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L'avers et le revers

L'avers et le revers

Titel: L'avers et le revers Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Olivier Merle
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chacun muré en de
tristeuses pensées, les miennes étant assurément les plus sombres, car se
dissipait vers le ciel l’espoir ténu que j’avais jusque-là conservé en mon
cœur. Et de la route nous allions nous écarter pour reprendre le sentier du
retour quand mon maître, sans apparente raison, avisant un paysan courbé en son
champ et creusant son sillon à la bêche, détourna sa monture et s’approcha de
lui. Parvenu à la haie, il le héla sans rudesse.
    — Holà, mon brave ! De quelques renseignements
sommes en nécessité, saurais-tu nous répondre ?
    L’homme se redressa et, tout esbahi de découvrir face à lui
quatre cavaliers dont deux assez richement vêtus et d’un noble maintien, enleva
incontinent son chapeau à large bord qui le protégeait du soleil.
    — Mais que peux-je savoir, Moussu ? répondit-il.
    — Nous cherchons Margot, la connais-tu ?
    — La Margot de la Malonie, la fille de Jehan ?
    — Oui, la fille de Jehan et de Marie. Adonc, comme tous
ici, tu la connais… Et où étais-tu avant-hier, jour du marché au village ?
    — Ici même, Moussu, en même place et même labeur !
    — Et la Margot, ce jour-là, l’as-tu vue ?
    — Oui-da, Moussu.
    Est-il besoin, lecteur, de vous conter et la tension que
cette tant courte réponse répandit parmi nous et l’émoi d’apprendre tout
soudain que la Margot n’avait été ni forcée ni occis sur le sentier menant à la
vallée, laquelle vallée elle avait bien atteinte, mais que pourtant elle
n’était point parvenue au village, lors qu’il n’y a plus grand péril de ci à
là, même pour une jolie garce marchant seule à l’aventure.
    — Et lui as-tu parlé ? reprit mon maître.
    — Que non pas, Moussu, j’étais en haut du champ, mais
je l’ai vue descendre du sentier et prendre le chemin.
    — En es-tu bien certain que c’était elle ?
    — À marcher comme ça en balançant les hanches, il n’y
en a pas deux, Moussu !
    Et ceci, bien à la vérité, suffit à nous convaincre que le
bonhomme avait aperçu notre Margot ce jour-là ! Or, du champ, le regard
portait loin vers l’est, et jusqu’à l’embranchement de la courte montée qui
menait au village.
    — Et tu l’as suivie des yeux ? fit mon maître.
    — C’est que, répondit l’autre, le rouge lui chauffant
un peu les oreilles, elle est bien mignonnette à regarder, la Margot…
    — Jusqu’à la croisée là-bas, où elle a pris la
direction du village ?
    — Non pas, Moussu. Un chariot s’est arrêté et l’a
prise.
    — Quoi ! cria mon maître, faisant sursauter notre
bonhomme. Un chariot l’a chargée, dis-tu ! Et lequel chariot a tourné à
sénestre, à la croisée, pour se rendre à Taniès ?
    — Ça, je pourrais point dire, Moussu. J’avais plus rien
à regarder et fallait que le travail avance.
    — Eh bien, moi, reprit mon maître, je sais que ce
chariot jamais n’est allé à Taniès.
    — Peut-être bien, Moussu, je peux point dire.
    Mon maître considéra le paysan avec attention à tel point
que celui-ci, gêné par un regard tant inquisiteur, finit par paupières baisser,
soulevant ses sabots et les frappant l’un l’autre pour en enlever la glaise
collante qui tombait par paquets.
    — Et ce chariot, saurais-tu nous le décrire ?
demanda mon maître à la parfin.
    — Pas grande nécessité de le décrire, Moussu, je sais
bien à qui il appartient.
    — Tudieu ! s’écria mon maître, et à qui
donc ?
    — C’est un drapier de Sarlat qui vient une fois le mois
au village. Ma cousine, qui est couturière, traite avec lui pour les toiles et
les étoffes.
    — Son nom ?
    — Delacombe, Moussu.
    — Et il loge en Sarlat, dis-tu ?
    — À ce que j’en sais, oui-da.
    Remerciant le paysan, lequel reposa sur le chef son chapeau
à large bord et sans plus attendre se remit au labeur, mon maître se tourna vers
nous, vif et alerte, le teint tant revigoré que j’eus fiance en son espoir.
    — C’est en Sarlat que nous en apprendrons plus, il faut
retrouver ce Delacombe ! Hardi, compagnons, éperonnons nos montures,
soulevons la terre, il nous faut avant ce soir être en la cité !
    Et gaillardement, piquant le galop, nous arpentâmes derechef
le sentier vers Mespech afin que de rejoindre la route menant à Sarlat, mon
maître et Samson en tête, moi ensuite qui tentais, vaille que vaille, de suivre
ce rythme, et Jonas en queue, pour ce que son cheval avait la plus lourde
charge et pour

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