La vie quotidienne en chine: A la veille de l'invasion mongole (1250-1276) (Picquier poche) (French Edition)
offrandes et l’octroi d’un statut officiel à leurs monastères, de la
célébration de services religieux en faveur de
l’empereur, de ses ancêtres, de ses proches et de
la dynastie. « Dans ce vaste empire, dira en 1326
André de Pérouse, évêque de Zaytun (Quanzhou),où il y a des gens de toutes les nations qui sont
sous le ciel et de toutes les sectes, tout un chacun est autorisé à vivre selon sa secte, car ils
sont imbus de l’opinion, ou plutôt de l’erreur,
que chacun peut faire son salut selon sa propre
secte 46 . » Cette indifférence générale aux doctrines est plus grande encore dans les cultes et
les croyances populaires, car on y trouve souvent mêlés, de façon indissoluble, une multitude
d’éléments hétérogènes.
3. Les cultes familiaux
Le culte des ancêtres a pour objet d’associer
intimement les parents défunts et surtout les plus
importants d’entre eux (chefs de lignée et de
clan) à tous les événements de la vie familiale :
fêtes du Nouvel An, naissances, mariages, etc.
A ce culte s’attache l’idée d’un destin et d’une
individualité familiales. Il est commun à toutes
les classes de la société, mais tend à prendre plus
d’importance dans les grandes familles aux
ascendants illustres, et l’on a vu que le culte des
ancêtres impériaux, en raison de ses significations politiques, occupait une des premières
places dans la religion officielle. L’empereur a
son temple des ancêtres, les grandes familles
disposent de sanctuaires plus modestes, et les
gens du peuple se contentent d’installer un petit
autel dans la salle principale de leur logement.
Sur les autels des ancêtres sont dressés lestablettes qui portent les noms des parents
défunts et où leurs esprits sont censés résider.
On a pris soin en effet de capter et de fixer ces
esprits au moment de la mort quand, pour donner vie à la tablette, on y a marqué la place des
oreilles et des yeux avec de petites taches de
sang sacrificiel. Mais les défunts sont également
présents dans leurs tombes et, à chaque fête des
morts, le 5 avril, le 15 de la 7 e lune, le 1 er de la
10 e lune, les parents pieux dont les morts n’ont
pas été incinérés vont balayer et arroser les tombeaux de leurs proches.
Les ancêtres ne sont pourtant pas les seules
divinités familiales. Les dieux des portes, du
foyer, du lit, de la cour, du puits, de la terre
reçoivent chacun de menues offrandes au moment
du Nouvel An. On renouvelle alors les images
représentant les dieux de la porte, et le dieu du
foyer, qui part pour le ciel faire son rapport
annuel sur la conduite de chacun des membres de
la famille, est traité avec plus d’égards que de
coutume. Chacune de ces divinités familiales a
des fonctions définies (ainsi, le dieu du lit est responsable de la fécondité du couple), et l’on
s’adresse à elles dans le courant de l’année si
besoin est. Ce ne sont pas des divinités toutes-puissantes (au reste, les Chinois n’en connaissent
point), mais au contraire assez complaisantes et
peu vindicatives : on traite d’égal à égal avec
elles. D’autres encore, chinoises ou bouddhiques,peuvent être invoquées au-dehors, car il y a tant
de menus désordres ou de fâcheux événements
qui viennent troubler la tranquillité ou le bonheur familial : les femmes peuvent être stériles
ou, contrairement aux vœux de la famille, ne
donner naissance qu’à des filles, les accouchements sont parfois difficiles, les filles de la maison sont maladroites et ne savent ni coudre ni
broder, les enfants sont chétifs, la maladie, la
pauvreté, la mort peuvent s’installer à demeure.
Les dieux auxquels la famille adresse ses
offrandes et ses prières n’ont pas d’autre rôle
que de la prémunir contre ces divers malheurs.
4. Cultes et croyances populaires
Les dieux familiaux dont dépend le bonheur
de chaque maison ne sont pas d’un type radicalement différent de celui des divinités protectrices des communautés urbaines ou rurales. Là
encore, le culte a pour caractère essentiel d’être
local et d’être célébré au profit d’une collectivité. Les divinités populaires sont innombrables ;
anciens sages, grands poètes, héros guerriers,
dieux dont les noms sont empruntés au panthéon
taoïste, moines illustres, grands saints et grandes
divinités du bouddhisme, dieux du sol et dieux
des remparts sont adorés dans une multitude de
sanctuaires et de temples. A la limite, leurs
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