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Le Baptême de Judas

Le Baptême de Judas

Titel: Le Baptême de Judas Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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je restai longtemps allongé, à demi conscient, couvert d’une sueur froide à l’odeur aigre, l’air s’insinuant peu à peu dans mes poumons. Sur mon épaule gauche, la marque apposée par Métatron brûlait comme un fer rougi au feu.
    Je souris dans le noir. Puis je me mis à rire à gorge déployée et à pleurer tout à la fois. J’avais prié. J’y avais mis tout mon cœur. Et j’étais encore vivant. L’Archange n’était apparu que pour me ramener en enfer. Ton corps te rappellera tes fautes et te refusera tout ce qui est divin , avait-il dit. Ne venais-je pas de le démentir ? Avais-je enfin trouvé la voie de la rédemption ?
    — Ha ! dis-je avec un mince filet de voix. Maudit châtron malplaisant ! Que dis-tu de ça ?
    Plus calme que je ne m’étais senti depuis des années, je me laissai couler lentement dans le sommeil en songeant que, dans quelques jours tout au plus, le sort de mon âme se jouerait. Je ne savais pas si Dieu, qui pouvait être impitoyable, avait daigné entendre ma prière, mais je concevais un certain espoir à l’idée qu’il ne m’avait pas châtié.
    À l’aube, dans les premières lueurs du soleil, je me préparai puis sortis pour aller quérir Sauvage à l’écurie. J’aurais donné cher pour sentir Memento rebondir sur ma cuisse au lieu de l’arme anonyme dont je devais me contenter. À l’écurie, je trouvai Eudes, Ugolin, Roger Bernard et Odon qui tenaient leurs montures par les rênes, leurs vêtements de croisés cachés dans les sacs de leur selle.
    —    Te voilà ! s’écria Ugolin, un sourire taquin sur les lèvres. Je commençais à croire que tu avais changé d’idée.
    —    Si tu savais combien je n’en ai pas la liberté, répondis-je en le rejoignant.
    —    Tu sais, je réfléchissais et.
    —    Et ?
    —    Tu crois que, si nous arrivons à nous emparer de Montfort, nous sommes obligés de le rendre au complet en échange de Cécile ?
    —    Que veux-tu dire ? demandai-je avec le sourire.
    —    Eh bien. Nous pourrions peut-être garder quelques morceaux ? Ses génitoires, par exemple ? Je me verrais bien avec ses bijoux desséchés accrochés à mon ceinturon. Et puis, s’il en était privé, peut-être serait-il moins féroce ?
    —    On peut toujours rêver, mon gros. Nous verrons. Personnellement, je n’ai aucune objection, mais il faut d’abord l’attraper.
    Nous sortîmes de l’écurie pour nous rendre à la porte de la forteresse. Là, une scène tristement familière se reproduisit. Pernelle se tenait devant les portes, comme elle l’avait fait lorsque j’avais quitté Montségur pour Toulouse. Elle avait le même air éperdu et déchiré. Ses sentiments sans doute décuplés par le fait que son fils la quittait pour affronter le danger avec nous. Je pouvais aisément comprendre son tourment. La chair de sa chair, qu’elle avait crue perdue, risquait de ne jamais lui revenir. L’enfant qu’elle n’avait pas vu grandir était presque un homme et elle n’avait pu en profiter. Mais Odon était aussi têtu que sa mère et bien décidé à jouer son rôle. De plus, il était désormais lié par le serment des Neuf. Sa vie ne lui appartenait plus. Et puis, nous avions besoin de lui et personne n’avait même songé à le laisser derrière. Pernelle n’ignorait rien de cela et c’était ce qui lui arrachait le cœur.
    Toute menue, les lèvres tremblantes, chiffonnant sa robe noire, elle contourna Sauvage pour venir me retrouver. Elle posa sur moi ses grands yeux remplis de larmes que je ne connaissais que trop bien et qui me perçaient les entrailles plus cruellement qu’un carreau d’arbalète. Je m’attendais à être vertement apostrophé et à devoir soit calmer ma pauvre amie, soit la chasser comme jadis, mais elle me surprit.
    —    Gondemar, dit-elle avec douceur en posant la main sur mon bras, je sais que vous devez partir. Je ne m’y oppose pas. Je n’en ai pas le droit. La Vérité doit être préservée coûte que coûte et nous avons tous prononcé le même serment. Et puis, il y a cette pauvre Cécile. Mais.
    Son regard glissa sur Odon, qui se tenait à l’arrière du groupe, aux côtés d’Ugolin qui semblait l’avoir pris sous son aile.
    —    Odon... poursuivit-elle en ravalant des sanglots, sans quitter son fils des yeux. Le pauvre petit n’est même pas encore tout à fait un homme. Je sais que votre mission passe avant tout le reste et que rien ne doit vous en

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