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L'affaire Nicolas le Floch

Titel: L'affaire Nicolas le Floch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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même douze heures qu'il dort, reprit Bourdeau. Il n'est pas loin d'une heure de l'après-midi.
    Il avait jeté un regard sur une grosse montre de laiton. Il reprit :
    — Le croyez-vous suffisamment fort pour supporter la nouvelle ?
    — Sans nul doute. La situation est telle qu'il ne peut rester inerte, et d'ailleurs, vous-même insistiez pour qu'on le réveille.
    — Que voulez-vous, Semacgus, M. de Sartine a demandé à le voir dans les plus brefs délais et qu'il vienne le trouver à l'hôtel de police. Cependant, je me demande si nous devons laisser à Sartine le soin de lui dire la vérité.
    — C'est un risque pire que celui que nous voulons éviter. Et nous, nous sommes un peu brutes. J'en tiendrais assez pour demander à M. de Noblecourt de lui parler avec sa sagesse et sa placidité habituelles.
    — À votre service, dit le magistrat derrière eux, essoufflé d'avoir gravi le petit escalier particulier qui menait aux appartements de Nicolas. Laissez-moi avec lui, mais faites-moi la grâce auparavant d'approcher ce fauteuil de son lit.
    — Il ouvre les yeux, dit Bourdeau. Nous vous laissons.

    Nicolas reprit conscience et les formes du lieu connu le ramenèrent à la réalité. La mine grave du vieux procureur l'alerta. Il revit l'expression du chanoine Le Floch lui annonçant, bien des années auparavant, son départ définitif de Guérande. La même expression inquiète, la même attention affectueuse se retrouvaient sur les traits familiers qui se penchaient sur lui.
    — Je vous souhaite le bonjour, Nicolas.
    — Ai-je dormi longtemps ?
    — Plus que vous ne le pensez. Nous sommes vendredi et il est près de deux heures de relevée. Vous avez perdu connaissance hier soir à la porte de ma bibliothèque. Vos amis vous ont relevé baignant dans du tokay dont il aurait mieux valu faire un meilleur usage.
    — C'était un présent à votre attention pour me faire pardonner ma désertion à la fête. Je mesurais l'ingratitude que cette absence constituait à votre égard.
    — Rien de tel ne peut exister entre nous. Vous êtes ici chez vous. Le vent de la rue Montmartre libère. Il me souvient vous avoir dit, lors de votre entrée dans ce logis, que c'était une annexe de l'abbaye de Thélème, où étaient révérées la liberté et l'indépendance.
    Il accompagna ce propos d'un hochement de tête. La bouche spirituelle laissa entrevoir un petit sourire, tandis que le nez fort et coloré se plissait de satisfaction. Il reprit :
    — Que vous est-il donc arrivé ? Votre habit puait l'eau-de-vie à bon marché. Il était crotté et boueux comme un jeune chien perdu sur le quai Pelletier. Vous êtes-vous dérangé, monsieur le commissaire, pour vous mettre dans un tel état si contraire à vos habitudes et à la dignité de vos fonctions ?
    — Hélas, vous n'avez que trop raison, dit Nicolas qui se sentait comme un élève devant son maître, et je ne vous fatiguerai pas avec le récit de ma soirée.
    Les yeux de M. de Noblecourt le fixaient avec l'acuité qu'ils avaient jadis, lorsqu'il participait à une enquête de justice.
    — En un mot, dit Nicolas d'une voix éteinte, je dirai que je suis passé rue de Verneuil chez Mme de Lastérieux, où mon souper était prévu. Elle m'a manqué d'égards, je suis parti. J'ai gagné le Théâtre-Français pour assister au premier acte d' Athalie . Calmé, j'ai décidé de retourner chez Julie, mais la joie qui y régnait m'a convaincu de mon erreur. Outragé et furieux, j'ai quelque peu erré dans Paris avant de faire retour rue Montmartre, comme l'enfant prodigue.
    — Vous vous êtes en effet conduit en enfant, vous un homme fait et d'expérience. Avez-vous croisé quelques connaissances au théâtre ?
    — Oui, mon confrère, le commissaire de permanence, M. Chorrey.
    Nicolas avait répondu sans réfléchir, mais soudain il prit conscience que M. de Noblecourt l'interrogeait comme on s'enquiert de l'emploi du temps d'un suspect.
    — Puis-je vous demander, monsieur, le pourquoi de cette question ?
    Le procureur caressa ses bajoues couperosées d'une main blanche de prélat.
    — Votre jugement vous revient, Nicolas. Je dois vous informer d'une nouvelle grave. Je comprendrais qu'elle vous émeuve, mais je vous demande de conserver un sang-froid dont vous pourriez avoir le plus pressant besoin dans les heures qui viennent.
    — Que signifient ces propos, monsieur ?
    — Ils signifient, mon enfant, que ce matin, sur le coup de

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