La Vallée des chevaux
trouvait toujours une boisson chaude. Comment savait-elle qu’il
n’allait pas tarder à ouvrir les yeux ? Depuis le début, l’infusion du
matin était toujours à la bonne température quand il y trempait ses lèvres.
Combien d’autres attentions, tout aussi délicates et discrètes, avait-elle eu
pour lui depuis qu’elle l’avait recueilli ? Et il s’agissait toujours
d’actes totalement désintéressés. Elle me rappelle Marthona, songea Jondalar.
Elle aussi vous faisait des cadeaux ou vous consacrait du temps avec une telle
bienveillance qu’on ne se sentait jamais son obligé.
— Je ne lui ai rien donné, rien apporté, dit-il à voix
haute. Et quand je pense à ce qui s’est passé hier...
Il leva la main et, d’une pichenette, lança la brindille de
l’autre côté de la corniche. Il aperçut alors Whinney et son poulain qui
décrivaient avec entrain un large cercle au milieu de la prairie.
— Rapide, très rapide ! s’écria-t-il. Je suis certain
que sur une courte distance il dépasserait sans mal sa mère.
— Sur une courte distance, la plupart des jeunes étalons
sont en effet capables d’aller plus vite qu’une jument, mais pas sur une longue
distance, dit Ayla qui arrivait en haut du sentier.
Jondalar se retourna pour la regarder. Ses yeux brillaient
d’excitation et il souriait, tout fier du poulain. Son enthousiasme était
communicatif et Ayla sourit à son tour, oubliant un instant ses craintes. Elle
avait toujours espéré que Jondalar s’attacherait au poulain – malheureusement,
maintenant cela n’avait plus d’importance.
— Je me demandais où tu étais, dit-il.
Il était tellement gêné de se retrouver en face d’elle que son
sourire s’évanouit.
— J’ai démarré un feu dans la fosse à rôtir pour les
lagopèdes et je suis descendue voir si on pouvait les mettre à cuire.
Il n’a pas l’air très heureux de me voir, se dit-elle en se
dirigeant vers l’entrée de la caverne. Elle non plus, elle ne souriait plus.
— Ayla ! appela Jondalar en se précipitant à sa suite.
Quand elle se retourna, il ne sut plus quoi dire.
— Je... euh... j’aimerais fabriquer quelques outils. Si tu
n’y vois pas d’inconvénient, bien entendu. Je ne veux pas te priver de tes
réserves de silex.
— Tu peux prendre ce que tu veux. Chaque année, les crues
printanières emportent une partie de ceux qui se trouvent sur la plage et en
déversent d’autres.
— Il se peut que la rivière les arrache à un dépôt de craie
situé en amont. Si j’étais sûr que ce ne soit pas trop loin, j’irais bien les chercher
à la source. Les silex qu’on vient juste d’extraire sont de bien meilleure
qualité. Dalanar extrait les siens directement du gisement situé à côté de sa
Caverne et les silex lanzadonii ont la réputation de surpasser tous les autres.
Le regard de Jondalar s’était à nouveau animé, comme chaque fois
qu’il parlait de son métier.
Il me fait penser à Droog, se dit Ayla. Il adore la taille du
silex et tout ce qui s’y rattache. Elle sourit intérieurement en repensant à la
fierté de Droog le jour où il avait découvert que le fils d’Aga, sa compagne,
était en train de frapper deux pierres l’une contre l’autre. Il avait même
offert à l’enfant un percuteur. Il aimait enseigner son savoir-faire,
songea-t-elle. Bien que je sois une fille, cela ne l’a pas empêché de me
montrer.
Voyant qu’elle était perdue dans ses pensées et qu’elle
recommençait à sourire, Jondalar lui demanda :
— A quoi penses-tu, Ayla ?
— Je pensais à Droog, un tailleur de silex. Il me
permettait de le regarder quand il travaillait à condition que je reste
tranquille et que je ne l’empêche pas de se concentrer.
— Tu pourras regarder comment je travaille, proposa
Jondalar. Mais j’aimerais bien aussi que tu me montres quelle technique tu
utilises.
— Je ne suis pas une spécialiste. Je suis capable de fabriquer
les outils dont j’ai besoin. Mais ceux de Droog étaient bien supérieurs aux
miens.
— Tes outils m’ont l’air tout à fait pratiques et je serais
curieux de voir comment tu t’y prends.
Ayla hocha la tête et s’enfonça dans la caverne. Elle tardait et
Jondalar se portait à l’entrée de la caverne pour la héler quand elle
ressortit. Il fit un tel bond en arrière pour l’éviter qu’il faillit tomber. Il
ne voulait pas la toucher, même par inadvertance, de crainte de l’offenser
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