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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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conversion !
    — Ha !
ma conversion ! dit le roi et, toujours souriant, s’accoisa.
    À quoi, je
n’osais gloutir ma salive, ni toussir, ni branler, me trouvant tout ensemble
fort gêné d’assister à cet entretien, et fort curieux de sa tournure, mais ne
pouvant rêver de l’interrompre pour demander mon congé au roi, celui-ci ayant
oublié tout à plein ma présence, et Gabrielle ne faisant pas plus attention à
moi qu’au coffre sur lequel j’étais assis – ou qu’au valet, qui voyant le
train où allaient les choses, s’était recouché dans son coin, sa coite, qu’il
roulait pendant le jour, étant posée à même le parquet.
    — Oui-da,
Sire, votre conversion ! dit Gabrielle, laquelle vous avez, ces quatre ans
écoulés, maintes fois promise, et à chaque fois remise.
    — C’est
qu’il y avait, dit le roi avec un fin sourire, de bonnes raisons pour promettre
et de bonnes raisons pour remettre…
    — Mais
plus maintenant, Sire ! s’écria Gabrielle avec la dernière véhémence.
Sire, comme dit si bien le marquis d’O, il ne faut plus tortignonner !
Sans cela, dans huit jours, vous avez en France un roi élu !
    — J’entends
bien, mon cœur, dit le roi en attachant sur elle un œil aigu, mais d’où vient
que vous preniez tant à cœur ma conversion ? Vous n’êtes pas catholique si
zélée. Il me souvient même qu’au début de nos amours, vous étiez à ce point
entichée de mes huguenots que vous ne vouliez qu’eux comme servantes et
serviteurs.
    — Sire,
dit Gabrielle en battant du cil, je n’ai pas épluché la bonne opinion que dès
l’abord j’ai conçue d’eux ; ils reluisent de vertus bien rares. Mais,
Sire, ce n’est pas moi qui ai changé. Ce sont les temps. Et les temps
requièrent que vous fassiez à la paix et à votre trône le sacrifice de votre
huguenoterie.
    — Mon
ange, dit le roi, l’envisageant œil à œil, je vous vois tant me presser en
cette affaire de conscience, laquelle est aussi une affaire d’État, que je ne
peux faillir à imaginer que vous pensez, se peut, tirer quelque avantage pour
vous de mon abjuration.
    — Sire,
cela est vrai ! dit Gabrielle avec un air de franchise naïve admirablement
contrefeint. Mais à qui la faute, sinon à vous qui m’avez marié à M. de
Liancourt, lequel est au lit plus inerte que souche ?
    — C’est
bien pourquoi je vous l’ai choisi comme mari, mon cœur, dit le roi en souriant.
Mais Ventre Saint-Gris ! qu’est-ce que M. de Liancourt a affaire avec ma
religion ?
    — C’est
que, Sire, tous vos ministres huguenots mis bout à bout ne sauront jamais
défaire mon mariage avec lui, tandis que le pape, lui, le peut, si vous vous
accommodez à Sa Sainteté en vous convertissant.
    — Mon
cœur, je ne vous entends pas, dit Navarre. Vous voulez donner son congé à M. de
Liancourt, lequel a le grand mérite de vous soustraire à l’autorité de votre
père sans l’exercer le moindre sur vous, rendant ainsi à vous-même, et à moi,
un inappréciable service.
    — Sire,
dit Gabrielle avec son air le plus angélique, que peut faire une femme de sa
liberté reconquise sinon aspirer à d’autres chaînes ?
    — Madame,
dit le roi en sourcillant, si en disant cela, vous pensez à vous remarier avec Feuille Morte, je me couperai plutôt la langue qu’elle vous dise
« oui ». Feuille Morte vole au gré des vents, à’steure dans
mon camp, à’steure dans celui des ligueux, à’steure dans le lit d’une belle,
à’steure sous le vôtre, du moins quand je suis dessus… Il n’est ni à vous, ni à
moi.
    — Ha !
Sire ! dit Gabrielle avec un air de grand déprisement, qui pour une fois
ne me parut pas joué, M. de Bellegarde m’a trop offensée par ses infidélités et
ses perfidies pour que je puisse lui pardonner jamais. Et vous-même, Sire, vous
m’offenseriez en ranimant à son endroit vos anciennes suspicions. Laissez Feuille Morte, je vous prie, pourrir dans le terreau de mes oublis. De
reste, Sire, bien folle je serais, étant aimée par le premier Français,
d’appéter à plus bas que lui.
    — Hé
quoi, Madame ! dit le roi beaucoup plus raisin que figue, et ce
« Madame » marquant quelque distance, vous me feriez l’honneur et le
bonheur de penser à moi comme époux ? Mais Madame, je suis marié !
    — Oh !
Sire ! Si peu ! Avec une reine qui, non contente de rejoindre le camp
de vos pires ennemis, a tâché de vous empoisonner, et pour cette

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