La Vallée des chevaux
première cible tombait en lambeaux sous les coups répétés, ils en
avaient installé une seconde sur laquelle Jondalar avait dessiné un cerf. Les
armes qu’ils avaient employées jusque-là influaient sur leur manière d’utiliser
le propulseur. Jondalar lançait plus haut car il était habitué à jeter son arme
avec force au-dessus de sa tête. Ayla avait l’habitude de tenir sa fronde sur
le côté si bien que la trajectoire de la sagaie était plus horizontale. Ils
profitaient de cet entraînement pour rectifier légèrement le propulseur afin
qu’il s’adapte parfaitement à leur style.
Une amicale compétition se développait entre eux. Ayla était
incapable d’égaler la force du lancer de Jondalar, donc sa portée de tir. Mais
Jondalar ne pouvait égaler la précision mortelle du tir d’Ayla. Ils étaient
aussi étonnés l’un que l’autre par la supériorité extraordinaire de cette
nouvelle arme de chasse. Grâce au propulseur, Jondalar était capable d’envoyer
sa sagaie deux fois plus loin qu’avant, et même un peu plus, avec une force
plus grande et une précision parfaite.
Ces séances d’entraînement permettaient aussi à Ayla de
découvrir quelque chose qu’elle n’avait encore jamais connu. Elle s’était
toujours entraînée et avait toujours chassé seule. Elle avait commencé par
jouer avec une fronde en cachette, craignant toujours qu’on la surprenne l’arme
à la main. Puis elle avait chassé pour de bon, mais toujours en secret. Ce
n’est que de mauvaise grâce qu’on lui avait finalement donné la permission de
chasser. Personne n’avait jamais chassé avec elle.
Personne ne l’avait jamais encouragée à continuer quand elle
ratait une proie, ni partagé son triomphe lorsqu’elle avait bien visé. Personne
n’avait jamais discuté avec elle de la meilleure manière d’utiliser une arme ou
écouté avec intérêt ses suggestions. Et surtout personne n’avait jamais plaisanté
ou ri avec elle. Ayla ignorait ce qu’était la camaraderie ou l’amitié.
L’ambiance avait beau être amicale, chacun d’eux gardait
prudemment ses distances. Quand ils abordaient des sujets sans danger comme la
chasse ou les armes, ils discutaient avec animation. Mais dès qu’un élément
personnel se glissait dans la conversation, ils se taisaient, mal à l’aise, ou
s’en tiraient par des faux-fuyants polis. Chaque fois qu’ils se touchaient par
inadvertance, ils sursautaient et s’éloignaient avec raideur l’un de l’autre,
non sans arrière-pensées.
— Demain ! annonça Jondalar en retirant sa sagaie,
arrachant du même coup un peu de foin au large trou que portait la peau qui
leur servait de cible.
— Que se passera-t-il demain ?
— Nous partons à la chasse. Nous nous sommes assez amusés
comme ça. Il est temps de passer aux choses sérieuses.
— D’accord.
Après avoir ramassé les quelques sagaies éparpillées sur le sol,
ils reprirent le chemin du retour.
— C’est toi qui connais la région, Ayla. Où
irons-nous ?
— Je connais surtout les steppes qui se trouvent à l’est.
Mais j’aimerais bien partir d’abord en reconnaissance avec Whinney. (Elle jeta
un coup d’œil à la position du soleil avant de remarquer :) Il n’est pas
tard.
— C’est une bonne idée, répondit Jondalar. Toi et la jument
vous valez bien toute une équipe d’éclaireurs à pied.
— Est-ce que ça t’ennuierait de garder Rapide ? Je
serais plus tranquille s’il ne venait pas avec nous.
— Qu’allons-nous faire de lui demain ?
— Nous serons obligés de l’emmener car nous avons besoin de
Whinney pour rapporter la viande. Elle a l’habitude de chasser avec moi. Si je
lui dis de rester à un endroit, elle m’obéira. Mais si son poulain prend peur
et qu’il se met à courir, il risque d’être blessé par le troupeau en fuite. Je
ne sais pas comment nous allons faire...
— Ne t’inquiète pas. Je vais essayer de trouver une
solution.
Ayla siffla Whinney et son poulain. Elle monta sur la jument et
partit au galop tandis que Jondalar retenait le poulain par l’encolure en le
caressant et en le grattant aux endroits qui le démangeaient. Il n’eut aucun
mal à le faire tenir tranquille et, dès qu’Ayla et la jument se furent
éloignées, il ramassa les sagaies et les propulseurs et reprit le chemin de la
caverne.
Il déposa les sagaies à l’entrée de la caverne. Incapable de
rester en place, il s’approcha du feu, remua
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