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L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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élever un peu la voix.
    La pluie s’était calmée ; à l’est le ciel
grondait, les rigoles scintillaient dans la rue et quelque part un coq chantait.
Jesse s’installa dans un fauteuil à bascule en hickory et Bob Ford dans son
jumeau. Bob avança son cigare vers la chandelle et constata que de l’eau
dégouttait encore de son pantalon, puis il se carra dans son fauteuil en
soufflant un jet de fumée. Jesse avait coupé l’extrémité de son cigare avec les
dents, mais conservé sa chique contre sa lèvre inférieure, ce qui était censé
induire la somnolence. Il était presque une heure du matin et il songea, à
juste titre, qu’un détachement de volontaires de Kansas City avait dû atteindre
Glendale et débuter l’enquête.
    « Je n’arrive pas à croire que je me suis
réveillé ce matin en me demandant si mon père me prêterait son manteau et que
maintenant, à minuit passé, j’ai attaqué un train, foutu la frousse de leur vie
à des investisseurs de l’Est et que je suis assis dans un rocking-chair à
bavarder avec Jesse James lui-même, s’émerveilla Bob.
    — On vit dans un monde merveilleux »,
commenta Jesse.
    Les joues de Bob se cavèrent comme il tirait
sur son cigare et s’absorbait dans la contemplation du bouton de cendre grise.
    « Avez-vous déjà entendu des hors-la-loi
appeler l’argent de la “braise” ? J’ai lu ça dans un magazine sur les plus
grands hors-la-loi. Rapport à la braise qui fait bouillir la marmite.
    — Je vois.
    — Mais vous n’avez jamais entendu ce
terme ?
    — Je ne peux pas dire que si.
    — Vous savez ce que c’est, mon livre de
chevet ? Les Pilleurs de train ou l’Histoire des frères James de R. W.
Stevens. Si j’en ai passé, des nuits, bouche bée, les yeux comme des soucoupes,
à lire le récit de vos exploits !
    — Ce ne sont que des sornettes, tu sais.
    — Bien sûr que je sais. »
    Jesse réséqua la cendre de son cigare avec son
ongle.
    « Charley prétend que vous avez vécu à
Mount Vernon.
    — Ouaip’. J’ai joué dans le pavillon d’été
de Martha Washington ; j’ai même eu pour jouet la clé en fer de cette
prison, là, la Bastille… Quand Lafayette l’a offerte à George Washington, ni l’un
ni l’autre ne se doutaient que Bob Ford s’en servirait pour enfermer ses sœurs
dans le grenier ! »
    Jesse reluqua Bob.
    « Tu n’es pas obligé de continuer à fumer,
si ça te flanque la nausée. »
    Bob se sentit soulagé. Il tendit le bras
par-dessus la balustrade et laissa tomber dans une flaque le cigare qui chavira,
puis partit à la dérive sous la pluie comme un canoë.
    « J’avais sept ans quand on a déménagé à
Excelsior Springs. Tout le monde parlait des soixante mille dollars en espèces
sonnantes et trébuchantes que la bande des James et des Younger avait volés à
Liberty. Mon oncle Will habitait près de chez vous, vers Kearney. Bill Ford ?
Le mari d’Artella Cummins ?
    — Je le connais.
    — Comme on aimait aller manger chez eux
le dimanche midi et passer l’après-midi à écouter les dernières nouvelles
concernant les frères James ! »
    Jesse fouilla dans ses poches et en ressortit
un pain de camphre qu’il se frotta sur la gorge.
    « Tu sais ce que Charley m’a aussi
raconté ? Il m’a dit que tu avais une boîte à chaussures presque pleine de
trophées à la gloire des frères James. »
    Bob enfouit son ressentiment et son acrimonie
sous un timide sourire trompeur.
    « Ça remonte à quelques années.
    — C’était peut-être Bunny qui avait une
collection comme ça.
    — Vous m’asticotez, pas vrai ? »
    Jesse posa un doigt sur ses lèvres, saisit Bob
par le poignet pour le faire taire et se pencha par-dessus la rambarde de la
véranda pour étudier la composition de la nuit. Puis il se rassit et se balança
patiemment dans son fauteuil dont les patins gémissaient et Bob aperçut un
homme courbé qui remontait la rue en pataugeant dans la boue, une boîte à
sandwich à la main. Il s’agissait de Charles Dyerr, prote adjoint de l’agence
de presse Western Newspaper Union et voisin d’un homme connu sous le nom de J. T.
Jackson. Dyerr expliqua plus tard qu’il n’avait que rarement vu Jackson occuper
un emploi rémunéré et en avait déduit que ce devait être un joueur – le genre
de personne pour qui Dyerr n’avait que le plus profond mépris.
    « Bonsoir, Chas ! » lança Jesse.
    Dyerr jeta un coup d’œil à la véranda et

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