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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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parfin d’une voix quelque peu étouffée,
il ne ressort pas tout à plein clairement laquelle des deux vous cuidez être
celle qui demeure vive. Car à’steure vous paraissez apenser que c’est l’une, et
à’steure, l’autre.
    — Ha !
mon père ! dis-je, la voix quasi trémulante, ne quérez pas de moi ce que
je crois, mais bien plutôt ce que je veux, ou ne veux pas croire, n’ayant aucun
moyen de décider selon la raison, les preuves faillant toutes.
    — Qu’en
est-il donc de votre volontaire créance ?
    — Je veux
ni ne peux admettre, dis-je, ma gorge se nouant, que j’aie perdu à jamais mon
Angelina : mon dol serait trop immense pour le pouvoir souffrir. Je me
veux donc persuader que la survivante des deux, c’est elle, de présent jetée
hors ses gonds par la mort de sa jumelle, et en tout l’imitant en sa corruption
dans l’espérance de la faire en elle-même revivre.
    — C’est
une idée étrange.
    — Je ne
sais. En ses maillots et enfances, Angelina s’est laissé souvent fouetter,
bouche close, pour des fautes que Larissa avait commises et quand j’ai quis
d’elle pourquoi elle supportait pareille injustice, elle me répondit qu’une
fois la faute perpétrée, elle ne savait plus bien si ce n’était pas la sienne.
    — Angelina,
dit mon père, ferait donc revivre Larissa en elle en l’imitant, et votre espoir
c’est qu’un jour viendra où elle discontinuera ce déportement ? Pierre, si
cette idée vous conforte dans votre présente confusion, je vous souhaite de la
cajoler assez adroitement pour qu’elle demeure avec vous. Sit caeca futuri
mens hominum fati : liceat sperare timenti [11] .
    Début
décembre, si bien je me ramentois, mon bras dextre reprenait quelque force et
souplesse – au point que mon escrime, au dire de Saint-Ange, n’était point
tant inférieure à ce qu’elle avait été – quand un jour, rentrant dans ma
chambre, après une matinale repue, j’y encontrai une chambrière que je ne
connaissais point, laquelle était occupée à refaire ma coite.
    — Mamie,
dis-je en oc, qu’est-cela, tu es neuve en ces murs ?
    — Oui-da,
Moussu lou Baron. Je fus engagée hier par Monsieur votre père. Mes parents ont
beau mas à une demi-lieue de Marcuays.
    — Tiens
donc, dis-je en l’envisageant d’un œil qui pouvait bien sur elle s’attarder,
tant elle était accorte et fraîchelette, encore qu’elle fût, comme Maître
Zanche en sa langue marrane eût dit, péquègne au point de pouvoir passer
sans courber le chef sous mon bras à l’horizontale tendu, mais cependant, le peu
qu’il y avait d’elle mince et bien rondi, l’œil noir fort vif et fort futé, la
bouche friande, et le nez retroussé. Voilà, dis-je, qui est bien fait à lui. Et
qui te commande céans ?
    — Votre
nourrice, la bonne dame Barberine.
    — Et quel
est céans ton office ?
    — Je fais
votre lit, Moussu lou Baron.
    — Puisses-tu,
dis-je, le défaire aussi avec moi !
    — Moussu,
je ne vous entends pas, dit-elle, mais de l’air de m’entendre fort bien, et
tortillant son petit corps de la tête à l’orteil.
    — Mamie,
comment t’appelle-t-on ?
    — Babille.
    — Babille ?
Est-ce un nom ou un surnom ?
    — De mon
baptême, je suis Marie. Mais on me nomme Babille au logis.
    — Babille,
ta langue est-elle si parleresse ?
    — Se
peut, Moussu.
    — Voilà
qui est parlé bien bref pour une fille jacassante. Montre-moi cette babillarde.
    — Ha !
Moussu !
    — Ha !
Moussu ! Ignores-tu que je suis révérend docteur médecin ? C’est bien
le moins que tu me montres ta langue, si tu dois faire et défaire mon lit.
Allons, Babille, obéis.
    — Voilà,
Moussu.
    — Et
l’œil clos, je te prie.
    À quoi elle
obéit derechef, si menue, naïve et tortillante que c’était plaisir rien que de
l’envisager, et plus grand plaisir encore, m’approchant en tapinois, de prendre
entre mes lèvres sa petite langue rose.
    — Ha !
Moussu ! dit-elle, en déclosant l’œil et en se retirant, mais point si
vivement que la pudeur l’eût voulu, tant est que je sentis bien que j’eusse pu
pousser les choses plus outre, sinon que je répugnais à mener l’affaire à la
soldate, n’appétant pas qu’à l’appétit.
    — À la
goûter, dis-je, ta langue, ma gentille Babille, m’a paru, en effet, jasante et
frétillante,
    — Moussu,
dit-elle en m’envisageant de son œil mi-naïf mi-gaussant, cela est-il

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