La ville qui n'aimait pas son roi
avoir de plus extrême malheur que de le perdre…
Olivier ne savait que dire. Que voulait exactement Navarre de lui? Qu’il découvre l’assassin? C’était impossible!
— Il est mort à trente-six ans et je veux connaître celui qui l’a fait tuer. Vous allez le trouver pour moi, dit pourtant le roi d’une voix dure.
— Mais… comment, monseigneur?
— Vous m’accompagnerez demain à Saint-Jean-d’Angély. Nous pourrons parler en chemin…
Olivier crut que l’entretien était terminé, mais ce n’était pas le cas. Navarre le lui fit comprendre en le priant, d’un geste
de la main, de rester assis.
— Croyez que ce n’est pas par vengeance, ou même par besoin de justice, que je veux connaître l’assassin de M. le prince, c’est aussi pour ma propre sécurité, fit-il en serrant les poings.
» Quand vous étiez dans votre fief, le prévôt du château a découvert un tueur ici même. Personne ne le sait, l’histoire a été étouffée. C’était un homme qui se disait béarnais mais il parlait bien mal notre langue et un serviteur s’en est étonné. Il était aux cuisines quand le prévôt l’a pris. Il n’a même pas été besoin de le questionner, il a tout confessé. Il avait sur lui un couteau à manche noir avec une lame empoisonnée longue comme la main.
— De qui prenait-il ses ordres?
Navarre leva une main pour montrer son incertitude.
— Il a dit l’ignorer. L’ayant interrogé moi-même, je le crois volontiers, car il semblait bien confus. Il arrivait de Paris. C’était une sorte de truand empreint d’une religiosité sectaire. Il était gascon par son père, ce qui explique qu’il ait pu faire illusion un moment et parvenir à se faire engager aux cuisines. À Paris, il aurait été approché par un curé dont il ne connaissait pas le nom, c’était il y a quatre ou cinq mois. Ce prédicateur fanatique lui aurait promis mille écus s’il me faisait disparaître.
— Comment se serait-il fait payer s’il y était arrivé?
— Il avait été payé d’avance. L’argent avait été remis à son cousin, car mon assassin savait qu’il ne reviendrait pas. Sa récompense devait aller à sa tante qui l’avait élevé. Le pauvre fou était prêt à souffrir les pires supplices tant il était persuadé que j’étais l’Antéchrist et que Dieu voulait que je disparaisse, ironisa tristement Navarre.
— Je pourrais l’interroger?
— Hélas, non. Tout cela s’est passé à la fin de l’année dernière. Je vous l’ai dit, personne ne l’a su sinon le prévôt et deux des consuls de Nérac. Je l’ai fait conduire à Pau afin qu’il soit jugé à huis clos. Il a été pendu discrètement. Je n’ai pas demandé d’autre châtiment, car je n’ai aucune envie que d’autres fanatiques se manifestent.
— Peut-être n’avait-il pas tout dit, hasarda Olivier.
— Peut-être, mais pour vous dire la vérité, monsieur de Fleur-de-Lis, ce n’était pas la première fois. Je ne dirais pas que j’en ai l’habitude, mais il est presque plus facile d’échapper à ces assassins que d’éviter les coups d’épée dans une bataille.
— Il serait venu d’autres assassins ici, monseigneur? s’inquiéta Olivier.
— Il y a quelques mois, mon prévôt a arrêté un Lorrain venu me présenter une requête. Au dernier moment, son cœur a faibli alors qu’il allait me poignarder lui aussi. Il a été pendu de la même façon, et il a même avoué que d’autres hommes avaient été dépêchés pour me tuer!
— Un Lorrain… Ce serait les Guise qui enverraient ces tueurs.
— Pour celui-là, peut-être. Pour le dernier, je ne sais plus, car la mort de mon cousin, son assassinat plutôt, a profondément modifié mon jugement.
Que voulait lui dire Navarre, s’interrogea Olivier. Qu’il y avait un lien entre les deux affaires? Un silence lourd de sous-entendus s’installa un instant.
— La mort de monseigneur le prince serait liée à la tentative d’assassinat de ce Gascon? demanda enfin Olivier en constatant que le roi hésitait à poursuivre.
Il sentait avec inquiétude qu’il s’approchait d’un terrain dangereux.
— Peut-être… murmura Henri de Navarre qui se leva pour faire quelques pas, comme pour dissimuler, ou calmer, une évidente agitation. Faut-il que j’aie confiance en vous, Fleur-de-Lis, pour vous révéler ce que je vais vous confier…
Il se tourna vers lui, en se forçant à sourire, mais son regard était
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