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La Religion

La Religion

Titel: La Religion Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Collectif
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demandé. Exactement comme ce prêtre qui l’emmenait vers l’oubli, ne se souciait en rien d’elle et ne lui posait aucune question. Elle n’était qu’un de ces personnages grotesques, perdus – damnés – dans l’émeute intéressée de l’existence humaine.
    Et même ainsi, elle se demandait ce qu’elle avait fait pour provoquer sa réclusion. Tout avait changé depuis hier, ou depuis le jour précédent, depuis l’arrivée de la lettre de Starkey et la visite de Tannhauser. Son emprisonnement dans un couvent ne pouvait visiblement profiter ni à l’un ni à l’autre. Peut-être avait-elle été espionnée ? Par Bertholdo ? Mais pour qui et pour quelle raison ? Le seul candidat était son propre père, don Ignacio, à Mdina. Elle avait fait suffisamment connaître son désir de retour pour qu’il en entende parler, surtout parce qu’elle le brandissait, lui, comme motif. Elle pouvait facilement imaginer qu’il la méprisait assez, même encore maintenant, pour empêcher qu’elle revienne chez elle. Sa réclusion au milieu de nonnes qui vivaient dans l’autoflagellation paraîtrait juste aux yeux d’un homme si religieux. Mais elle ne trouvait toujours pas le cœur à le haïr. Il y avait déjà assez de haine sur terre sans qu’elle y ajoute sa donation.
     
    LE CARROSSE SE BALANÇAIT dans la nuit. L’haleine nauséabonde du prêtre emplissait tout l’espace. Ils ralentirent pour gravir la pente abrupte d’une colline. Elle se mit à espérer que le cocher les inviterait à épargner le cheval et à descendre pour marcher. Elle souhaitait, s’il en décidait ainsi, trouver le moyen de s’enfuir. Avec ses bottines ridicules et sa robe ridicule. Elle souhaitait être un homme, comme Tannhauser, qui n’avait jamais enduré la faiblesse d’être une femme. Pas étonnant qu’il les trouve mystérieuses. Elles acceptaient un esclavage qui ne les flattait même pas de chaînes.
    Le carrosse s’arrêta complètement, vitesse à peine plus lente que celle qu’ils avaient atteinte dans la pente, et elle sentit le déclic du frein contre la roue. Puis elle entendit un échange verbal dur et lourd de menaces, étouffé par l’épaisseur du volet. De vagues sons et des bruits sourds émanaient d’au-dessus, et la menace fut répétée. Il y eut un coup de feu, à quelques pouces de là, sembla-t-il, épouvantable dans sa violence inattendue. Le petit prêtre sursauta dans le noir. Le coup de feu fut suivi d’un cri, et du bruit de quelqu’un qui tombait – cela ne pouvait être que le cocher –, et le cheval avança, mais pas le carrosse, dont le frein grinça en bloquant l’essieu. L’invisible prêtre ne fit aucune tentative pour se renseigner. Au contraire. Il demeura parfaitement immobile et des odeurs plus repoussantes qu’auparavant se répandirent dans le carrosse. Carla ouvrit le volet et le prêtre ne l’en empêcha pas.
    Après tant d’obscurité suffocante, la lumière de la lune et des lanternes du carrosse semblait énorme. Le paysage qu’elle apercevait – l’étendue d’argent brillant de la mer au loin, le flanc gris pâle de la colline surplombant la route – emplit Carla d’euphorie. Elle regarda le prêtre tassé en face d’elle. Elle ne pouvait pas voir ses yeux, mais son corps était rigide et ses lèvres paraissaient trembler d’une prière silencieuse. Elle se rendit compte, avec quelque surprise, qu’elle ne ressentait aucune peur, malgré le fait que ces collines étaient infestées de bandits. Tannhauser avait raison. Elle n’était pas dénuée d’une certaine sorte de courage. Si le prêtre craignait ce qui les attendait dehors, elle pas du tout. Elle ouvrit la portière du carrosse et descendit.
    Il y eut un éclair de lune quand Tannhauser baissa son épée. La lame dégoulinait d’un liquide noir visqueux. Il était à pied et tenait dans sa main gauche un pistolet dont le museau laissait encore monter un dernier petit filet de fumée grise. Ses yeux étaient comme des charbons ardents bleus dans leurs orbites, ses cheveux étaient en bataille et sa lèvre était ourlée d’un sourire qui, une fois de plus, lui fit penser à un loup, mais cette fois ce loup avait été dérangé sur les lieux d’une tuerie. Cette comparaison était très appropriée, car, affalé la tête en bas, coincé dans les traits de l’attelage, la cuirasse zébrée et luisante du même liquide noir, se trouvait le corps du cocher.
    « Êtes-vous

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