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L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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avait retrouvé son calme. »
Jesse releva sèchement le châssis d’une fenêtre déjà ouverte, qui gémit, en mal
de jeu.
    Les nuages affluaient, s’accumulaient et, à l’est,
la majeure partie du ciel était gris sale.
    « Ça va être une journée affreusement
chaude », commenta Jesse, et Charley ne put s’empêcher de pronostiquer à
nouveau un après-midi brûlant comme le canon d’un revolver.
    Jesse retira sa redingote en cachemire et Bob
remisa Les Cinq petits Pepper et comment ils grandirent parmi les
magazines afin de se concentrer sur sa cible. Jesse plia avec soin le textile
délicat sur le lit en chêne, puis ôta son gilet noir à six boutons brochés d’extravagants
motifs rouges. Charley se traîna jusqu’à la porte treillissée pour scruter
Lafayette Street.
    Le soleil jouait sur les deux revolvers de
Jesse. Il prit appui sur le rebord de la fenêtre et contempla les météores
capricieux. L’une de ses bretelles était tordue dans le dos de sa chemise
repassée ponctuée de taches de sueur couleur fumée.
    « Je crois que je vais enlever mes
pistolets histoire que les voisins ne les voient pas si jamais je vais dans le
jardin », proclama-t-il comme à l’attention expresse de Bob.
    Charley se retourna sur-le-champ, une
expression troublée sur le visage, et il vit le pouce droit de son frère
tressaillir lorsque Bob abaissa la main vers son arme.
    Jesse déboucla ses deux ceinturons croisés et
disposa avec soin les deux revolvers dépareillés sur le lit, comme en vue d’une
exposition, et Bob eut le sentiment qu’il jouait la comédie : chacun de
ses gestes semblait outré, enjolivé, théâtral, tels ceux d’un piètre acteur
feignant le calme et la nonchalance. Le regard de Jesse se posa sur l’aquarelle
de Skyrocket.
    « Ce tableau est effroyablement
poussiéreux », lâcha-t-il.
    Il prit dans le panier de couture en osier un
plumeau en plumes de paon ornées d’yeux bleus. Il eût sans mal pu dépoussiérer
le cadre debout, mais il approcha la chaise à l’assise en jonc et monta dessus
comme si le plancher était incliné et irrégulier.
    Bob s’écarta à la dérobée du mur afin de
prendre position entre Jesse et ses deux revolvers. Il se dégourdit les doigts
tel un duelliste et fit signe à son frère avec des yeux apeurés tandis qu’au-dessus
d’eux Jesse nettoyait le cadre en noyer. Charley répondit par un clin d’œil et
les deux frères Ford dégainèrent leurs pistolets. Bob fut le plus rapide et
pointait déjà à bout de bras son calibre .44 à la hauteur de son œil droit
alors que Charley levait encore le sien. Jesse dut entendre les trois clics du
Smith & Wesson lorsque le chien s’arma, car il tourna légèrement la tête
avec une surprise sincère et sa main gauche s’aventura en direction d’un
pistolet dont il avait oublié l’absence.
    Puis le .44 de Robert Ford fit feu, un sceau
rouge apparut dans les cheveux châtains du hors-la-loi trois centimètres
derrière son oreille droite et Jesse heurta de l’arcade sourcilière gauche l’aquarelle
sous verre. La poudre et la détonation emplirent la pièce et Jesse geignit
comme on geint dans son sommeil ; puis ses genoux flanchèrent, il tomba à
la renverse, il s’abattit sur le sol, tel un animal gigantesque et sa chute
ébranla toute la maison.
    Il fixa le plafond, ses doigts se plièrent et
se déplièrent, sa bouche tenta d’articuler quelques mots et les deux frères
Ford surent qu’il était sur le point de mourir. Charley sauta dans le jardin
par la fenêtre et, tandis que Zee faisait irruption dans la pièce bleue de
fumée, Bob battit lentement en retraite et passa un pied par l’ouverture.
    « Qu’est-ce que vous avez fait ? »
hurla-t-elle et Bob eut l’air d’un petit garçon qui veut s’excuser mais n’y
parvient pas.
    Zee s’agenouilla en sanglotant : « Jesse,
Jesse, Jesse. » Elle prit dans son giron la tête de son mari et lui plaqua
sur l’oreille droite son jupon qui s’imprégna aussitôt de sang. Derrière la
porte treillissée, Tim assistait à tout ; Bob était toujours baissé sous
le châssis de la fenêtre, bouche bée.
    « Bob, c’est vous qui avez fait ça ?
l’apostropha Zee avec désarroi.
    — Je jure devant Dieu que ce n’est pas
moi », mentit Bob.
    Jesse soupira. Sa tête parut peser plus lourd
sur les genoux de Zee. Ses yeux semblaient jaunes, ses muscles flasques ; la
flaque de sang était large comme une table. Il

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