La traque d'Eichmann
villa, guettaient le moindre mouvement. L’un d’eux sortit inspecter l’avant de la maison, un autre l’arrière : c’était une fausse alerte.
L’attente angoissée reprit donc dclvii . Il leur tardait d’en finir avec Eichmann et d’être de retour en Israël. Il n’était pas question de se reposer : il fallait alterner les tours de garde, remettre la maison dans son état d’origine, vérifier les nouveaux papiers d’identité attribués à chacun, collecter les divers objets (jumelles, outils, passeports, vêtements, cartes, etc.) à jeter ou à détruire avant le départ. Eichmann passa la nuit assis sur le bord de son lit, conscient qu’il se passait quelque chose.
L’aube était proche, et avec elle l’ultime étape de la mission. Bientôt, il serait temps pour chacun de disparaître dans la nature.
25
En cette froide matinée d’hiver, l’atmosphère à Tira était plus tendue que jamais dclviii . Tout en préparant leur départ, les membres de l’équipe songeaient aux nombreux problèmes qui pouvaient encore surgir quand ils auraient quitté la villa.
Ni la radio, ni les journaux n’avaient mentionné la disparition d’Eichmann, mais la police ou les services secrets avaient peut-être exigé le silence sur cette affaire ; quant à la communauté des anciens nazis, il y avait peu de chances qu’elle fasse savoir publiquement qu’elle recherchait l’un des siens. L’équipe pouvait donc bel et bien faire l’objet de recherches actives, sans compter qu’elle risquait de se faire arrêter par hasard à quelque barrage routier ; malgré les sédatifs administrés par le D r Kaplan, Eichmann parviendrait peut-être alors à faire comprendre à la police qu’il était emmené contre son gré. Kaplan était certes un anesthésiste expérimenté, mais il n’était pas facile d’étourdir un homme sans l’endormir tout à fait. Par ailleurs, les routes de Buenos Aires étaient souvent en mauvais état, et un accident était toujours possible. À l’aéroport, les gardes pouvaient se montrer plus vigilants que d’habitude. Enfin, le vol lui-même n’était pas exempt de tout danger.
Au début de l’après-midi, l’équipe avait achevé l’essentiel des préparatifs ; il ne restait plus qu’à patienter, c’est-à-dire ruminer les nombreux risques encourus. La villa était en parfait état. Malkin avait réalisé de nouveaux essais avec le déguisement d’Eichmann, lequel était une fois encore persuadé qu’on allait l’exécuter sur place. Le médecin lui imposait un régime rigoureux pour réduire les risques de complications liées aux sédatifs. Chaque membre de l’équipe jouissait désormais d’une nouvelle identité, et Eitan avait envisagé dans ses moindres détails le transport d’Eichmann jusqu’à l’aéroport.
Les autres agents s’activaient de leur côté. Aharoni avait effacé toute trace de sa présence dans la planque où il se trouvait ; avec son costume et sa cravate, il avait l’air d’un parfait chauffeur quand il prit un taxi pour l’ambassade d’Israël. Là, Yossef lui confia une nouvelle Chevrolet pourvue d’une plaque d’immatriculation diplomatique : c’est dans cette voiture qu’il devait conduire Eichmann à l’aéroport. Il lui donna également, en plus d’un faux permis de conduire international, un nouveau passeport diplomatique faisant de lui un membre de l’antenne sud-américaine du ministère israélien des Affaires étrangères. Ainsi disparut son personnage d’homme d’affaires allemand. Aharoni quitta l’ambassade au volant de la limousine et, par mesure de prudence, se rendit dans un garage pour une révision complète du véhicule.
À Maoz, pendant ce temps, Shalom Dani préparait en hâte des documents à l’intention d’Eichmann dclix . Il allait même disposer d’un authentique certificat médical – accordé par un hôpital de Buenos Aires – attestant que cet homme, malgré un récent traumatisme crânien, était bien en état de prendre l’avion. Harel avait en effet demandé à un sayan de feindre un accident cérébral et de se rendre à l’hôpital pour y obtenir une autorisation de sortie. Dani n’eut aucun mal à falsifier le nom du volontaire pour établir le document au nom de Zichroni, la nouvelle identité d’Eichmann. Puis il prépara un passeport au même nom.
Tabor passa la plus grande partie de la journée à l’aéroport dclx . Après avoir inspecté le Britannia
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