Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La Religion

La Religion

Titel: La Religion Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Collectif
Vom Netzwerk:
qui descendait la pente est du mont Sciberras jusqu’à ras de l’eau. Là, et c’était très clair maintenant, une batterie de canons légers avait été installée, avec une unité de mousquetaires Tüfekchi, très astucieusement abrités des canons de Saint-Elme et de Saint-Ange. L’éclair des déflagrations de leurs gueules et les panaches de fumée des mousquets étaient la seule chose que l’on pouvait voir. Ça, et les résultats calamiteux de leur précision.
    Une éclaboussure de bois, d’eau et de morceaux de corps expédiés en l’air jaillit de la première chaloupe, qui s’enfonça, les rames s’agitant en tous sens, tandis que l’estomac de Tannhauser se serrait. À peine un instant plus tard, le tonneau de feu grégeois, ouvert par un boulet et allumé par la mèche d’un arquebucero déjà noyé, explosa en un volcan jaune qui illumina la baie un quart de mille à la ronde, en expédiant des morceaux enflammés de cette mélasse incendiaire de tous les côtés.
    Un certain nombre de ces diaboliques projectiles volèrent vers la foule d’estropiés et de blessés sur le quai, la panique souffla sur cette multitude et une frénésie de survie éclata tout autour de lui. Des cris d’agonie se mêlaient aux cris de désespoir venus des brancards qui tombaient. Tannhauser, trouvant précaire l’emplacement qu’il occupait tout au bout du quai, commença à tracer sans ménagement son chemin vers l’intérieur des terres. C’est alors que deux boules de feu de la taille d’un poing s’abattirent au milieu de cette foule en proie à la panique, et la masse se sépara en deux cercles distincts, allant croissant, en s’éloignant des deux points d’impact. Un cercle entra en collision avec l’autre et le chaos fut encore augmenté quand ceux qui avaient été frappés par le feu poussèrent pour trouver leur salut dans l’eau. La pression de la foule était irrésistible. Malgré toute sa force, Tannhauser fut repoussé en arrière. La Voie lactée passa comme un éclair au-dessus de sa tête, son dos s’écrasa dans l’eau et ses oreilles devinrent abruptement sourdes au tumulte du quai.
    Pendant un instant, la fraîcheur fut un délice, puis il se rendit compte qu’il coulait avec un homme affolé, lourd comme une meule à grain, appuyé sur son torse. Il se débattit, prit un coup de pied dans le ventre et coula plus profond. La fraîcheur atteignit ses pieds car ses hautes bottes étaient désormais pleines. Il battit des pieds avec autant d’effet que s’il avait été enterré vivant dans du sable. Il arracha son casque et agita les bras, perdant tout sens de l’orientation dans ce vide. Le néant s’ouvrait sous lui. Ses poumons refusaient ses ordres de ne pas éclater et se convulsaient de leur propre chef. La panique le traversa, aussi vive et brève qu’un éclair. Quand l’eau se précipita dans ses narines et sa gorge, la sensation s’améliora d’une manière remarquable. La noirceur dans laquelle il était immergé s’étendit comme de la chaleur dans son esprit et avec elle vint un soulagement qu’il n’aurait pas cru possible. Une image d’Amparo vint et repartit. Puis il entendit, aussi clair qu’une cloche, la voix de sa mère appelant son nom : « Mattie. »
    Ainsi, c’était fini, pensa-t-il. C’était là ma vie. Ai-je agi si mal ?
    Il pensa : Tu aurais pu faire pire. Mais cela t’aurait demandé un énorme effort.
    Il revint à lui, le visage écrasé sur des dalles trempées. Il faisait noir et il avait la sensation que quelqu’un sautait sur son dos. De l’eau salée jaillit de sa bouche et piqua ses sinus. Il ne pouvait pas bouger et les sauts se poursuivaient. Il se rendit compte qu’il était vivant et que de l’endroit dont il revenait émanait une paix si profonde que cela n’avait pu être que sa mort. Les sauts sur ses omoplates étaient plus qu’il ne pouvait supporter et il rassembla ses forces pour donner un coup de coude derrière lui. Il toucha quelque chose de solide et l’assaut cessa. Des mains le firent se retourner sur le dos et il resta étalé comme ça, respirant bruyamment. Orlandu, les cheveux dégoulinants d’eau, le regardait d’au-dessus en souriant.
    « Trimballer une bassine de pâtée à travers la cour ? dit-il, avec jubilation. Bien sûr, et trimballer une bassine de saindoux hors de l’eau. »

VENDREDI 15 JUIN 1565
    Le rocher d’Amparo
    AMPARO ÉTAIT ASSISE sur un

Weitere Kostenlose Bücher