Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
Vom Netzwerk:
l’air de prononcer un oracle.
    MM. de
Chanteloup et d’Aufreville, lesquels à eux deux n’avaient pas quarante ans,
n’étaient pas encore revenus de la surprise de se trouver là, parce qu’en Paris
Mayenne avait annoncé partout l’écrasement de Navarre, son armée à Ivry, comme
à Dieppe, d’ailleurs, étant deux fois plus forte que celle de l’hérétique, et
des « suppôts de l’hérétique » (comme il appelait les catholiques
ralliés à la cause royale). En outre, assurés et persuadés par les
prêchailleries des curés que le Seigneur leur allait bailler la victoire,
puisqu’ils étaient son glaive vengeur, ils ne pouvaient entendre, en leur
colombine simplicité, pourquoi Dieu avait abandonné les saintes cohortes qui
défendaient la vraie Foi pour faire triompher la fausse. Et comme il n’y avait
pas là de prêtre, ou de moine, pour expliquer que cette défaite n’était qu’une
« épreuve » voulue par le Seigneur pour les purifier sur le chemin de
l’inévitable triomphe du catholicisme apostolique et romain, ils restaient plus
muets et quiets que saints de pierre en attendant qu’on leur dît que penser.
    C’est du moins
là les sentiments que je crus démêler en eux en observant leur tant visible
perplexité. Mais Miroul entrant avec mon page Nicolas, la vue du pauvret dont
la jeunette et tendrelette face était toute chaffourrée de chagrin, et de
larmes, me détourna de les observer davantage, et faisant de prime asseoir mon
pauvre Nicolas sur un tabouret près de ma coite dans ma ruelle, j’entrepris de
le conforter du mieux que je pus, et abaissant mon bras sur sa tête, lui
caressai, ce faisant, le cheveu qui était court, brun et en bouclettes
tortillé.
    — Mon
Nicolas, dis-je, veux-tu après ce coup t’en retourner chez toi ? Parle-moi
sans détour. Pour ce faire, je te baillerai escorte et clicailles.
    — Ho !
que nenni ! dit-il à travers ses sanglots. Ce serait lâcheté ! Et
Guilleris, de son ciel, me dépriserait, si je tournais couard et m’allais
blottir au logis comme lièvre en son terrier. Fi donc ! Je veux combattre
et grandir, et mon métier apprendre ! Mieux vaut mort que honte !
    — Siorac,
dit Rosny d’une voix faible assez, couché sur sa coite, vous avez là un bon
page, et sorti d’un bon ventre.
    — Je le
crois aussi, dis-je, tout en caressant le cheveu de Nicolas, lequel à la longue
apazimé par mes mignonneries, et mes consolations, et l’inestimable los de M.
de Rosny, passa quasiment des larmes au sommeil, étant un enfant encore, et
fort las. Quoi voyant, je lui accordai permission de s’allonger à mon côtel sur
la coite. Ce qu’il fit, quasi endormi déjà, me jetant un bras autour du col et
ococoulant sa tête bouclée dans le creux de mon épaule, comme si j’avais été sa
mère, dont, à la vérité, je lui tenais lieu en quelque guise, étant à lui très
affectionné, tout insufférable marmouset qu’il fût en ses jours turbulents,
lesquels, de reste, revinrent tôt, cet âge étant celui du bienheureux oubli.
Plût au ciel que la navrure et l’anxieuseté qu’avait jetées en moi la mort de
Larissa pussent s’effacer si vite, mais hélas, elle avait quasi ébranlé le
fondement de ma vie, et je ne pouvais même point dire, en le trouble et
incertaineté de mon étrange prédicament, si je pourrais jamais rétablir ma
félicité domestique.
    Mon page
ensommeillé, Miroul départit pour prendre soin de Saint-Ange (lequel était
blessé au bras), M. de Rosny pâtissant trop pour ouvrir le bec, et MM. de
Chanteloup et d’Aufreville s’accoisant en leur perplexité, même M. de Sigogne,
à la longue discontinua ses inanes jaseries, tant est que régnait en la chambre
un profond silence quand tout soudain, l’huis se déclouit avec fracas, et entra
M. d’Andelot, suivi de cinq à six hommes armés et cuirassés, lequel d’Andelot
était le fils de ce grand capitaine huguenot sous les ordres de qui mon père
avait combattu sous Calais et que Catherine de Médicis, pour la seule raison
qu’il était le frère de l’amiral de Coligny, avait fait assassiner ; au
demeurant (je parle du fils) bon capitaine du roi Henri, mais de son
comportement escalabreux et querelleux.
    — Monsieur,
dit-il, la mine dépite et refroignée, et s’adressant à M. de Rosny sur un ton
des plus froidureux, je suis votre serviteur.
    — Monsieur,
dit Rosny, fort béant et sourcillant de voir ce seigneur irrompre en sa

Weitere Kostenlose Bücher