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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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de la chrétienté,
l’infanterie espagnole (la meilleure du monde), les mines d’or des Amériques,
et quasiment à votre botte, le pape de Rome ?
    — Sixte
Quint, dis-je, n’est point à la botte de Philippe II.
    — Cela
est vrai, mais le peut-il récuser comme champion de la Sainte Église Catholique
contre les huguenots ? Baron, observez, je vous prie, le bizarre de cette
royauté en Paris : Trois têtes, toutes étrangères : Nemours, qui est
du clan lorrain. Cajetan, qui est italien. Mendoza, qui est espagnol. Voilà ce
qu’il advient de nous autres, vrais vieux Français de vieille France, depuis
que nous tuons nos rois !
    — Et la
quatrième tête qui commande en Paris ?
    — Celle-là,
je vous le concède, est française, et peut-être la pire de toutes par son zèle
et sa rapacité. L’allez-vous deviner ?
    — Les Seize !
    — Oui-da,
les Seize ! qui ne sont pas seize, mais cinquante ; un
ramassis de robins, de curés et de prêchaillons ! Cinquante coquins qui
commandent à deux cent mille Parisiens sottards, crédules et badauds ! Les Seize, c’est tout ensemble la prêchaille et le bras séculier ! Ceux-là
ne pensent qu’à exiler, qu’à tuer et piller et ne font pas, hélas, qu’y penser.
    J’entendais
bien, à ce véhément discours, que L’Étoile se faisait un souci à ses ongles
ronger, craignant que les Seize le chassent un jour, en tant que politique, de son clair logis. Et le voulant détourner de cette funeste anxieuseté, je
quis de lui s’il avait pensé à amasser provisions en vue du siège.
    — Oui-da !
Et suis le seul de ma rue à l’avoir fait ! Tant ces coquefredouilles sont
persuadés que, dès que Navarre apparaîtra sous nos murs, l’armée espagnole du
duc de Parme volera à notre secours pour terrasser le dragon. Ce que je
décrois, le duc de Parme ayant fort à faire dans les Flandres.
    Je quis alors
mon congé de L’Étoile pour ce que ce jour étant un dimanche, je voulais aller à
messe en l’église de mon quartier qui était l’église des Filles-Dieu, tant pour
y prier que pour y être vu, écoutant bec bée un prêche assurément séditieux,
donnant libéralement à quête, et me faisant mouton parmi les ouailles pour
n’être point suspicionné. Sur quoi mon bon L’Étoile me voulant raccompagner
jusqu’à son huis, un bras jeté sur mon épaule, il voulut bien me régaler, l’œil
tout à la fois moral et allumé, d’une de ces petites historiettes dont on daube
et badaude en Paris.
    — Baron,
avez-vous connu Sélincourt ?
    — Oui-da.
Il était gouverneur de l’arsenal.
    — Il
l’est toujours, sauf qu’un marchand de vin nommé Vasseur l’a, ce samedi écoulé,
blessé d’un coup d’épée.
    — Sur
quel fondement ?
    — Fondement
est bien dit, s’agissant d’une garce dont Sélincourt, devant marier la veuve
Yver, se défit en la vendant audit Vasseur.
    — En la
vendant ?
    — Oui-da,
quatre cents écus.
    — Sont-ce
là mœurs parisiennes ?
    — Il
apparaît. Et ce fut lourd payé, la drolette étant si légère. D’autant que la
veuve Yver décédant deux mois après mariage, Sélincourt, veuf de la veuve,
voulut ravoir sa ribaude.
    — Sans
repayer ?
    — Sans
repayer. D’où le coup d’épée de Vasseur.
    — La
sienne ?
    — Vous
vous gaussez. Un marchand de vin porte-t-il épée ? Celle de Sélincourt,
lequel, Vasseur désarma et navra de son propre estoc.
    — L’arsenal
est bien gardé ! dis-je, en riant à gueule bec.
    Mais L’Étoile
qui s’était en son for très ébaudi de son historiette, n’en voulut point rire,
mais faisant sa lippe, l’œil au ciel, et fort soupirant en sa morale
componction, il dit :
    — Querelle
digne des temps !
    À quoi je ris.
    — O
Tempora ! O Mores ! [18] ,
disait déjà notre Cicéron. Mon cher L’Étoile, le pis des mœurs de ce temps, ce
n’est ni l’écu ni le cul. C’est le zèle sanguinaire des dévots.
    — Amen !
dit L’Étoile, qui, étant en son gallicanisme fort défiant du pape, tenait lui
aussi en grande suspicion la tyrannie des Églises.
    Celle des
Filles-Dieu où j’allais de ce pas à messe, après être passé en mon logis
prendre un gros livre de prières (car plus le livre est gros, plus l’âme est
pieuse) ne tarda point, comme je m’y attendais, à retentir des accents d’un
prêchaillon qui, écumant de la gueule en sa fureur, claironna du haut de la
chaire sacrée, à stridente voix, que le

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