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La Trahison Des Ombres

La Trahison Des Ombres

Titel: La Trahison Des Ombres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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En
tout cas, je t’explique la façon dont les choses sont réglées. Je suis clerc de
la chancellerie de la Cire verte, sur l’échelon supérieur se trouvent le jeune
Edouard et Aliénor, la fille de Sir Hugh Corbett.
    — Et plus haut ? interrogea Chanson.
Sir Hugh ?
    — Oui, Sir Hugh, puis le roi, puis Dieu.
    Il adressa un grand sourire à Chanson.
    — Et, tout au sommet, Lady Maeve.
    Le valet plissa les paupières, mais le visage
anguleux de Ranulf ne souriait plus. En vérité, le palefrenier savait qu’il ne
plaisantait pas. Ranulf n’avait peur de personne et Chanson l’en admirait fort.
Véritable homme de main, Ranulf entrait dans les tavernes d’un pas assuré,
accueilli par le sourire des jouvencelles, sortait ses dés pipés et invitait
tout un chacun. Preste comme un chat, il imitait un peu Sir Hugh. Pourtant,
Ranulf éprouvait une crainte respectueuse devant Lady Maeve en dépit de sa
petite taille et des cheveux d’or encadrant un visage qui rappelait à Chanson
celui d’un ange peint dans la vieille église. Un jour qu’il était éméché,
Ranulf avait avoué à quel point il redoutait les yeux de Lady Maeve.
    — Ils sont bleu clair, avait-il articulé
avec difficulté. Perçants et vifs, ils ne laissent rien passer. As-tu déjà
entendu la sentence : « Une main de fer dans un gant de velours »
?
    Ranulf s’était penché en arrière.
    — C’est tout à fait notre Lady Maeve. Je
suis même sûr que notre « Maître Longue Figure » a peur d’elle en
secret.
    Le clerc entraîna sa monture sur les pavés.
    — Et êtes-vous amoureux, Maître Ranulf ?
J’ai ouï parler d’une Lady Alicia...
    Rapide comme un serpent qui attaque, Ranulf se
retourna en montrant les dents. Chanson sursauta à un tel point que même sa
monture broncha et releva la tête.
    — Là, là ! la calma Chanson.
    Prudent, il ne quitta pas des yeux son compagnon
qui le foudroyait toujours du regard.
    — Je suis désolé... murmura-t-il.
    Ranulf se détendit.
    — Ah, ce n’est point de ta faute.
    Il fît signe au palefrenier de s’approcher et
lui passa le bras sur l’épaule.
    — Je vais t’expliquer : je l’aimais et
elle m’a quitté. Elle est entrée au couvent. Peut-être l’y rejoindrai-je.
    Chanson resta bouche bée.
    — Je ne vous vois point portant guimpe !
    Ranulf pouffa de rire et ôta son bras. f
                    — Non, non,
Chanson, pas au couvent mais dans l’Église ! J’y ai pensé à moult
reprises. Tu imagines l’archidiacre Ranulf, peut-être même l’évêque Ranulf de
Norwich ?
    Chanson, qui avait aperçu ces puissants prélats,
réprima un sourire. Ranulf-atte-Newgate, en fluides robes d’apparat, arborant une
mitre et portant une crosse, remontant avec lenteur l’allée centrale de l’abbaye
de Westminster !
    — De quoi vous a parlé la jouvencelle ?
s’enquit-il en changeant de sujet.
    Ils s’arrêtèrent à l’abreuvoir pour permettre à
leurs chevaux de se désaltérer. Ranulf contempla le ciel, puis, une fois
encore, la façade élégante de la place du marché avec ses bâtiments à
colombages, ses lanternes et ses vives peintures.
    — Le vieux « Maître Longue Figure »
voudra savoir ce que nous avons fait. Qu’avons-nous donc ici, Chanson ?
Une ville florissante et fortunée où tout le monde gagne bien sa vie, les
seigneurs, comme Sir Maurice et Tressilyian le juge, les marchands, les fermiers,
les meuniers, les prêtres bien nourris. Regarde Maître Samler : c’est un
chaumier qui fait de bonnes affaires. Il n’est pas riche cependant, mais dans
quelques années il enverra ses fils à l’école d’Ipswich.
    Il s’interrompit.
    — Pendant la journée, marchés et commerces
battent leur plein. L’argent et l’or changent de main, mais là où se trouve la
fortune la corruption, opulente et puante, prospère aussi. Les gens disposent
de plus de temps. Un homme convoite la femme de son voisin.
    Des péchés cachés croissent comme des mauvaises
herbes dans le blé. Des rivalités éclatent, des rancunes couvent. Des choses et
des bruits étranges se font jour.
    — Que voulez-vous dire ?
    — Prends la famille de Samler. As-tu
remarqué les filles, jeunes, potelées et mangeant à leur faim ? Elles ont
des loisirs, ce qui n’était pas le cas quand toute une famille travaillait de l’aube
au crépuscule, se remplissait le ventre de petite bière et de croûtes de pain
et dormait à poings fermés

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