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Le Baptême de Judas

Le Baptême de Judas

Titel: Le Baptême de Judas Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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cheveux châtains qui lui tombait sur la joue. Pourquoi as-tu changé de camp ? Tu es bien chrétien de naissance, non ?
    —    Baptisé par le prêtre de mon village, confirmai-je. Le vieux père Prelou.
    —    Alors ?
    —    C’est. une très longue histoire, dis-je vaguement. Disons simplement que la vie a exigé que je remette ma foi en question.
    —    Tu es bien mystérieux. L’outre est pleine. Tu as quelques heures devant toi pour me raconter cela. Pourquoi risquer ta vie pour quelques vieux papiers ? Le monde serait certainement plus paisible s’ils n’existaient pas. Faut-il vraiment que ce qui s’est passé en Terre sainte voilà douze siècles soit préservé ?
    Contre toute attente, l’homme m’était sympathique, mais que pouvais-je lui dire ? Je n’allais quand même pas lui révéler qu’on m’avait confié une mission lors de mon passage en enfer, après que j’eus été décapité par Onfroi. Qu’il était assis en face d’un damné. Il me croirait fou.
    J’avais le sentiment agaçant que Guillaume des Barres méritait mieux qu’un mensonge. J’avalai quelques gorgées pour me donner une contenance. Providentiellement, le soldat choisit ce moment pour revenir auprès de nous et poser devant moi un plat de lapin rôti et de pain frais, ainsi qu’une couverture de laine rêche. Je mordis la viande à pleines dents et avalai quelques bouchées avant de reprendre la conversation.
    —    Si je te confiais mes raisons, tu ne me croirais pas, je te l’assure, finis-je par répondre. L’homme que j’étais avant de descendre dans le Sud n’avait que faire de la Vérité. Qu’il te suffise de savoir que je ne l’ai pas fait par choix, mais par obligation.
    —    Dommage que tu sois si discret. Je suis certain que l’histoire vaut la peine d’être entendue, dit des Barres.
    —    Tu n’as même pas idée à quel point. Mais plus rien de tout cela n’a d’importance, maintenant. La seconde part de la Vérité est attachée à la selle de ton cheval et je n’ai d’autre choix que de livrer la première à ton demi-frère. Bientôt, il aura vaincu sur toute la ligne.
    —    Tu lui auras tout de même donné la satisfaction d’une belle bataille.
    —    Une bataille perdante.
    —    Mais honorable.
    Je renâclai de dépit et levai mon gobelet.
    —    Aux batailles honorables et aux vaincus, alors.
    Il le frappa du sien et nous bûmes en souriant.
    —    Tu connais le contenu de ces documents ? demandai-je à brûle-pourpoint.
    Il se contenta d’un sourire en coin pendant qu’il observait le vin qu’il faisait tourner dans son gobelet.
    —    J’ai vu le suaire. Quant au reste, on m’en a résumé le contenu.
    —    Alors tu sais que l’Église chrétienne n’est qu’une fraude.
    —    Oui, dit-il, songeur, sans relever la tête. J’ai toujours senti qu’il y avait quelque chose de faisandé dans cette croisade. L’hérésie n’était qu’un prétexte pour retrouver la Vérité. Ça crevait les yeux.
    —    Et pourtant, tu mets ton arme au service d’Innocent. Tu m’as l’air d’un homme d’honneur. Je ne suis pas en posture de te juger, je le concède, mais je ne te comprends pas. Comment peux-tu concilier les deux ?
    Il passa les doigts dans ses cheveux. Le geste trahissait un malaise qui me le fit estimer encore plus.
    —    Je suppose que chacun doit savoir où se trouve son intérêt et ignorer ce qui lui déplaît.
    —    Ton demi-frère est l’homme de confiance de Sa Sainteté et la croisade a été pour lui l’occasion de se faire remarquer. Comme te voilà porteur de la seconde part, un peu de son influence rejaillira certainement sur toi. Sans compter les terres et les richesses, ironisai-je.
    —    Les refuserais-tu, toi ?
    —    Dans ta situation ? Je suppose que non. Mais si les dernières années m’ont appris quelque chose, c’est que les possessions matérielles ont la fâcheuse habitude de glisser entre les doigts de ceux qui les détiennent. Tu parles à un homme qui a tout perdu.
    —    Faux. Il te reste ton honneur, à toi aussi.
    —    C’est une question de perspective. Mais j’ai gagné une conscience, et je ne suis pas certain d’en être heureux.
    Guillaume me toisa, intrigué, mais ne dit rien. Je mangeai un peu, songeur. Avais-je toujours mon honneur, moi qui devrais sans doute trahir la cause pour laquelle on m’avait rendu la vie ? À part

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