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La Trahison Des Ombres

La Trahison Des Ombres

Titel: La Trahison Des Ombres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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sont pleines de jeunes femmes qui ont fui leur famille ou leur maître.
Maîtresse Walmer en était un bon exemple.
    — La connaissiez-vous ?
    — Nenni, Sir Hugh, mais j’aurais bien aimé.
    Corbett feuilleta le volume aux entrées serrées.
Il admettait le raisonnement de Burghesh. Si c’était vrai d’Ipswich, ce l’était
plus encore de Londres. Les bordels de Southwark étaient toujours à l’affût de
fugitives. Les pourvoyeurs de chair fraîche étaient sans cesse en quête de
nouvelles recrues ; c’était un sujet si sérieux que même le Conseil royal
en avait débattu.
    Le magistrat regarda Ranulf qui se tenait près
de la porte et espéra qu’il dissimulerait son malaise. Il était bien facile d’être
assis dans sa chambre à dévider des théories, comme un maître des collèges d’Oxford,
mais ce dont il avait besoin c’était de certitudes, de preuves.
    — Permettez-moi de vous poser une autre
question.
    Corbett se dirigea vers la petite fenêtre treillissée
pour examiner les notations avec plus de soin.
    — La paroisse St Edmund dessert la plus
grande partie de Melford, n’est-ce pas ? Dans votre cimetière il y a bien
un coin nommé le Champ du potier ?
    — C’est exact. C’est l’endroit réservé aux
corps des étrangers, aux victimes de mort violente et de maladies contagieuses.
Nous ignorons même souvent leur nom. Ce genre de trépas arrive à Melford :
c’est un chaudronnier ambulant qui tombe malade des fièvres ou un mendiant
écrasé par une charrette.
    — Et les cadavres des femmes inconnues ?
s’enquit le clerc.
    Grimstone se mordit les lèvres et jeta un coup d’œil
implorant au vicaire.
    — Robert, je ne parviens pas à m’en
souvenir, pouvez-vous m’aider ?
    — Il y en a eu un, déclara Burghesh en
prenant le registre des mains de Corbett. Voici environ deux ans. Le corps d’une
jeune femme a été repêché dans la Swaile.
    — Ah, oui, c’est vrai !
    Le père Grimstone claqua des doigts.
    — La malheureuse ! Elle avait séjourné
si longtemps dans l’eau qu’on l’a tout de suite ensevelie pour l’enterrer.
    — Voilà ! s’exclama Burghesh qui avait
trouvé l’entrée.
    Corbett suivit la page de son doigt épais et
traduisit la note écrite en latin :
    — Enterrée, une femme inconnue : la
Saint-Jean
             — Baptiste, 1301. Et ce livre,
demanda-t-il en le rendant au prêtre, ne contient-il pas d’autres notations qui
pourraient éveiller les soupçons ? Où a-t-on découvert ce corps ?
    — Près de Beauchamp, répondit Burghesh. Des
braconniers sont sans doute allés à la rivière et l’ont déniché. Il flottait dans
les roseaux.
    — Du braconnage ?
    Le magistrat sourit.
    — J’ai rencontré Sorrel hier, la femme de
Furrell, le braconnier.
    — Oh, cette pauvre folle !
    — Furrell est-il jamais venu vous voir ?
    Le prêtre fit un mouvement de dénégation de la
tête.
    — Si ! déclara Robert, le vicaire.
Juste après l’exécution de Sir Roger.
    — Et que s’est-il passé ? s’inquiéta
le père Grimstone.
    — Avez-vous oublié, mon père, insista
Bellen, que vous l’avez reçu au parloir ?
    Grimstone cilla. Corbett le dévisagea avec
attention. Son visage était sillonné de veines près du nez. Le magistrat
remarqua trois taches noires : une dans le cou, une sur le front et la
dernière sur la joue droite. Il se remémora ce que son ami, le mire, lui avait
enseigné à Londres : c’était les stigmates d’un buveur invétéré.
    — Il est bien venu, en effet, se reprit le
prêtre. Il m’a narré des contes fantastiques tendant à prouver que Sir Roger
était innocent. Je ne lui ai point accordé foi. En fait, je n’ai qu’à moitié
écouté, pourtant il a dit quelque chose d’intéressant  – au sujet d’un
Momeur. Mais Furrell ne cessait de bavarder à tort et à travers.
    — Pourquoi Sorrel cherche-t-elle encore son
corps ? interrogea Burghesh qui alla se placer près de la chaire pour
tapoter l’épaule de son ami.
    — Que voulez-vous dire ? s’étonna
Corbett.
    — Eh bien, je ne suis point un homme de la
campagne, expliqua le vieux soldat, mais vous avez vu les alentours, Sir Hugh.
Chaque parcelle de terre est mise en herbe ; Furrell et Sorrel
connaissaient les bois comme le dos de leur main.
    Corbett compléta sa pensée.
    — Bien sûr, murmura-t-il. Une tombe fraîche
peut être ignorée par un étranger, mais quelqu’un comme Sorrel ne

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