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L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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dévisagèrent avec un air
accablé, puis le frère de Jesse empoigna deux couvertures à chevaux et s’achemina,
exténué, vers un box vide.
    « Puisque vous semblez partis pour rester
debout toute la nuit, je crois qu’il n’est pas nécessaire que je monte la garde.
    — Tu penses que le shérif est déjà à
notre poursuite à l’heure qu’il est ? s’inquiéta Clarence.
    — En général, c’est le cas. »
    Charley craignit d’avoir froissé Frank par
inadvertance ou de s’être fait du tort, aussi s’approcha-t-il du box la queue
basse et fixa-t-il bêtement le hors-la-loi alors que celui-ci suspendait son
chapeau et se confectionnait un matelas de paille.
    « Ce n’était pas des paroles en l’air, toutes
ces anecdotes sur mon frangin et moi, confessa-t-il. Ce que je me disais, c’est
que si toi et Jesse vous pouviez vous faire une idée de notre courage et de
notre audace, il se pourrait que vous nous admettiez pour de bon au sein de l’écurie
des frères James. »
    Frank décocha un regard farouche à Charley
avant d’étaler l’une des couvertures en laine, qu’il lissa avec sa chaussette.
    « Tu causes comme Bob.
    — Je vais être franc avec toi : c’est
Bob qui a cogité tout ça. Il est plus futé que moi – malin comme un singe, le
frangin. Et il a de grands projets pour la bande des frères James – des projets
tellement compliqués que je n’y entrave pas tout. »
    Frank s’allongea, tout endolori, drapa la
couverture autour de son cardigan et appuya sa tête sur son bras droit.
    « Tu ferais aussi bien de faire une croix
dessus, parce qu’à partir de ce soir, finies les sottises, annonça-t-il. Note-le
dans ton journal : aujourd’hui, sept septembre dix-huit cent
quatre-vingt-un, au déblai de Blue Cut, les frères James ont dévalisé leur
dernier train et mis un terme à leurs équipées nocturnes. »
    Charley passa un bras par-dessus la planche
supérieure du box, déçu et sceptique.
    « Et comment tu gagneras ta vie ? »
    Frank fumait une cigarette, les yeux fermés.
    « Je vendrai des chaussures. »
    Au même moment, assis
autour de la table ronde de la salle à manger, Jesse et Bob attendaient que Zee
déchiffrât l’augure des feuilles de thé vert au fond de leurs tasses. La seule
lumière de la pièce provenait d’une grande chandelle projetant une vague clarté
orange sur le visage attentif des deux hommes tandis que Zee leur faisait part
des instructions d’usage. Ils retournèrent chacun leur tasse et la firent
pivoter trois fois sur elle-même dans le sens des aiguilles d’une montre
pendant que Zee récitait, avec un gloussement : « Dis-moi ma chère, dis-moi
ma belle, quels secrets les feuilles recèlent ? » Puis elle pria Bob
de lui tendre sa tasse et étudia les résidus verts collés dans les profondeurs
ténébreuses de celle-ci.
    « On dirait un serpent. »
    Bob se leva de sa chaise et examina avec
perplexité la tasse que Zee inclina obligeamment vers lui.
    « Cette virgule, là ?
    — Oui, on appelle ça un serpent. Ça
exprime l’antagonisme. »
    Jesse sourit et fit glisser sa tasse en
direction de son épouse.
    « C’est dans Lorna Doone qu’elle
va pêcher tous ces grands mots. »
    Zee jeta un coup d’œil à la tasse de son mari.
    « Le tien ne vaut pas mieux, Dave. »
    Bob adressa un regard interrogateur à l’homme
qui se massait les gencives avec un doigt.
    « Dave ?
    — Tu connais ton catéchisme ? répliqua
Jesse. David est le descendant de Jessé. » Il fit à Bob un clin d’œil dont
le jeune homme ne saisit pas la raison. « On peut dire que c’est mon
pseudonyme. Livre-moi donc ta funeste prophétie, mon cœur. »
    Zee lui rendit sa tasse.
    « On dirait un M. Ça signifie que
quelqu’un a de mauvaises intentions à ton égard. »
    Jesse pencha la chandelle, renversant de la
cire sur la table en chêne, et lorgna dans sa tasse.
    « Ce n’est pas franchement une révélation…
    — Ça manque de gaieté, ce soir, soupira
Zee. J’ai peut-être laissé le thé infuser trop longtemps. »
    Fatiguée, elle se leva et indiqua à Bob et
Jesse qu’elle allait tricoter dans sa chambre, du moins si elle parvenait à
garder les yeux ouverts. Jesse alla jusqu’au garde-manger et sortit deux
havanes d’un pot en stéatite fermé par un bouchon en liège et invita son hôte à
le suivre avec la chandelle sur la véranda, où ils pourraient se balancer dans
des rocking-chairs, fumer et

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