Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
la tondue

la tondue

Titel: la tondue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie de Palet
Vom Netzwerk:
faire un saut ; elle serait bientôt de retour… Elle s’en alla, discrète, et se dirigea vers le pré qui longeait la route et où elle avait conduit ses vaches en milieu de matinée.
    Yvette ressentit comme une vague peur car, avant de partir, la mère lui avait lancé un regard en biais plein de jubilation et d’excitation.
    La mère marchait aussi rapidement que le lui permettait sa jambe encore sensible parce que mal soignée depuis son retour de l’hôpital. Quand elle arriva en vue du troupeau, elle se posta au bord de la route comme si elle attendait quelqu’un.
    Effectivement, peu de temps après, David apparut sur son vélo. Il pédalait allègrement, content de passer une agréable après-midi et, malgré l’effort, sifflait une rengaine connue.
    La mère l’arrêta : « Hé, vous, arrêtez-vous donc un peu, on a à causer… »
    Surpris, le jeune homme mit pied à terre et regarda Clémence d’un air étonné.
    « Vous vous intéressez à ma fille, je crois. » David, étourdi par cette brusque attaque, ne répondit pas. Clémence continua :
    « Il n’y a pas assez de filles en ville pour venir ici chercher celles de la campagne !
    — Mais madame, ne put que balbutier David stupéfait, nous ne faisons rien de mal !
    — Je l’espère pour vous, on ne peut plus faire un pas sans vous rencontrer dans tous les coins ! La route ne vous suffit pas, il faut que vous alliez dans les champs.
    — Dans les champs ? Je ne comprends pas.
    — Ah non ? N’êtes-vous pas allés vous cacher au château ?
    — Mais on ne se cachait pas, je voulais voir…
    — Peu importe ce que vous alliez voir. Je crois que vous devriez laisser Yvette tranquille. »
    David regarda la mère. Une véritable rage meurtrière brûlait dans ses yeux. Le jeune homme, intimidé malgré lui, se demandait où elle voulait en venir ; il fit mine de remonter sur son vélo en disant d’une voix coupante :
    « Madame, je ne comprends rien à ce que vous me dites. Est-ce Yvette qui vous envoie ?
    — Et qui voulez-vous que ce soit ! Elle en a marre et n’ose pas vous le dire. Vous la fatiguez, avec toutes vos histoires de guerre…
    — Elle vous l’a dit ?
    — Non, mais elle se ronge les sangs… Alors, moi, je suis venue à sa place, allez-vous-en, laissez-la tranquille… Elle ne veut plus de vous ! »
    En disant cela, Clémence s’était transformée. Elle avait relevé sa petite taille et pointait des yeux flamboyants sur David avec l’intention, bien évidente, de le convaincre.
    « Je ne vous crois pas, répondit tranquillement David, Yvette est assez grande pour faire ses commissions elle-même, elle n’a pas besoin d’émissaires…
    — Ah, vous croyez ça, eh bien, vous vous trompez… Depuis bientôt deux ans, elle vous a fait croire beaucoup de choses et vous avez marché comme un bleu. Ah ! Laissez-moi rire ! Elle est maligne, la petite… »
    Et Clémence partit d’un rire sec et aigu qu’elle parut avoir toutes les peines du monde à arrêter. David la contemplait avec un sentiment de répulsion mêlé de curiosité. Malgré lui, il demanda :
    « Que voulez-vous dire ?
    — Ce que je veux dire ?… Lui avez-vous demandé ce qu’elle avait fait à Paris, pendant la guerre ; et pourquoi elle est venue se perdre ici, à la Libération ? Pourquoi a-t-elle fui et est venue se cacher ici, pour s’y faire oublier ? Le lui avez-vous demandé ?
    — Quand elle le voudra, elle m’en parlera.
    — Oui. Hé bien, je doute que ce soit demain la veille ! Pour dire à quelqu’un qui a perdu toute sa famille du fait des nazis que l’on a marché avec un Allemand et que l’on a tellement fricoté avec les boches qu’on a été tondue à la Libération, il faut un certain courage et je doute qu’elle ait celui-là. Oh, pour verser des larmes de crocodile sur quelqu’un qu’on n’a jamais connu et amener son fils sur les lieux où ce quelqu’un a vécu, je ne doute pas qu’elle soit forte, mais pour le reste.
    — Non…
    — Si, c’est cela la vérité. Sur ce, je vous ai assez vu, bonsoir… »
    Elle repartit, laissant David pétrifié au milieu de la route.
    Il resta un moment muet, incapable de comprendre ce qui venait de lui être jeté au visage, il ne ressentait ni douleur ni colère, il était comme anesthésié et pensait qu’il allait beaucoup souffrir quand la douleur se réveillerait…
    Quand il fut un peu revenu de sa stupeur, il tourna son vélo et

Weitere Kostenlose Bücher