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Labyrinthe

Labyrinthe

Titel: Labyrinthe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Kate Mosse
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avait quelques ridules de plus au coin des lèvres et des yeux, hormis cela, le temps n'avait que peu d'emprise sur elle.
    Le tintement de la pendule de chrysocale posée sur le marbre de la cheminée lui rappela qu'il était temps de s'apprêter. De sa penderie, elle sortit une longue robe diaphane à l'encolure échancrée en V, expressément conçue à son intention.
    Son vêtement agrafé, nouées sur ses épaules les minces bretelles dorées, elle s'installa devant sa coiffeuse et commença à brosser ses cheveux, enroulant les boucles autour de ses doigts jusqu'à les voir briller comme du jais. Marie-Cécile adorait ces instants de métamorphose, quand elle cessait d'être elle-même pour devenir la navigatairé 2 . Ce processus la reliait à tous ceux qui avaient rempli cette fonction avant elle en des époques lointaines.
    Marie-Cécile sourit. Seul son grand-père aurait pu comprendre le sentiment tout à la fois d'euphorie, d'exaltation et d'invincibilité qui était le sien à cet instant précis. Non pas ce soir, mais ses prochains préparatifs seraient pour se rendre là où s'étaient tenus ses ancêtres. Ses ancêtres, sauf son grand-père, hélas. Il était douloureux de penser à quel point la grotte était proche des excavations qu'il avait entreprises, un demi-siècle plus tôt. De tout temps, l'Oradore avait eu raison : à quelques kilomètres près, pour peu qu'il eût creusé plus à l'est, c'est à lui, et non à elle, que serait revenu l'éminent privilège de réécrire l'Histoire.
    Après la mort de son aïeul, Marie-Cécile était devenue l'unique héritière de la fortune des l'Oradore, rôle auquel il l'avait préparée depuis fort longtemps. Et le fait que son père, qui était fils unique, eut été cause de grandes désillusions lui était aussi connu depuis sa prime enfance. Elle avait six ans à peine quand son grand-père avait décidé de prendre en charge son éducation, que ce fût d'un point de vue social, philosophique ou académique. L'homme était épris d'art de vivre et possédait un sens étonnant de la forme et de la couleur. Mobilier ancien, tapisseries, haute couture, littérature ou peinture, autant de domaines attestant de la perfection de son goût. Tout le savoir dont Marie-Cécile pouvait se targuer, c'est à lui qu'elle le devait.
    L'Oradore lui avait également enseigné le pouvoir, comment l'exercer et comment le garder. Quand elle avait eu dix-huit ans et qu'il l'avait crue prête pour les tâches auxquelles il la destinait, il n'avait pas hésité à déshériter son propre fils au profit de sa petite-fille.
    Seule ombre au tableau, une grossesse aussi inattendue que non souhaitée. En dépit de sa dévotion à la quête du Graal, l'invincible foi de l'Oradore en l'Église catholique était restée intacte et, partant, ne pouvait s'accommoder d'un enfant né hors mariage. Avorter était exclu. Le confier à la DASS également. Ayant compris que cette maternité n'affectait en rien la détermination de Marie-Cécile, qu'à l'inverse elle exacerbait – si tant est que cela fût possible – son ambition et son intransigeance, il lui permit enfin de regagner le giron familial.
    Elle tira longuement sur sa cigarette, accueillant avec délectation la fumée dans sa gorge et ses poumons, contrariée par ce souvenir pesant. Même vingt ans après, le souvenir de son exil, son excommunication , ainsi qu'il l'avait appelé, la remplissait encore d'un désespoir glacial.
    Le terme n'était pas exagéré, car, à ce moment-là, elle s'était sentie comme morte.
    Marie-Cécile secoua la tête pour chasser ces pensées larmoyantes. Ce soir, rien ne devait altérer son humeur. Elle ne permettrait pas que quoi que ce fût vînt lui porter ombrage. Elle n'admettrait aucune erreur.
    Revenant à son miroir, elle commença par appliquer un fond de teint clair, suivi d'une poudre dorée destinée à refléter la lumière. Ce fut ensuite le tour des sourcils et des paupières qu'elle souligna au moyen d'un eye-liner exaltant le noir de ses cils et de ses pupilles, puis d'ombre d'un vert irisé comme la queue d'un paon. Pour les lèvres, elle choisit un bâton couleur cuivre pailleté d'or, qu'elle fixa à l'aide d'un mouchoir en papier. Elle paracheva son maquillage en aspergeant l'air d'une brume de parfum qu'elle laissa retomber sur sa peau d'albâtre.
    Trois écrins s'alignaient sur la coiffeuse, en cuir rouge avec des ferrures dorées étincelantes. Chacun recelait des

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