La vie quotidienne en chine: A la veille de l'invasion mongole (1250-1276) (Picquier poche) (French Edition)
Des catalogues, des encyclopédies, des traités paraissent
qui ont trait aux domaines les plus divers : monographies sur les pierres étranges, les jades, les
monnaies, les encres, les bambous, les pruniers,
les litchis, les oranges 17 , les champignons, les
différentes espèces de fleurs, les poissons et les
crabes, traités sur les peintures et les calligraphies, ouvrages géographiques dont certains intéressent les pays étrangers, ouvrages historiques.
Les premières histoires générales et non officielles de la Chine font leur apparition. Pour
occuper leurs loisirs, certains lettrés rédigent de
petits recueils de physique élémentaire ou, plutôt, de recettes curieuses. On y trouve des notations de ce genre : « Si, en été, on plonge de
l’eau chaude dans un puits, il se forme de la
glace. » « Le mille-pattes a horreur de l’huile. »
« La menthe enlève l’odeur du poisson. » « Si
on fait cuire des poissons avec des fruits verts
de cratévier, les arêtes deviennent molles. On
peut aussi se servir de graines de balsamine. »
« Quand on a les mains grasses, on peut se laver
avec du sel à défaut de savon. » « Pour faire partir l’excès de cal sous les talons, les frotter avecun morceau de tuile qui porte encore les traces
de la toile sur laquelle elle a été moulée. »
« Quand on a mangé de l’ail, si on mâche
ensemble du gingembre cru et des jujubes,
l’haleine redevient fraîche. » « Ne pas mettre
de la brasénie dans des récipients en laque :
les meilleures laques n’y résisteraient pas 18 . »
L’époque est aux collections, aux inventaires, à
l’érudition, aux répertoires de faits étranges.
L’effort de réflexion philosophique se développe en différentes directions. C’est tout
d’abord un intérêt nouveau pour la cosmologie,
dédaignée par les lettrés de l’Antiquité et par le
fondateur lui-même de l’humanisme chinois.
Pour Confucius (551-479 avant notre ère),
l’homme devait rester en effet l’unique objet des
réflexions du sage. Les théories cosmologiques
de l’époque des Song s’expriment et se résument
dans des diagrammes de caractère ésotérique qui
expliquent l’origine du monde et son développement. Elles restent intimement liées à la morale
parce que l’homme est en rapport harmonique
avec le monde. Elles visent à substituer aux
théories bouddhiques une interprétation purement chinoise de l’univers.
C’est au XII e siècle que vit le philosophe qui
devait avoir sur la pensée chinoise des époques
ultérieures la plus profonde influence : « Zhu Xi
(1130-1200), emprunte largement à ses prédécesseurs du XI e siècle et fait la synthèse descourants philosophiques de son époque. Intellectualiste, il met l’accent sur l’étude livresque, et il
accorde dans sa cosmologie une sorte de priorité
au principe d’organisation ( li ) sur l’énergie ( qi ) , bien que ces deux aspects fondamentaux de
l’ordre universel demeurent indissociables. Le
monde reste conçu comme un tout fait d’alternances et de principes opposés dont la collaboration est nécessaire à l’équilibre de l’univers : la
pensée chinoise est rebelle à tout véritable dualisme. Ce qui, dans le domaine de la morale,
caractérise les conceptions de Zhu Xi, c’est l’insistance qui est mise sur l’éducation et sur l’effort. D’autres philosophes au contraire fondent
leur système sur une intuition fondamentale qui
est du même genre que celle des mystiques de la
secte bouddhique chinoise du dhyâna (zen japonais) ou des taoïstes de l’Antiquité. Pour eux, le
monde et notre esprit ne font qu’un. Mais la plupart des hommes n’ont point conscience de cette
identité du fait de leur aveuglement, aveuglement qui n’est pas d’ordre purement intellectuel :
il provient des pensées égoïstes et de l’esprit de
calcul. C’est donc seulement à l’homme parfaitement « désintéressé » qu’il est donné d’appréhender intuitivement l’unité profonde qui existe
entre les êtres et le monde 19 .
En même temps que la vision du monde
s’élargit, la littérature s’enrichit de nouveauxgenres et manifeste de nouvelles tendances. En
effet, ce ne sont plus seulement les lettrés des
hautes classes, mais des « bourgeois » et des
gens du peuple qui sont à l’origine de la création littéraire. En partie orale et, même lorsqu’elle est écrite, destinée à un auditoire, la
littérature de
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