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L'affaire Nicolas le Floch

Titel: L'affaire Nicolas le Floch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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dix heures, un envoyé de M. de Sartine est venu vous quérir. Le lieutenant général de police veut vous voir sur-le-champ. Bourdeau, venu prendre de vos nouvelles, lui a tiré les vers du nez. Soyez courageux ! Ce matin, aux premières lueurs de l'aube, ses gens ont trouvé Mme de Lastérieux morte. Des premières constatations d'un médecin du voisinage, il appert qu'elle pourrait avoir été empoisonnée.
    Longtemps après, Nicolas se rappellerait que sa première réaction, pour fugitive qu'elle ait été, et cela bien avant le coup de poignard d'un chagrin dont l'acuité était exacerbée par une passion revécue en un éclair, avait été de soulagement et comme de libération. Il demeura un instant sans souffle, si pâle et si défait que Noblecourt s'inquiéta de son mutisme.
    — Empoisonnée ! répéta Nicolas. Voulez-vous suggérer qu'une nourriture avariée ou des champignons...
    — Hélas, non. Empoisonnée avec tous les signes et présomptions, à ce que l'on nous dit, d'une intention criminelle.
    — N'est-il pas envisageable qu'elle ait voulu se tuer elle-même ?
    — Si vous disposez de quelques éléments qui peuvent faire supposer un désespoir tel qu'il pouvait l'induire à souhaiter sa propre destruction, vous devez les faire valoir sans plus attendre à ceux qui auront mission de recueillir votre témoignage.
    Nicolas hocha la tête et dit d'une voix à peine audible :
    — La dernière fois... mon Dieu !... que je l'ai entendue – pas vue, je dis bien : entendue – elle riait à gorge déployée et rien n'indiquait une humeur de mort.
    — Il faudra raconter tout cela et chaque chose nécessitera une explication. Prenez les événements avec calme, et affrontez l'une après l'autre les déplaisantes épreuves qui, j'en ai peur, vous attendent. Vous n'avez rien à vous reprocher... Courez vous faire entendre par M. de Sartine et présentez-lui mes respects.
    M. de Noblecourt rajustait la calotte de velours qui couvrait son crâne dégarni. Il semblait que cette occupation minutieuse visât à dissimuler une gêne croissante. Nicolas en éprouva comme une souffrance. Une question non formulée lui avait été posée sur le ton d'une trop évidente affirmation. Non, il n'avait rien à se reprocher. Il comprit à ce moment-là qu'il venait de pénétrer sur une terre inconnue et dangereuse, où les obstacles allaient se multiplier, recelant pièges et chausse-trappes. Le moindre propos, la parole la plus anodine, un regard, l'expression de la plus normale sollicitude d'un ami, causeraient autant de blessures douloureuses dont il ignorerait si elles étaient les fruits de sa propre imagination. Le vieux procureur, fâché contre lui-même, se reprit.
    — Ne vous méprenez pas. Il vous faut regarder les choses en face. Placez-vous en spectateur extérieur, en commissaire de police au Châtelet qui ouvre une enquête. On attend de vous un témoignage précis et circonstancié sur une soirée dont vous affirmez vous-même qu'elle fut agitée. Prenez l'engagement de vous expliquer dans le détail. M. de Sartine vous connaît trop pour douter le moins du monde de votre loyauté et de votre innocence dans un drame sur lequel, pour lors, nous ignorons tout. Et quand je dis M. de Sartine, j'y ajoute vos amis. N'imaginez pas que votre peine nous soit indifférente, elle nous touche à un point que vous n'imaginez pas et, désormais, notre seul souci c'est de vous assurer de notre appui, soyez-en convaincu...
    La voix de M. de Noblecourt était à la fois si tremblante et si pleine de chaleur qu'elle chassa tous les doutes que Nicolas aurait pu nourrir sur le sentiment de son mentor, même s'il frémissait encore au seul énoncé du mot innocence. Mais il mesurait d'autant plus les risques qu'il aurait à affronter face à des interlocuteurs, des adversaires, des accusateurs, des témoins ou des juges moins bien intentionnés à son égard. Il éprouva avec horreur que, touché au plus vif de ses affections, il devrait en outre supporter jusqu'au dénouement de cette affaire, d'être placé dans la situation de ceux qui, tout au long de douze ans de carrière dans la police, avaient dû supporter l'acharnement de ses investigations.

    La porte de la chambre s'ouvrit et Bourdeau réapparut, l'air soucieux.
    — Un fiacre envoyé par M. de Sartine vient d'arriver. Vous le connaissez, je crains qu'il ne s'impatiente. Je vous laisse vous apprêter et je vous accompagne.
    Nicolas eut

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