La vie quotidienne en chine: A la veille de l'invasion mongole (1250-1276) (Picquier poche) (French Edition)
échafaudage de quinze
mètres de haut dénommé « montagne de la tortue porte-montagne ». Cet échafaudage couvert
de lampes multicolores porte, en son centre,
d’autres lampes faites de petites plaquettes de
jade et disposées de façon à former les quatre
caractères « Dix mille années (à notre) auguste
empereur ». Au-dessus se trouvent des musiciens officiels, au-dessous une estrade où ont lieu
des jeux et des représentations de tout genre. Les
femmes du palais et plus de cent petits eunuques
qui portent des turbans dansent en tournant à la
façon des marionnettes. Quand les représentations sont finies, on fait entrer des troupes de
danseurs venus de la ville et des marchands
ambulants choisis avec soin par le préfet parmi
ceux qui ont les plus beaux cris. Tous ces gens,
jusqu’alors massés derrière une des grandes
portes de l’enceinte, se ruent à l’intérieur. Les
femmes du palais se disputent pour acheter ce
que leur offrent ces colporteurs, à des prix bien
plus élevés que de coutume. Certains marchands,
dit-on, font ainsi fortune en un seul soir 18 .
A Kaifeng, dans la capitale des Song du Nord,
au début du XII e siècle, la fête des lampes étaitcélébrée à la cour de façon quelque peu différente. Une grande estrade en bois était construite
en face du pavillon de la Proclamation des
Vertus. On y installait des peintures représentant
des Immortels et des statues en cinq couleurs de
deux divinités bouddhiques très populaires
– Manjusrî sur son lion et Samantabhadra sur
son éléphant – et, grâce à un dispositif savant,
de l’eau jaillissait en cascade de chacun de leurs
dix doigts. On confectionnait aussi des dragons
dont le corps était en osier et la peau faite
d’étoffes vertes transparentes. Une multitude de
lampes étaient dissimulées à l’intérieur et quand
on assistait de loin aux contorsions de ces bêtes
fantastiques portées par des danseurs invisibles,
on aurait cru de vrais dragons en train de voler
dans les airs. L’empereur montait au pavillon
pour admirer les lampes et il y avait près de lui
une hampe surmontée de l’inscription : « L’empereur partage ses plaisirs avec le peuple »
(phrase tirée d’un classique confucéen), cependant que tous les spectateurs criaient : « Dix
mille années ! Dix mille années 19 ! »
Le premier jour de la deuxième lune, il est
d’usage de s’offrir de petits sacs verts remplis de
grains de céréales, de graines de melon et
d’autres fruits. C’est une façon de souhaiter à
ses amis une nombreuse descendance. Au palais,
les femmes du gynécée se livrent bataille avecdes herbes. Les fonctionnaires présentent à l’empereur des ouvrages d’agriculture 20 .
Le 8 de la 2 e lune est le jour anniversaire de la
naissance d’une divinité patronne de nombreuses corporations. Cordonniers, bijoutiers,
fabricants de chapeaux exposent leurs chefs-d’œuvre 21 . Chaque corporation organise des processions avec étendards et tambours, et engage
des troupes de musiciens et de danseurs. Une
foule de promeneurs se presse sur les bords du
lac et sur la digue qui traverse le lac du nord au
sud dans sa partie occidentale. C’est en effet le
jour de la joute des bateaux-dragons. Il y en a
six, très richement décorés, ornés de fleurs et de
drapeaux aux couleurs vives. Des musiciens, à
leur bord, frappent sur des tambours et des gongs,
jouent de la flûte. Les bateaux s’affrontent deux
par deux tandis que des hommes, pique en main,
tentent de faire tomber à l’eau leurs adversaires.
Jusqu’au soir, les collines et les bords du lac
sont envahis par les promeneurs. Les pauvres
empruntent pour avoir de quoi s’amuser et boire
ce jour-là et viennent avec femme et enfants.
Personne ne rentre chez lui qu’il ne soit ivre.
« C’est là, depuis toujours, dit un auteur, la coutume du pays 22 . »
Le 15 est célébrée une fête des fleurs particulière à Hangzhou. La population se rend dans
les jardins situés en dehors des remparts de
l’ouest ainsi que dans les faubourgs du sud poury admirer les fleurs et les arbres rares. Tels
pêchers d’un jardin du sud, déjà en pleine floraison, passent pour être les plus beaux. Le préfet
et les sous-préfets avec tout leur personnel
conduisent dans la banlieue les vieillards de la
ville pour leur offrir un banquet arrosé d’alcool.
Ils font des discours pour l’encouragement de
l’agriculture et du tissage, vantent les vertus
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