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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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était usé jusqu’à la trame et qui jouait à la paume
avec une chemise déchirée que je présumais, trois à quatre jours après Vitry,
de quérir de M. de Rosny, qui déjà avait l’œil sur les débours du roi, combien
Sa Majesté l’avait payé.
    — Bien le
sais-je ! dit Rosny d’un air mal’engroin, c’est moi qui en ai avancé les
pécunes ! Cent écus ! J’ai versé cent écus il y a deux ans, pour cet
affiquet ! Ventre Saint-Gris ! Le sot dépens ! Votre roi aimait
les aigrettes ! Et le mien les panaches !
    — Votre
roi est aussi le mien ! dis-je, d’un ton piqué.
    — Certes !
Certes ! dit Rosny d’un ton gaussant, ses larges pommettes saillant en son
sourire et ses yeux clairs fort pétillants. Le roi est à vous aussi, mon ami,
sauf toutefois son panache, qu’il ne m’a mie remboursé.
    Henri voulut
garder mon père à ses côtés, tant est que je devins le seul chef des vingt-cinq
chevaux de notre escorte et, d’ordre d’Henri, rejoignis la compagnie de Rosny
qui, à huit heures et demie du matin, venait d’advenir et que le roi plaça dans
le corps de son escadron, lui disant :
    — Rosny,
faites mettre vos arquebusiers pied à terre. Qu’ils renvoient leurs chevaux et
bagages avec les pages et les valets. Je connais leur vaillance. Je veux qu’ils
me servent ce jour d’hui d’enfants perdus.
    À quoi,
Pissebœuf, qui avait ouï ce discours, poussa son cheval jusqu’à moi, et me dit sotto voce en son gascon, et la face fort pâle :
    — Moussu
lou Baron, devons-nous aussi mettre pied à terre ?
    — Que
nenni, dis-je, n’en faites rien. Vous êtes à moi, puisque M. de Rosny vous a à
moi baillés, et dites-le aussi aux autres arquebusiers de ma suite.
    — Ha !
dit Pissebœuf en poussant un grand soupir, la merci Dieu et la merci à
vous ! Je veux bien être tué, mais à cheval ! Et s’il plaît à Dieu, à
vos côtés, Moussu lou Baron…
    S’il eût voulu
mettre sur le devant de la tête les idées qu’il avait derrière, il eût pu dire
aussi que sur un champ de bataille, tant qu’on a un bon cheval entre les
gambes, on se peut tirer d’affaire, alors que les gens de pié l’ont infiniment
plus mauvaise, et en particulier ceux que l’on désigne de cette expression si
étrangement compatissante : les enfants perdus.
    Et
« perdus », ils le sont neuf fois sur dix, belle lectrice, à qui je
veux expliquer ici, la supposant ignorante des cruels raffinements de la
guerre, que ces « enfants », leurs « pères » les perdent
fort en avant d’eux sur le champ de bataille, égaillés et dispersés çà et là,
cachés comme ils le peuvent, qui derrière un arbre, qui dans un buisson, qui
dans un pli de terrain, leur rôle étant de tirailler dans la cavalerie ennemie
tandis qu’elle charge la leur, et en très grand danger, par conséquent, d’être
par elle piétinés et taillés.
    La salive me
sécha incontinent dans la gorge, quand je vis s’avancer au petit trot vers nous
un escadron de reîtres, et l’ordre ayant été donné de marcher en leur encontre,
je mis l’estoc au poing et passai mes rênes dans ma main senestre laquelle, à
ma grande honte et confusion, se mit à trémuler. Mais par bonheur je me
ramentus ce que Rosny m’avait dit du roi – le plus vaillant de tous les
hommes – lequel dans le moment qui précédait le combat, était pris à
chaque fois d’un irréfrénable flux de ventre, quitte à en gausser lui-même et à
dire, sur sa chaise percée, en parlant des ennemis à sa manière verte et
gaillarde : Mes amis, je vais faire bon pour eux ! J’entendis
donc, après ce haut exemple, que je ne devais pas avoir vergogne de ce tremblement,
que c’était l’animal en moi qui rebéquait au péril, et que le cœur se prouvait
à l’acte, et non avant. Ce pensement me revigorant, je repris vent et haleine,
et raidissant mes muscles, j’attendis quasi avec impatience le toquement des
ennemis.
    Celui-ci
toutefois ne se fit pas, car les reîtres, qui s’étaient mis au galop,
paraissaient nous devoir charger assez furieusement quand, parvenus à trente
pas de nous, ils tirèrent leurs pistolets en l’air et tournèrent bride.
    — Au
pas ! Au pas ! cria Rosny à ceux de ses cavaliers qui faisaient mine
de poursuivre les ensauvants. Et huchant cela, aidé de ses sergents et
capitaines, il ramenait et rameutait sa compagnie en rangs serrés.
    — Qu’est-cela,
Monsieur de Rosny ? lui criai-je, comme il

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