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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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en
Paris, à tout le moins mes brocarts, mais fus début mai capturé en Corbeil,
avec ma coche et mes commis par le roi de Navarre.
    — Drapier,
dit rudement la Montpensier, si ton clabaudage tend à nous vendre les
brimborions qui sont en cette hotte, c’est temps perdu.
    — Nenni,
Madame, dis-je en m’inclinant et le dos fort lassé de ces infinis saluts, je
n’ai pas ce propos. Ma hotte sert un tout autre dessein.
    — La
peste soit de ces mystères ! s’écria la Montpensier. Veux-tu parler clair
à la parfin ?
    — Poursuivez,
maître drapier, dit M me de Nemours. Nous vous oyons avec patience.
    — La
grand merci, Mesdames, dis-je, contrefeignant de croire en mon humilité que
ladite patience m’était montrée par toutes. Je fus donc retenu deux jours
captif en Corbeil, et tout soudain amené devant le roi de Navarre, il me dit
qu’il allait me bailler passeport pour passer ses lignes, mais qu’il m’avisait,
si je persistais à vouloir aller en Paris, de bien m’envitailler à l’avance,
pour ce qu’il était pour réduire la ville par la famine. Ce que je fis.
    — Et ce
que bien je crois, dit la Montpensier avec aigreur, te voyant gras comme rat en
paille.
    — Il
n’est pas gras, dit M me de Nemours avec sa coutumière bénévolence,
il est sain et bien-portant.
    — Mais,
que me chaut, à moi, qu’il soit sain et bien-portant ? dit la Montpensier.
À quoi tend tout ceci ?
    — J’y
viens, Madame, dis-je avec une autre de ces épuisantes courbettes. Navarre me
dit aussi que si j’apprenais en Paris, que ses bonnes cousines, les princesses
lorraines, pâtissaient de la faim, il m’envitaillerait pour elles, si je
pouvais à lui revenir, ne voulant point faire la guerre aux femmes.
    — Le
chattemite ! s’écria La Vasselière, laquelle jusque-là n’avait pas le bec
décloui, se contentant de m’observer fort curieusement. Ce bouc puant,
poursuivit-elle, a trouvé un bon moyen de nous empoisonner !
    — Ce que
je décrois, dit M me de Nemours, Navarre est à l’égard de notre
famille tout à plein innocent : Il n’y a pas apparence que Navarre qui, à
l’époque avait dix ans, ait trempé dans l’assassinat de mon mari. Et quant à la
meurtrerie de mes fils, elle fut l’œuvre du seul Henri Troisième, Navarre étant
alors fort occupé à prendre des villes audit Henri.
    — Quand
même qu’il n’aurait pas offensé les Guise, votre Navarre est l’ennemi de l’État
et de la Sainte Religion ! s’écria avec feu La Vasselière.
    — Il
n’est pas, toutefois, l’ennemi de ma famille, dit doucement M me de
Nemours qui, comme Catherine de Médicis, inclinait à faire passer sa famille
avant le royaume.
    — Mais il
est hérétique ! hucha La Vasselière tout à fait hors d’elle-même.
    — Babillebahou, Madame ma nièce ! dit M me de Nemours (voulant dire par là dire
« Bah », à ce que j’imagine) ma mère fut quasi hérétique, et mon père
aussi, et tous deux finirent pieusement leurs jours en le giron de notre Sainte
Mère l’Église. Si Navarre prend Paris, nos bons évêques rhabilleront son
hérésie, et le tourneront catholique en deux coups de goupillon.
    — Le
pape, cria La Vasselière, sa face tournant au rouge brique, l’a déclaré
hérétique et relaps, et il ne l’absoudra jamais !
    — Babillebahou ! dit M me de Nemours avec un petit rire, le pape sera trop aise
d’avoir en France un roi catholique, fût-ce du bout du bec, pour ne point à la
parfin l’absoudre. Et pour moi, Madame ma nièce, poursuivit-elle de sa voix
suave et son long cou gracieux inclinant sur le côté sa fine tête, si ce siège
se prolonge encore, je préférerais manger du pain hérétique que pas de pain du
tout.
    À ce mot
« pain », il y eut un grand silence dans la pièce, et de grands
pensements de part et d’autre dans les cervelles, qui ne se voulaient pas
mettre en mots, La Vasselière, à mon sens, n’en manquant point, et la
Montpensier qui s’encontrait à ce que je crois, quasiment au bout du sien, ne
voulant pas, comme sa mère, l’admettre, et sachant fort bien ce qu’il en était
de La Vasselière, voyant sa bonne mine, et lui lançant par-dessous des regards
haineux, tout amies, cousines et complices qu’elles fussent. Pour moi, il me
parut fort étonnant que ces dames, si hautes qu’elles fussent dans l’État, et
se voulant plus hautes encore, si riches au demeurant, et possédant des
centaines de fermes dans le

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