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L'armée perdue

L'armée perdue

Titel: L'armée perdue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Valerio Manfredi
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longue incurie, elles retrouvaient la splendeur du bronze, le scintillement sidéral du fer et de l’argent. Lavés dans l’eau pure des ruisseaux, les cimiers ondoyaient au vent, rouges, bleus, blancs et ocre. Les trompettes annonçant le danger ou rappelant les hommes dans les rangs sonnaient avec une netteté argentine, leur voix redevenue aussi coupante qu’une épée.
    Nous atteignîmes le fond de la vallée un soir, après le couchant. Je me retournai pour jeter un dernier coup d’œil au monde glacé que nous abandonnions. Un instant, j’eus l’impression d’apercevoir un cavalier, une vague silhouette qui se confondait avec le reflet de la neige, un de mes nombreux souvenirs qui refusaient de me laisser…
    Les communautés qui émaillaient ces lieux étaient paisibles, vouées au commerce plus qu’à la guerre, à l’échange plus qu’à l’affrontement.
    Le passage de l’armée suscitait non de la peur et de l’hostilité, mais de l’intérêt, de la curiosité. Une de ces agglomérations, au fond de la vallée, était une véritable ville : elle possédait des maisons en maçonnerie et en bois, une place du marché où l’on pouvait acheter bétail, blé, orge, volailles, œufs et légumes. Le coffre de Sophos devait avoir un double-fond, car je le vis dépenser une grande quantité de dariques d’or, la monnaie de l’Empire sur laquelle figurait Darius le Grand en train de lancer une flèche. Les généraux avaient eux aussi de l’argent perse à leur disposition. L’armée se ravitailla enfin et la nourriture fraîche améliora la condition de chacun.
    Xéno passa beaucoup de temps au marché à recueillir des renseignements, accompagné d’un interprète qui parlait le perse. Il fut invité par le gouverneur de la ville. Bien entendu, des bruits circulaient et les étrangers étaient surveillés. L’hôte de Xéno s’exprimait parfaitement en perse, et l’interprète n’eut aucune difficulté à se faire comprendre.
    Le gouverneur les reçut dans sa demeure, une maison spacieuse pourvue d’un jardin intérieur, où s’affairaient de nombreux serviteurs et servantes en costumes locaux.
    « Il est rare de voir une armée comme la vôtre dans cette ville. Je devine à votre armement et au son de votre langue que vous êtes grecs. Comment êtes-vous arrivés jusqu’ici ?
    — Notre détachement est au service du Grand Roi. Nous nous sommes perdus dans une tempête de neige en altitude, et nous avons failli succomber. Nous devons maintenant trouver le moyen de rejoindre la mer, et j’espère que tu pourras nous y aider. »
    Le noble seigneur fit honneur à son invité, lui servant de la viande rôtie et des œufs de pigeon bouillis dans de l’eau salée. Feignant de croire au mensonge que Xéno lui avait livré, il déclara : « Je serai heureux de vous aider. Avant ce soir, je vous enverrai un guide qui vous indiquera le chemin. Je vous demanderai en échange un petit service.
    — Bien sûr. De quoi s’agit-il ?
    — Mon guide vous le dira. Je tiens à ce que mes invités jouissent d’abord de mon hospitalité, sans songer à une contrepartie. »
    Tel était sans doute l’usage en ces contrées, songea Xéno, qui regagna le campement après le repas et rapporta sa conversation à Sophos. Le guide se présenta en fin d’après-midi. C’était un homme robuste, digne, vêtu et équipé pour une marche en montagne. De toute évidence, il estimait que sa demande ne serait pas rejetée. Il fut reçu dans la tente qui tenait lieu de quartier général, en présence des généraux et des chefs de bataillon.
    « Nous te sommes reconnaissants de nous fournir une aide aussi précieuse, commença Sophos. Nous voudrions connaître avant tout la distance qui nous sépare de la mer.
    — Je vous mènerai en cinq jours en un lieu d’où vous verrez la mer. N’est-ce pas ce que vous désirez ? »
    Ni Sophos, ni les autres généraux, ni même Xéno ne parvinrent à dissimuler l’émotion que ces mots suscitaient en eux. Sophos répondit : « Certainement. Et comment pourrons-nous te récompenser ?
    — Après deux jours de marche, nous pénétrerons sur le territoire d’une tribu ennemie. Ce sont des montagnards féroces et sauvages, qui font fréquemment des incursions sur nos terres, s’adonnant au pillage et au saccage. Je vous demanderai de ravager leur pays, de brûler leurs villages, de prendre tout le butin que vous voudrez, femmes comprises. »
    Lisant sur

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