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La Religion

La Religion

Titel: La Religion Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Collectif
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la haine, elle pouvait au moins faire cela. Quelque chose d’éternel devait survivre au milieu de tant de haine, et seul l’amour le pouvait. Son amour. L’amour de Lazaro. L’amour du soldat sans nom. L’amour de Jésus-Christ. Elle se leva, quittant l’étroit lit qui semblait un nuage et retourna vers le gouffre en bas, et elle pria pour que l’amour du Christ les guérisse tous.
     
    IL Y AURAIT D’AUTRES ASSAUTS, et d’autres encore, elle le savait, car, de tous les espoirs idiots et impossibles qu’elle entretenait, l’espoir de voir tous ces combattants jeter leurs armes était le plus insensé de tous. Mustapha, disait-on, était enragé par ses échecs et l’on s’attendait à une nouvelle attaque turque très bientôt. Les murs du Borgo et de L’Isola étaient effondrés en une demi-douzaine d’endroits, et chaque être humain capable de porter une pierre ou de tenir une pelle faisait désormais la queue aux côtés des esclaves pour réparer les dégâts et construire de nouveaux abris et de nouvelles barricades.
    Les réserves de l’hôpital en médicaments et drogues – vin noir, mandragore et bétoine, belladone et huile de rose, opium et moût de Saint-Jean – qui avaient semblé inépuisables quand le siège avait commencé étaient désormais réduites à néant. Le jardin de simples avait été dépouillé depuis longtemps de ses moindres fleurs et pétales. D’énormes balles de bandages et de compresses avaient été vidées, et les frères qui servaient allaient auprès des morts ou des guéris ramasser tout ce qu’ils pouvaient nettoyer pour le réutiliser. La bataille contre la purulence rampante répandue par les miasmes avait remplacé le combat contre les blessures fraîches, et l’odeur du pus devenait envahissante. Les fosses communes avaient été remplies et l’on creusait des fosses fraîches. Chaque vaste maison de la ville avait été réquisitionnée pour y soigner les moins atteints.
    Par bonheur, comme pour contrebalancer de telles duretés, un homme qui creusait un abri pour sa famille dans la cave de sa maison avait sans le vouloir mis au jour une source d’eau fraîche d’un considérable débit journalier. Ce miracle, car c’en était un et il était acclamé pour tel, avait résolu le problème le plus grave de la ville – le manque désespéré d’eau potable – et il ne fut terni que par la violente dispute qui éclata pour savoir s’il fallait l’attribuer à sainte Agathe, sainte Catherine ou saint Paul.
    Quoi qu’il puisse advenir ensuite, Carla le supporterait. Elle avait découvert la paix qui vient avec l’immersion dans la souffrance. C’était une paix étrange, une paix horrible, une paix que l’on n’aurait souhaitée à personne, car les victimes de la guerre en payaient le prix. Vulnérables et sans recours, ils étaient absous de toute méchanceté – de tout sauf du courage et de la foi les plus primitifs – et ils reconquéraient l’innocence de l’enfant. Être blessé révélait quelque chose de l’âme d’une personne, d’une manière interdite à toute autre, et ce que cela révélait était quelque chose de merveilleux, quelque chose de noble, quelque chose qui, malgré l’agonie, la saleté et l’humiliation, contenait plus de véritable dignité que tout ce qu’elle avait pu voir de sa vie. Les malades étaient vraiment plus proches de Dieu, et elle avait appris à accepter la paix qu’ils lui avaient apportée comme un don du Christ. Le même don que celui qu’il avait lui-même promis sur la Croix, pour prix de sa propre et terrible Passion. La fierté de Carla avait été vaincue, et sans regret. Ses propres peurs et inquiétudes lui avaient peu à peu paru mesquines. Et pourtant elles demeuraient. En marchant vers l’auberge, elle pensa à Amparo, et se demanda si elle serait là à l’attendre.
    Parfois, Carla trouvait la fille roulée dans le lit et elle s’allongeait alors à côté d’elle, et elles s’éveillaient chacune dans les bras de l’autre, et le jour commençait avec quelque chose proche d’un bonheur. D’autres fois, Carla ne la voyait pas pendant des jours et elle entendait dire qu’Amparo dormait sur le quai, ou dans les écuries auprès de Buraq, à qui elle était entièrement dévouée. Lors de chacune de leurs rencontres épisodiques, Amparo avait semblé retourner un peu plus vers tout ce qui faisait d’elle la pauvre enfant sauvage abandonnée, trouvée un

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