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L'archer du Roi

L'archer du Roi

Titel: L'archer du Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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désobéissant aux ordres de leur roi qui leur commandait
d’interrompre l’assaut, avaient franchi la rivière et massacré des centaines
d’habitants à l’intérieur de la ville. Robbie ouvrit de grands yeux stupéfaits
devant les vestiges de l’île Saint-Jean, la partie neuve de Caen, celle qui
avait le plus souffert de la mise à sac. Quelques maisons seulement avaient été
reconstruites et des ossements divers, parmi lesquels des côtes, des crânes et
des os longs, apparaissaient à la surface de la boue laissée par la marée
descendante. Les boutiques étaient presque vides, mais quelques paysans
vendaient des vivres exposés sur leur charrette. Thomas acheta du poisson
séché, du pain et du fromage dur comme la pierre. Certains jetaient des regards
méfiants à son arc, mais il affirma aux sourcilleux qu’il était Écossais, et
par conséquent allié de la France.
    — Ils ont de bons arcs en Écosse, n’est-ce pas ?
demanda-t-il à Robbie.
    — Certes oui !
    — Alors pourquoi ne les avez-vous pas utilisés à
Durham ?
    — C’est que nous n’en avons pas assez, expliqua Robbie.
Et surtout, nous préférons vous tuer au corps à corps, vous autres bâtards. Pour
être bien sûrs que vous soyez bien morts, tu comprends ?
    Avisant bouche bée une fille portant un pot à lait, il
annonça sans transition :
    — Je suis amoureux !
    Mais Thomas le fit redescendre incontinent sur terre :
    — Dès que tu vois des tétons tu tombes amoureux. Allez,
viens !
    Ils se rendirent chez messire Guillaume, là où il avait fait
la connaissance d’Eléonore. Le blason aux trois faucons du gentilhomme était
toujours gravé dans la pierre au-dessus de la porte, mais une nouvelle bannière
flottait à présent sur la maison : un drapeau orné d’un sanglier à bosse
muni de grandes défenses.
    Thomas traversa la petite place pour aller quérir des
renseignements auprès d’un tonnelier garnissant de fer les flancs d’un tonneau
à grand renfort de coups de marteau.
    — Quelle est cette bannière ?
    — C’est celle du comte de Coutances, répondit le
tonnelier, et il a déjà augmenté les fermages, ce gredin. Et vous pouvez bien
être à son service, peu me chaut, vous ne me ferez pas clore le bec. (Se
redressant, il fronça les sourcils à la vue de l’arc.) Vous êtes anglais ?
    — Écossais, répondit Thomas.
    — Ah !
    Intrigué, le tonnelier se pencha vers son interlocuteur.
    — C’est-y vrai que vous peignez vos faces en bleu quand
vous vous battez ?
    — Entièrement vrai, répondit Thomas, et même nos culs.
    — Merveilleux ! fit le tonnelier, impressionné.
    — Qu’est-ce qu’il dit ? interrogea Robbie, qui ne
comprenait goutte à ce dialogue en français.
    — Rien, éluda Thomas.
    Puis il désigna du doigt un chêne qui poussait au centre de
la placette. Quelques feuilles recroquevillées étaient toujours accrochées aux
branches.
    — J’ai été pendu à cet arbre, apprit-il à son
compagnon.
    — Oui-da, et moi, je suis le pape d’Avignon, répliqua
Robbie en soulevant son ballot. Tu lui as demandé où nous pourrions acheter des
chevaux ?
    — C’est cher, les chevaux, objecta Thomas, et j’ai
pensé que ce n’était pas la peine d’en acheter.
    — Nous voilà donc devenus de la vulgaire
piétaille ?
    — Comme tu vois, confirma Thomas.
    Ils quittèrent l’île en empruntant le pont sur lequel tant
d’archers avaient péri durant leur assaut furieux et traversèrent la vieille
ville. Il y avait eu là moins de dommages que sur l’île Saint-Jean car nul
n’avait tenté de défendre les étroites ruelles, tandis que le château, qui
n’était pas tombé aux mains des Anglais, n’avait souffert que des boulets
lancés par les bombardes. Ces instruments de guerre n’avaient fait que peu de
dégâts, si ce n’est ébrécher les pierres entourant la porte.
    Une bannière rouge et jaune flottait sur les remparts et des
hommes d’armes portant une livrée de même couleur interpellèrent les deux
compagnons à leur passage. Thomas répondit en expliquant qu’ils étaient des
soldats écossais désireux de se mettre au service du comte de Coutances.
    — Je croyais le trouver ici, mentit le jeune archer,
mais on nous a appris qu’il était à Evecque.
    — Et ça ne le mènera nulle part, répondit le chef des
gardes.
    C’était un barbu portant un heaume fendu, ce qui laissait
supposer qu’il l’avait pris sur un

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