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L'année du volcan

L'année du volcan

Titel: L'année du volcan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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commençait à se populariser, des carottes, des navets et des oignons. Elle jeta un peu de saindouxdans un poêlon, y fit légèrement prendre couleur les légumes, y coupa de longs morceaux de lard, les fit revenir et assaisonna le tout. Peu après elle y ajouta une laitue entière soigneusement lavée et couvrit le tout des petits pois. Enfin une légère jetée de sucre acheva la préparation. Trois quarts d’heure de petit feu sur le potager, et Nicolas s’attablait et se délectait du plat, sous le regard ému de Catherine.
    — Tu vois, dit-elle, il ne faut jamais ajouter de l’eau. C’est l’humide de la salade qui mouille le plat.
    Il vida presque une bouteille de cidre que Catherine tenait à son intention toujours prête dans le frais du caveau. Il s’ensuivit une douce somnolence qui le conduisit à réfléchir aux découvertes de la rue d’Enfer. Sans pour autant exonérer Diego Burgos de toute complicité dans le meurtre du vicomte de Trabard, sa fuite avec le vas-y-dire témoignant d’une étrange conduite, il était en même temps persuadé que les autres acteurs demeuraient suspects. Avait-on voulu désigner le coupable en plaçant les fioles de liqueur d’Hoffmann sous le matelas du secrétaire ? La manœuvre pouvait paraître un peu forcée.
    Il songea ensuite à la mission de la nuit. Il évoqua les deux hypothèses qui remuaient l’opinion à Paris au sujet du Turc, joueur d’échecs. Les uns pensaient que le progrès des sciences conduirait toujours à des avancées de plus en plus extraordinaires et que l’automate était le résultat de découvertes approfondies ; les autres, tourneboulés, en ce siècle de raison, par les excentriques croyances qui touchaient tous les ordres de la société, mettaient le phénomène au bénéfice de la magie. Le peuple, et parfois la noblesse, continuaient d’avoir recours aux devins pour trouverde prétendus trésors. Mesmer, le comte de Saint-Germain, Cagliostro et encore un escroc vénitien, Casanova, qui reparaissait parfois à Paris et qui justement y séjournait depuis quelques semaines, lui semblaient appartenir à cette catégorie d’habiles faiseurs.
    Nicolas, ce cavalier de l’imaginaire, s’en remettait pourtant à la raison et ne pouvait se persuader du caractère mystérieux de l’automate, non plus d’ailleurs que de l’existence d’une machine pensante. Il réfléchit longuement aux moyens de découvrir le secret du joueur d’échecs. Ce n’est qu’en remontant dans ses appartements pour s’apprêter en vue de l’expédition nocturne que la solution, ou du moins la marche à suivre pour y aboutir lui apparut en toute clarté.
    Dix heures sonnaient à Saint-Eustache quand un fiacre de la police s’arrêta rue Montmartre. Nicolas l’entendit depuis l’écurie où il était allé chercher Pluton qui dormait paisiblement entre les pattes de Sémillante. Le brave chien sauta sur Nicolas et lui nettoya le visage à coups de langue, fou de joie de cette sortie inattendue.
     
    Montant dans la voiture, Nicolas remarqua à nouveau l’étrangeté d’un ciel sans étoiles qui semblait recouvrir la ville comme un couvercle. Au Grand Châtelet, Semacgus déjà arrivé devisait avec le père Marie. À la vue de son ami, il agita joyeusement un trousseau de clés.
    — La clé de l’Académie des sciences ! Mais que vois-je, l’ami Pluton est de l’aventure ?
    — Il peut nous être utile, vous connaissez les étonnantes capacités de son flair.
    — Ah ! Je comprends. L’idée est excellente.
    Ils se préparèrent en silence. Lanternes sourdes et quelques outils furent aussi placés dans un panier d’osier.
    — Nous voilà comme des brigands, remarqua Semacgus, hilare. C’est le monde à l’envers !
    Tout au long du trajet qui les conduisit au Louvre, ils demeurèrent silencieux, concentrés sur la mission qu’ils s’étaient eux-mêmes imposée. Pour ne pas attirer l’attention, ils se firent déposer un peu avant le jardin de l’Infante.
    — Bigre ! dit Semacgus qui venait de s’enfoncer dans une masse molle et nauséabonde, l’endroit est sale.
    — Puant et plein d’ordures, à l’accoutumée.
    Il désigna des baraques accolées en désordre tout au long du palais.
    — Il me semblait avoir appris que le roi entendait y mettre bon ordre.
    — C’est vrai, mais il y a des empêchements. Ce pauvre palais est livré à la brigue. Chacun s’entremet pour s’approprier quelques pièces. Il en

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