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Le Bal Des Maudits - T 1

Le Bal Des Maudits - T 1

Titel: Le Bal Des Maudits - T 1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Irwin Shaw
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assurée.
    –  C’est compliqué, dit-il.
    Ses mains esquissèrent un geste vague.
    –  Si vous saviez à quel point c’est compliqué ! Je suis très heureux vraiment…
    Elle était si pauvre, si jeune, si frêle, si courageuse, si seule, si proche de lui… Il tendit les mains, à l’aveuglette, et lui prit délicatement la tête et l’embrassa.
    Ses lèvres étaient douces et fermes et un peu humides, à cause du brouillard.
    Puis elle le gifla. La gifle résonna sous les marches de pierre. Sa joue était endolorie. « Comme elle est forte, pensa-il, étourdi, sous ses apparences fragiles. »
    –  Pourquoi, demanda-t-elle froidement, vous êtes-vous cru autorisé à m’embrasser ?
    –  Je… je ne sais pas, dit-il, en portant sa main à son visage pour en atténuer la brûlure, et l’abaissant aussitôt, honteux de ce moment de faiblesse. Je… je l’ai fait… comme ça .
    –  Faites ça avec toutes celles que vous connaissez, dit-elle d’un ton sec. Mais pas avec moi.
    –  Je ne fais pas ça avec d’autres, dit misérablement Noah.
    –  Rien qu’avec moi ? Très flattée, dit Hope. Je regrette de vous avoir paru aussi facile.
    –  Oh non ! protesta Noah, éperdu, ce n’est pas ce que je voulais dire.
    « Seigneur, pensait-il, comment pourrais-je lui expliquer ce que je ressens. Maintenant, elle me prend pour un satyre de coin de rue, toujours prêt à attraper les filles qui veulent bien se laisser faire. » Il lutta avec sa gorge verrouillée ; la langue anglaise se coagulait dans son larynx.
    –  Oh, dit-il d’une voix faible, je suis désolé…
    –  Je suppose, coupa la jeune fille, que vous vous trouvez si merveilleusement séduisant, si brillant, si supérieur que toutes les filles doivent vous tomber dans les bras et se laisser peloter sans rien dire…
    –  Oh, mon Dieu !
    Il battit en retraite et faillit trébucher contre les deux marches de béton qui descendaient de la cour cimentée.
    –  Jamais de ma vie, continua la jeune fille, je n’ai rencontré de jeune homme aussi arrogant, injuste et imbu de soi-même que vous.
    –  Arrêtez… grogna Noah. Je ne puis le supporter.
    –  Je vous souhaite le bonsoir, dit la jeune fille d’un ton mordant, monsieur Ackermann.
    –  Oh, non ! chuchota-t-il. Pas maintenant.
    Elle repoussa la porte métallique, d’un geste décidé , et les gonds grincèrent à ses oreilles.
    –  Je vous en prie, implora-il. Écoutez-moi…
    –  Bonne nuit.
    D’un seul coup, la grille les sépara. La serrure claqua. Elle ne se retourna pas, mais ouvrit la porte de bois qui donnait accès à la maison et entra. Noah regarda stupidement les deux portes, la porte de bois et la grille de fer, tourna bride et reprit le chemin de la rue.
    Il parcourut une trentaine de mètres, son chapeau toujours à la main, sans s’apercevoir que la pluie s’était remise à tomber et que ses cheveux commençaient à pendre sur son front, en mèches détrempées. Il s’arrêta, regarda autour de lui, mal à l’aise, et revint sur ses pas. Une lumière brillait, derrière la fenêtre grillagée du rez-de-chaussée, et, même à travers les rideaux tirés, il pouvait voir une ombre se déplacer à l’intérieur.
    Il s’approcha de la fenêtre, respira profondément et frappa au carreau. Au bout d’un instant, le rideau fut tiré de côté, et il distingua le visage de la jeune fille. Il tenta de lui faire comprendre, par gestes, qu’il voulait lui parler. Elle secoua la tête, d’un air irrité, et lui fit signe de partir, mais il se mit à crier, très fort, les lèvres proches de la fenêtre :
    –  Ouvrez la porte. Il faut que je vous parle. Je suis perdu. Perdu. Perdu !
    Il vit qu’elle le regardait d’un air dubitatif, à travers la vitre sillonnée de traits de pluie. Puis elle sourit et disparut. Un instant plus tard, il entendit s’ouvrir la porte intérieure, et bientôt, il la vit apparaître, derrière la grille. Involontairement, il soupira.
    –  Ah, dit-il. Je suis si content de vous voir.
    –  Vous ne reconnaissez pas le chemin ? demanda-t-elle.
    –  Je suis perdu, dit-il. Personne ne me trouvera plus jamais.
    Elle s’esclaffa.
    –  Vous êtes un grand idiot, n’est-ce pas ? dit-elle.
    –  Oui, admit-il avec humilité.
    –  Eh bien, dit-elle sérieusement, de l’autre côté de la grille fermée, vous prenez à gauche et vous retournez jusqu’à la station de tramway et vous prenez celui qui vient

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