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La Religion

La Religion

Titel: La Religion Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Collectif
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an. »
    Le Saint-Sépulcre était perché sur un escarpement aussi fissuré que le visage de la désolation, à quelque trois jours de voyage vers le centre calciné de la Sicile. Les minimes étaient appelées ainsi parce que leur ordre de nonnes très fermé suivait des règles d’une sévérité inhabituelle. Elles vivaient dans un silence absolu et renonçaient à la viande, au poisson, aux œufs et à tout laitage. Ludovico pensa à la reine Juana d’Espagne, enfermée dans une cellule totalement obscure pendant trente ans, et il considéra que Carla était traitée avec bienveillance.
    « Elle n’ira pas volontiers, mais une telle retraite ne sera que bénéfice pour son âme. »
    Gonzaga prit une expression pieuse pour hocher la tête.
    « Elle ne doit être accusée d’aucun crime, civil, moral ou hérétique, dit Ludovico. Rien ne doit paraître sur papier. Seuls les fous écrivent ce qu’ils peuvent accomplir par le seul discours, et le discours en question ne devra pas avoir un troisième témoin. Vous comprenez ? »
    Gonzaga se signa. « Votre Excellence, tout se passera comme vous le demandez.
    – La seconde tâche nécessitera le recours aux armes, suffisamment pour soumettre un homme à la fois habile au combat et répugnant à céder. Il a peut-être des amis. Nous avons rencontré cet homme ce matin, sur les quais.
    – L’Allemand, siffla Gonzaga. J’aurais dû agir plus tôt, car l’homme est à moitié musulman et associé à un Juif, mais il n’est pas sans amis puissants dans la Religion.
    – Tannhauser est un criminel. Fraude aux douanes, corruption de fonctionnaires d’État, et plus encore sans nul doute. Cela ne doit pas s’afficher comme une affaire ecclésiastique. Que le pouvoir civil s’en charge, mais veillez à ce qu’ils agissent rapidement et avec force.
    – L’Allemand doit-il être pris vivant ? s’enquit Gonzaga.
    – La vie de Tannhauser est négligeable.
    – Je vais faire arrêter le Juif aussi », dit Gonzaga.
    Ludovico avait toujours considéré la haine, si répandue, portée aux Juifs comme vulgaire et dénuée de logique. Contrairement à la lie luthérienne, ils ne représentaient aucune menace pour l’Église. Il dit : « C’est votre affaire.
    – Leurs biens seront confisqués, bien évidemment, au profit de la congrégation, dit Gonzaga. Nous aurons également notre part.
    – N’ai-je pas été assez clair ? »
    Gonzaga pâlit. Sa bouche se tordit d’excuses qu’il n’osait pas prononcer.
    « Il est de mon souhait, dit Ludovico, que le Saint-Office ne laisse pas la moindre trace de sa main dans cette affaire. Ce doit être, et doit apparaître, comme une affaire entièrement civile. Si le Saint-Office devait jamais être impliqué dans ces procédures, d’une quelconque manière, vous vous retrouveriez directement lié à cette faute. »
    Gonzaga jeta un œil vers Anacleto et se retrouva face au regard qu’un cobra accorde à un crapaud. « Tout sera fait selon les ordres de Votre Excellence, dit Gonzaga. Rien d’écrit, pas de troisième témoin, aucune trace. Une affaire purement civile. Je ne prendrai pas un sou pour ma congrégation. »
    Gonzaga attendait, comme pour recevoir quelque éloge ou quelque réconfort. Ludovico le fixa jusqu’à ce que ses tortillements le dégoûtent.
    « Vous avez beaucoup à faire, frère Gonzaga. Veillez à ce que cela soit bien fait. »
    Tandis que Gonzaga se dépêchait de sortir, Ludovico ressentit une pointe d’anxiété. Il n’avait jamais confié de telles affaires à Gonzaga. Désespéré de plaire comme l’était cet homme, il empestait l’excès de zèle et les ambitions mesquines si communes aux fonctionnaires de province. Pourtant, Gonzaga était l’éminence locale. C’était presque une honte que Tannhauser doive sa chute à une créature si basse. Quant à Carla, il reconsidérerait son sort en temps utile.
    Ludovico s’approcha de la fenêtre et regarda dans la cour en dessous. Des chevaux sellés attendaient pour les emporter vers Palerme. Là, il allait prendre la mesure du vice-roi espagnol, Garcia de Toledo, avant d’embarquer pour se rendre à Rome. Après le vice-roi de Naples et le pape, Toledo était l’homme le plus puissant d’Italie, et en ce qui concernait l’invasion de Malte, plus important qu’aucun des deux. La Valette avait demandé à Ludovico de tout faire pour que Toledo envoie une armée en renfort ; mais cette

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