en serai quitte pour la brûler le lendemain. »
    Bourbon, une fois de plus, fut déjoué dans ses plans. Marguerite, aidée par les Espagnols, franchissait déjà les Pyrénées à Cerbère. La veille de Noël, elle atteignait sans obstacle les frontières du royaume, et croisait les gendarmes de Mgr de Clermont sur la route de Salses. Partout, en Languedoc, en Provence et jusque sur le Rhône, ce ne furent qu’embrassades, bains de foule, délégations princières ou cardinales. Cent fois, la princesse dut raconter ses exploits ibériques ; cent fois, on pleura de bon cœur avec elle sur les malheurs du pauvre roi...
    Sur le tard, ayant appris que sa mère, la régente, qui accourait à sa rencontre, se trouvait terrassée par un nouvel accès de goutte, elle prit la décision de hâter sa marche. Mais dans les dernières étapes, alors que le périple allait toucher à sa fin, elle fut victime d’une chute de cheval qui la blessa gravement au genou... Elle qui avait triomphé sans encombre des défilés et des sierras, des combes de Castille et des gorges du Henarès, voilà qu’elle achoppait sur les petits cailloux d’un chemin creux du Midi.
    1 - Ou... ou bien Paolo.
    2 - Belle-sœur.

Chapitre X
    Hiver et printemps 1526
    Madrid, donjon de Los Lujanes.
    À mesure que s’élaborait le traité dont tout devait procéder, François I er reprenait goût à la vie. Un espoir s’était fait jour, lui ouvrant des perspectives sur un horizon jusque-là terne comme la plaine de Castille. Avec plaisir, les familiers du roi captif notaient ses progrès. Sa santé redevenait florissante, son humeur retrouvait ce fonds de jovialité qu’on lui avait toujours connu.
    Le régime carcéral s’adoucissant peu à peu, des promenades furent organisées, par un vent souvent glacial. L’empereur en personne avait pris l’habitude de rendre visite au roi ; et la population madrilène s’habituait à les voir, de loin, marcher ensemble et deviser calmement, comme deux amis. François reprenait confiance en son étoile ; il envisageait

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