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L'Amour Et Le Temps

L'Amour Et Le Temps

Titel: L'Amour Et Le Temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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à cette heure, vous serez déjà loin de moi. Quand nous retrouverons-nous ? »
    La veille, Claude avait réitéré à leur ami l’offre de le faire entrer dans la garde soldée. Bernard s’était dérobé une nouvelle fois. Pourquoi devenir soldat de métier, alors qu’il n’y avait plus besoin d’armée proprement dite ? Les gardes citoyennes fédérées suffisaient amplement à maintenir l’ordre, chacune dans sa province. Il n’y aurait plus de guerres. Le caprice ou l’ambition des monarques absolus les avaient faites, cela ne pouvait plus se produire.
    « Ah ! mon cher ami, reprit Lise, je crois que vous vous êtes habitué à vivre sans moi ; pour ma part, je ne m’y accoutumerai jamais.
    — Vous êtes très heureuse avec Claude.
    — Il me manque quelque chose néanmoins. Autant que j’aime Claude, je ne peux pas être parfaitement heureuse sans vous, Bernard. Je le sais aujourd’hui, après l’expérience de ces neuf mois. Vous n’imaginez pas combien votre absence m’a été lourde.
    — Moi non plus, avoua-t-il, je ne suis pas heureux loin de vous. Non, je n’ai pas du tout pris l’habitude…
    — Mais vous ne faites rien pour demeurer.
    — Que pourrais-je faire, Lise ! se récria-t-il. Acheter ici un commerce ? Je n’ai pas d’argent. Trouver une place de commis ? Il y en a des centaines en chômage. Les fonctions publiques, je ne saurais y accéder. J’ai été formé pour le négoce, c’est la seule chose dont je sois capable. Je ne peux la pratiquer qu’à Limoges, avec mon beau-frère Jean-Baptiste, ou bien avec mon père.
    — Pourquoi n’acceptez-vous pas la proposition de Claude ?
    — Parce que j’ai peut-être l’apparence mais point du tout l’âme d’un soldat. S’il me fallait me battre pour défendre ce qui m’est cher, je me battrais ; cela dit, je n’aime pas le métier militaire, l’uniforme, les armes, les allures guerrières.
    — En d’autres termes, vous préférez votre état, votre routine, peut-être la compagnie d’une certaine Babet, au bonheur de vivre près de moi.
    — Voyons, Lise, répondit Bernard en lui prenant la main, ne soyez pas injuste. Rappelez-vous certaines de vos paroles, à Thias, le jour où nous nous sommes si cruellement querellés. Vous m’avez dit du mariage que l’on vous imposait : « Je ne l’accepte pas, je le subis. » Moi de même, je subis un destin qui m’est dur et contre lequel je ne puis rien. Quant à Babet, vous ne parlez pas sérieusement, mon amie, j’en suis sûr. Du reste, je la vois de moins en moins. »
    Il hésita, puis, regardant sa compagne d’une façon très franche : « Ma sœur a entrepris de me marier. »
    Lise eut un sursaut, elle rougit tandis que Bernard se hâtait de lui expliquer :
    « Je n’y suis guère enclin, cependant il me faut bien m’établir. Dans le commerce, il convient d’avoir une épouse.
    — Non, Bernard, non, dit Lise d’un ton sourd. Non, jamais je n’accepterai ça. Des maîtresses, je vous les passe. Votre Babet, bien ; j’en suis jalouse, tant pis ! Je la supporte. Il existe des besoins, je le sais. Mais une femme, même si vous ne l’épousiez que par raison, une femme qui vivra chaque jour, chaque nuit, chaque heure avec vous ! Votre femme ! Non, non, ne me demandez pas de consentir à cela.
    — Voyons, Lise !
    — Oui, je sais, je suis mariée, moi. Je suis parfaitement injuste. Ça m’est égal ! Vous avez refusé de m’épouser, c’est vous qui m’avez remise entre les bras de Claude. Si vous vouliez une femme, il fallait me prendre, moi, au lieu de pousser le sublime jusqu’à m’apprendre à aimer mon mari. »
    Stupéfait par cette explosion, Bernard était resté sans un mot. Enfin il demanda doucement à Lise de revenir à la raison.
    « La raison ! s’écria-t-elle. La raison ! je m’en moque ! Je ne suis qu’une femme. C’est mon cœur…»
    Baissant la tête, elle poussa un long soupir.
    « Mon cœur ne peut pas se résoudre à oublier le rêve qui l’a tant agité. Pardonnez-moi, mon ami, ajouta-t-elle en le regardant de nouveau. Je suis folle. Oui, je suis folle, je le sais. Je suis plus tyrannique dans mon genre que la Reine. Je n’accepterai jamais que vous apparteniez à une autre, à une seule. Qui est donc cette fille ?
    — Oh ! une jeune personne assez insignifiante, ni belle ni laide, mais tout à fait accomplie.
    — Je la connais ? »
    Bernard répondit qu’il ne le

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