La traque d'Eichmann
surveiller l’avion de près, leur dit-il, pour éviter un sabotage de la part de quelque « agence hostile ».
Shalom et Aharoni observaient ces diverses scènes sans révéler leur présence aux membres de l’équipage ni aux passagers fraîchement débarqués dcliii . Ils n’étaient venus que pour examiner une fois de plus le trajet jusqu’à l’aéroport et pour vérifier que l’appareil était correctement positionné pour le lendemain. Cela fait, ils repartirent pour Maoz, où devait avoir lieu une ultime mise au point de l’opération.
Dans un café situé non loin de l’Hôtel Internacional, peu après l’atterrissage de l’avion, Harel s’assit à une table en compagnie de Tohar et de Shimoni dcliv . Les deux hommes semblaient épuisés. Le capitaine ne dit pas un mot de l’accident évité de justesse à Recife, préférant rappeler que son équipage et lui-même se tenaient à la disposition de Harel ; ils feraient tout ce qu’on leur demanderait, à une exception près : une nouvelle escale au Brésil. Ces gens-là, dit-il, n’étaient pas dignes de confiance. Harel n’y voyait aucun inconvénient, puisqu’il comptait justement sur un vol direct pour Dakar ; ainsi, le Britannia ne risquait pas d’être arrêté lors d’une escale en Amérique latine.
Une fois ces détails réglés, Harel exposa son plan : il s’agissait d’embarquer Eichmann en le faisant passer pour un employé d’El Al. Il faudrait donc que le reste de l’équipage franchisse les portiques de contrôle avec le prisonnier. Pour Tohar et Shimoni, cette idée l’emportait largement sur la méthode de la valise diplomatique ou du chariot de ravitaillement. Shimoni mentionna la civière commandée par Luba Volk, ajoutant que cette demande risquait d’éveiller les soupçons ; le chef du Mossad, nullement inquiet, le pria seulement de faire en sorte qu’aucun passager indésirable n’embarque sur ce vol. Au terme de leur discussion, les trois hommes n’eurent qu’un seul point de désaccord : l’heure de départ. Harel voulait partir dès que possible le lendemain, mais Tohar estimait que l’équipage, avant un très long trajet jusqu’à Dakar, puis Tel Aviv, avait besoin de se reposer un peu. Et puis, le Britannia aussi devait être ménagé ; le confier à un équipage fatigué, c’était prendre un risque inutile. Harel se rendit à ces arguments, et il fut décidé que l’avion décollerait un peu avant minuit.
Tohar se rendit ensuite à l’Hôtel Internacional où il devait retrouver son équipage avant le départ pour la ville. Il convoqua dans sa suite les deux autres pilotes, Wedeles et Azriel Ronen ; les navigateurs, Shaul et Hassin ; et les ingénieurs de vol, Shimon Blanc – un rescapé du camp de Dachau – et Oved Kabiri dclv . Cette équipe était chargée de ramener le Britannia en Israël sans encombre, et Tohar estimait qu’ils méritaient de connaître le but véritable de leur mission. À l’exception de Wedeles, tous furent stupéfaits de la révélation de leur capitaine – même si certains ne savaient pas qui était Eichmann. Tohar leur apprit ensuite qu’il n’y aurait pas d’escale entre Buenos Aires et Dakar ; il fallait donc que les navigateurs établissent le parcours en conséquence, et que les ingénieurs de vol s’assurent que le Britannia était en mesure d’effectuer un tel trajet. Il fallait aussi envisager un décollage d’urgence en cas de problème.
Les membres de l’équipage sortirent de la chambre de Tohar quelque peu refroidis par ces nouvelles consignes.
À l’autre bout de la ville, Harel retrouva une partie de son équipe à Maoz tandis que Malkin, Tabor et Medad restaient à Tira pour surveiller Eichmann. Cette fois-ci, Harel ne fit pas de grand discours sur la portée historique de leur mission ; il se contenta de leur livrer sobrement les détails de l’opération à venir : horaires, documents, déguisements, trajets, voitures, plans de secours, traque de Mengele, nettoyage des lieux, évacuation des agents qui n’embarquaient pas sur le vol El Al.
Dans l’obscurité de la dernière nuit passée à Tira, Rafi Eitan eut l’impression d’entendre un bruit à l’extérieur dclvi . Il courut aussitôt alerter les autres membres de l’équipe. Dans la cellule d’Eichmann, Tabor se préparait à faire entrer le prisonnier dans l’espace aménagé au-dessus de la pièce. Les autres, postés devant les fenêtres de la
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