La Vallée des chevaux
vient uniquement de la Grande Mère.
« Et toi, Thonolan, continua-t-il, au moment où tu
t’engages à assurer la subsistance d’un autre être, n’oublie pas que tu deviens
semblable à Celle qui assure la subsistance de tous. En voyant que tu
L’honores, Elle peut te doter, toi aussi, du pouvoir de créer : l’enfant
mis au monde par la femme dont tu prends soin sera alors l’enfant de ton
esprit.
Quittant des yeux le jeune couple, le shamud s’adressa au groupe
assemblé en face de lui.
— Chacun de nous, conclut-il, quand il prend soin des
autres et assure leur subsistance, honore la Mère et tous, en retour, nous
profitons de Ses innombrables bienfaits.
Jetamio et Thonolan se sourirent et, quand le shamud recula, ils
s’assirent sur des nattes tissées. La fête pouvait commencer. On apporta au
jeune couple une boisson fermentée à base de miel et de fleurs de pissenlit,
qui avait été préparée lors de la dernière pleine lune. Quand Jetamio et
Thonolan en eurent bu chacun une coupe, la boisson passa à la ronde.
Markeno et Tholie, qui représentaient la famille jumelée ramudoï
du jeune couple, s’approchèrent alors pour leur présenter le premier plat du
repas. Il s’agissait d’un filet de corégone [6] ,
cuit près du feu et servi avec une sauce à l’oseille sauvage.
Ce goût, tout nouveau pour Jondalar, lui plut immédiatement et
il trouva que cette sauce à l’oseille convenait parfaitement au poisson. Quand
on passa à la ronde, pour accompagner le poisson, des paniers remplis de petits
oléagineux, il se pencha vers Tholie pour lui demander ce que c’était.
— Des faînes, répondit-elle. Ramassées à l’automne dernier.
Tholie poursuivit en lui expliquant que le fruit du hêtre
contenait une amande comestible. On commençait par débarrasser cette amande de
l’enveloppe dure comme du cuir qui l’entourait à l’aide d’une petite lame en
silex. Puis on faisait griller les amandes en les plaçant avec des braises
chaudes dans des paniers à fond plat que l’on ne cessait de remuer pour que les
amandes ne soient pas roussies. Pour finir, les amandes grillées étaient
roulées dans du sel marin.
— Tholie a apporté le sel, intervint Jetamio. C’est un de
ses cadeaux de noce.
— Tous les Mamutoï vivent près de la mer ? demanda
Jondalar.
— Non, répondit Tholie. Notre camp est le plus proche de la
mer. La plupart des Mamutoï vivent plus au nord. Les Mamutoï sont des chasseurs
de mammouths, ajouta-t-elle non sans une pointe de fierté. Tous les ans, nous
quittons notre camp pour aller chasser.
— Comment tu as fait pour avoir une compagne mamutoï,
Markeno ? interrogea Jondalar.
— Je l’ai enlevée, répondit celui-ci, avec un clin d’œil à
la jeune femme bien en chair.
— C’est vrai, confirma Tholie en souriant. Bien entendu,
cet enlèvement était arrangé d’avance.
— Nous nous sommes rencontrés lors de ma première
expédition vers l’est. Pour faire du troc, j’ai descendu la Grande Rivière Mère
jusqu’au delta. C’est là que j’ai rencontré Tholie. Je me moquais de savoir si
elle était sharamudoï ou mamutoï et j’ai décidé que je ne rentrerai pas sans
elle.
Markeno et Tholie racontèrent à Jondalar toutes les difficultés
soulevées par leur Union. Il avait fallu de longues négociations avant
d’arriver à un arrangement et comme certaines coutumes restaient
incontournables, Markeno avait été obligé d’enlever Tholie. Avec son accord,
bien entendu. Pareille situation s’était déjà produite. Les cas étaient rares
mais il existait des précédents.
Les peuplements humains étaient très clairsemés et si espacés
que l’on empiétait rarement sur le territoire du voisin. Comme les contacts
étaient peu fréquents, l’arrivée d’un étranger constituait un événement. Même
si les gens se montraient un peu méfiants au début, l’étranger était
généralement bien accueilli. La plupart des peuples de chasseurs avaient
l’habitude de voyager loin et régulièrement puisqu’ils suivaient les migrations
des troupeaux d’herbivores, et chez eux il y avait souvent une forte tradition
de Voyages individuels.
Quand il y avait des désaccords, ils se produisaient plutôt au
sein même de la communauté. Mais ce genre de frictions étaient, elles aussi,
assez rares. Les tempéraments violents étaient refrénés par un code de bonne
conduite et par des coutumes ritualisées. Les Sharamudoï
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