La vie quotidienne en chine: A la veille de l'invasion mongole (1250-1276) (Picquier poche) (French Edition)
la lune et
guetter au ciel les étoiles de la Tisserande et du
Bouvier, deux étoiles séparées par la Voie lactée
mais qui passent pour se rejoindre, une fois l’an,
ce soir-là. L’usage veut aussi, parfois, que les
dames, afin de devenir d’habiles brodeuses,
placent des araignées dans de petites boîtes en
or ou en argent. Au matin, elles regardent ce que
ces petites bêtes ont tissé 32 .
Le 15 de la 7 e lune, de grandes cérémonies
bouddhiques sont célébrées dans les monastères
en faveur des morts, pour le rachat de leurs mauvaises actions, avec une profusion d’encens et de
fleurs. Les laïcs se rendent sur les tombes de leurs
proches, les balaient et y déposent des offrandes.
Sur les marchés, très actifs à ce moment, on vend
des produits de la saison : melons, pêches, poires,
jujubes et volailles de tout genre 33 .
La fête de la mi-automne, le 15 de la 8 e lune,
est une fête de la lune et des femmes. Dans la
lune, dévorée chaque mois par un crapaud noir,
se trouve un lapin qui pile un élixir de longue
vie au pied d’un acacia dont les feuilles et
l’écorce servent à préparer cette drogue. Une
autre légende veut que ce soit, non pas un lapin,
mais un crapaud à trois pattes qui habite la lune ;
selon une autre encore, un palais est construit
sur cet astre où logent la reine de la lune et ses
suivantes, toutes d’une beauté extraordinaire. Le
soir du 15 du 8 e mois (pleine lune de septembre),
la lune est plus brillante que jamais. On fabrique
des « gâteaux de la lune » et l’on mange des
fruits à pépins, gages de nombreux enfants. Les
riches montent à l’étage de leurs pavillons et de
leurs kiosques pour y admirer le clair de lune et
y boire de l’alcool en écoutant des solos de
cithare. Les gens du peuple les plus misérables
mettent en gage leurs vêtements pour s’acheter
de l’alcool. Cette nuit-là, la ville est pleine de
promeneurs, et les boutiques de la Voie impériale restent ouvertes plus tard que de coutume 34 .
Un des spectacles favoris des habitants de
Hangzhou est le mascaret produit par les marées
à l’entrée de l’estuaire du Zhejiang. A la 8 e lune,
dans le courant du mois de septembre et surtout
aux environs de la pleine lune, ce phénomène
atteint, à la hauteur de Hangzhou, une violence
peu commune. Le vacarme et la hauteur desvagues attirent une foule de badauds. Quelques
jours avant la pleine lune, un combat naval a
lieu sur le fleuve, et les curieux commencent à
affluer dès le 11. Les 16, 17 et 18, presque toute
la population de la ville se presse sur les berges,
en dehors des remparts de l’est. Il y a foule de
chevaux et de charrettes. Toutes les habitations
surélevées sur une distance de huit kilomètres
sont louées par les membres de la famille impériale et par les hauts fonctionnaires du palais. On
voit alors, paraît-il, de pauvres hères qui s’efforcent de nager dans les eaux du fleuve, au milieu
des formidables remous, tenant en main des
étendards de toutes les couleurs. Ces actes de
bravade sont très sévèrement jugés par les pouvoirs publics. « Ces gens-là, écrit vers 1066 un
gouverneur de la ville, jettent dans les gouffres
insondables où vivent poissons et dragons un
corps que leur ont légué leurs père et mère (et
qui ne leur appartient pas), et ils font entre eux
assaut de bravoure. Beaucoup se noient, et leurs
âmes sont destinées à rester éternellement
immergées. Défense est faite aux soldats et aux
gens du peuple, sous peine de graves sanctions,
de s’aventurer dans les eaux du Zhejiang au
moment du mascaret. » Cependant toutes les
interdictions restèrent sans effet 35 . Le 29 septembre 1132, il y avait foule aux remparts de
l’est. Sur les berges, hautes de six mètres, on
avait construit, pour plus de sécurité, un parapeten bois où de nombreux spectateurs s’étaient
juchés pour mieux voir. Mais, au moment du
mascaret, la masse abrupte des eaux, gonflée
soudain par un coup de vent inopiné, emporta
toute cette protection comme un fétu. Plusieurs
centaines de curieux périrent noyés.
Le 9 de la 9 e lune, c’est à Hangzhou la fête
des chrysanthèmes. On en cultive dans la région
près de quatre-vingts espèces différentes. Tout
le monde en achète ce jour-là et les salles des
cabarets sont transformées en grottes de chrysanthèmes. Les habitants vont pique-niquer sur
les collines. Ils y emportent des grenades, des
châtaignes, des abricots, des
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