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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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où il voulut aller, ne le sachant point très bien lui-même, à
ce que je vis, et branlant fort sur sa selle.
    Comme nous
chevauchions ainsi cahin-caha sur le labour desséché, M. de Rosny saignant de
toutes ses plaies, et moi tant abêti par mon coup sur la tête que je n’arrivais
pas à aligner deux idées, nous vîmes venir à nous une longue file de sept
seigneurs au moins, dont les casaques étaient constellées de croix de Lorraine,
l’un d’eux portant en outre au bout de son bras senestre la cornette blanche et
générale de M. de Mayenne ;. Et combien qu’ils fussent en aussi mauvais
point que nous-mêmes, chevauchant à pas petits et la tête basse, j’entendis
bien que, s’ils avaient voulu nous combattre à sept contre deux, nous y
eussions laissé du poil. Mais les malheureux n’y pensaient guère, comme on va voir.
    — Qui
vive ? dit le premier de la file.
    — Baron
de Rosny, dit Rosny, portant fort haut la crête, et piaffant et paonnant comme
à son ordinaire.
    — Ha !
Monsieur de Rosny ! continua celui-là qui l’avait quivivé, la Dieu
merci ! nous vous connaissons tous. Et bien savons-nous que vous êtes
loyal gentilhomme et d’honneur.
    — Messieurs,
la grand merci de ce los. Que me voulez ?
    — Monsieur
de Rosny, que vous nous fassiez courtoisie et nous sauviez la vie.
    — Que
dites-vous ? dit Rosny béant. Voulez-vous vous rendre à moi ? Mais
vous parlez comme gens qui ont perdu bataille.
    — Quoi ?
dit celui qui avait parlé et qui était M. de Sigogne (comme je le sus plus
tard), est-ce là tout ce que vous savez, Monsieur de Rosny ? Nous l’avons
perdue bel et bien ! Après que le comte d’Egmont vous eut rompu, Navarre
(que Sigogne affectait de nommer ainsi, ne le voulant pas appeler le roi, en
sot guisard qu’il était) a chargé si furieusement qu’il a mis toute notre
cavalerie à vauderoute, laissant nos gens de pié en plan. Et quant à quatre au
moins d’entre nous, nous ne saurions aller bien loin, et ne pouvons que nous
nous rendions, nos chevaux étant comme morts.
    En quoi il
disait vrai, car trois de ces pauvres chevaux n’allaient qu’à trois gambes, et
quant au quatrième, les tripes lui saillaient du ventre.
    — Messieurs,
dit M. de Rosny, sur le ton de la plus suave courtoisie, je vois bien que même
aux vaillants, nécessité fait loi. De cette minute, vous tenant pour mes prises
de guerre, et me portant garant de vos vies, je les défendrai envers et contre
tous, si elles s’encontrent menacées.
    — Monsieur
de Rosny, dit alors un des cavaliers qui s’était tenu jusque-là en retrait, je
ne suis point de ceux qui réclament la protection que vous étendez si
généreusement à ces messieurs. Je suis M. de Nemours, celui-là à ma dextre est
le chevalier d’Aumale (à ce nom je ne pus que je ne tressaillis vivement et
fichai mes yeux dans ceux du quidam avec les sentiments que l’on devine) et
celui-là, poursuivit M. de Nemours, est M. de Trémont. Nous sommes tous trois
en mauvais point, assurément, mais nos montures, comme vous voyez, ont bonnes
gambes et bonne haleine, et les troupes royales apparaissant à l’horizon, nous
allons nous retirer, Monsieur de Rosny, non sans vous mercier mille fois de
votre courtoisie et recommander une dernière fois à vous ces quatre
gentilshommes.
    M. de Rosny
fit alors quelques compliments fort bien tournés à M. de Nemours, lequel se
trouvait être duc et demi-frère du duc de Mayenne, et pendant ce temps, le
chevalier d’Aumale qui était un fort jeune et fort beau gentilhomme, brun de
peau et noir de poil, poussa son cheval près du mien et se mettant au botte à
botte avec moi, se pencha sur sa selle et me dit à voix basse :
    — Monsieur,
qui êtes-vous ? Vous m’envisagez de bien étrange façon.
    — Je suis
le baron de Siorac.
    — Monsieur
de Siorac, avez-vous contre moi quelque sujet de fâcherie, et peux-je savoir
lequel ?
    — Chevalier,
dis-je sotto voce, dans l’église de Saint-Symphorien à Tours, vous avez
forcé une fillette de dix ans, le cotel à la gorge.
    — Je m’en
ramentois, dit le chevalier d’Aumale en détournant les yeux, et voudrais ne
m’en ramentevoir point. Ce sont là de ces folies que l’on commet communément
après le combat dans la fièvre du moment.
    — La demoiselle
était noble et de bonne maison.
    — Ha !
dit le chevalier, voilà qui me fâche !
    Et
m’envisageant œil à œil, il ajouta :
    — Si
cette

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