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L'abandon de la mésange

L'abandon de la mésange

Titel: L'abandon de la mésange Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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du
malentendu quant au décès du pape puisqu’il laissait la voie libre à ses
pleurs. Étant parvenue à sécher ses larmes, elle tenta de mettre un terme à la
rencontre, mais l’aumônier la retint encore une heure, ne s’interrompant que
lorsqu’il entendit la cloche annoncer la fin des cours et l’heure du repas.
    Maintenant qu’elle avait retrouvé la paix,
qu’elle n’avait plus cette peur d’avoir un deuxième cœur dans son corps, elle
préférait la sagesse et le désir inassouvi aux amours charnelles, délicieuses
mais trop affolantes. Comme elle ne voulait jamais plus vivre une telle
hantise, elle se promit continence et mariage avant de retrouver les
merveilleux frissons qu’elle avait connus dans les bras de Côme. Par-dessus
tout, elle craignait que l’amour de Côme ne se soit étiolé, alors que le sien
était encore si vif et si souffrant. Elle rêvait de lui et de sa timide toison
blonde, tentant de se convaincre qu’il rêvait aussi d’elle. Son orgueil et sa
fierté la retenaient de lui téléphoner. Mais si elle avait été enceinte,
qu’auraient-ils fait ?
    – Côme, c’est moi. Tu m’as demandé de te
téléphoner si je n’avais pas de…
    – Tu n’as pas eu tes règles ! Nous
allons avoir un bébé ?
    Si elle avait naïvement espéré entendre un cri
de joie ou même une demande en mariage, elle avait dû se contenter d’une voix
chevrotante et inquiète, puis d’une sonore déglutition et de soupirs sortis directement
des narines.
    – Côme, je téléphonais pour te dire de ne
pas t’inquiéter.
    – Pas m’inquiéter ? Mais enfin,
Élise, j’aurais été un trou du cul si je ne m’étais pas inquiété ! J’ai
bien compris, tu n’es pas enceinte.
    – Je ne suis pas enceinte. Mais si je
l’avais été ?
    – Mon Dieu ! Ma douce, nous venons
d’échapper à une catastrophe, quelle qu’en eût été l’issue. Alors, je ne veux
même pas penser à un scénario. Merci de m’avoir téléphoné, ma douce. Je
t’embrasse.
    – Côme !
    – Quoi ?
    – Est-ce que tu t’ennuies de moi ?
    Élise fut soulagée de voir qu’il avait changé
de ton. Quelle idée avait-elle eu de le tourmenter inutilement ? Elle
avait quand même un peu honte.
    – Je n’ai pas une minute à moi, mais s’il
m’arrive de rêvasser, c’est toujours près de toi que vont mes pensées.
    – Alors, si on se donnait rendez-vous en
rêve, toutes les nuits à trois heures, ça te conviendrait ?
    – Parfaitement. À bientôt, ma douce, à
trois heures.
     
    * * *
     
    La chorale du couvent était en répétition pour
le spectacle de Noël et Élise, dont la grande religiosité avait été découverte
le jour du décès de Pie XII, avait choqué son professeur titulaire en refusant
d’en faire partie.
    – Vous ne voulez pas faire un duo avec le
chœur des anges ?
    – Je préfère préparer mon stage.
    – Vous en êtes certaine ?
    – J’en suis très certaine.
    – Élise, un chœur de jeunes filles encore
innocentes est pourtant si proche de celui des élus.
    – Mais, ma sœur, je suis tout sauf
innocente !
    Élise éclata d’un rire clair, imitée par la
religieuse.
    – N’allez jamais répéter cela devant les
gens… On pourrait imaginer des choses…
    Sans cesser de rire, Élise répondit qu’elle
n’était pas inquiète, parce que les gens n’avaient pas vraiment d’imagination.
    Elle était lasse d’entendre parler de choses
telles que « les élus, le chœur des anges », à quoi elle croyait de
moins en moins. Depuis qu’elle aurait commis « le » péché contre le
neuvième commandement de Dieu, « L’œuvre de chair ne désireras, qu’en
mariage seulement », Élise s’était retirée des manifestations religieuses,
même si elle doutait d’avoir commis de faute mortelle, puisqu’elle n’avait
jamais eu l’intention de créer quelque œuvre que ce soit. Elle avait tout
simplement trouvé un réconfort en assouvissant son immense amour pour Côme.
    Noël se passa donc sagement en famille et
Blanche fit à ses filles une surprise de taille en leur offrant un train
électrique ! Élise en fut chavirée, sachant que cela répondait à un
souhait de son père. Sa mère avait poussé la délicatesse jusqu’à inscrire sur
la carte accompagnant le cadeau : « À Blanche, à Élise et à
Micheline, de papa. » Elles installèrent le jouet au sous-sol, où elles
commencèrent à lui créer un décor. Élise insista pour

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