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Le Baptême de Judas

Le Baptême de Judas

Titel: Le Baptême de Judas Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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couverture pour toi, dit-elle en la mettant dans ma main saine.
    Je la dépliai et m’en enveloppai. En ces premiers jours d’avril, les nuits étaient encore fraîches et la vieille capeline ne m’offrait guère de réconfort.
    —    Gracieuseté de ton nouvel ami, le comte de Chalons, ajouta Ugolin.
    Je saisis sans mal l’amertume qui perçait dans sa voix.
    —    Il n’est pas mon ami, rétorquai-je, un peu piqué par l’allusion. Loin de là. Mais pour un Montfort, j’avoue qu’il est un gentilhomme.
    —    Un serpent venimeux peut avoir d’agréables couleurs.
    —    Montbard m’a souvent répété qu’il valait mieux avoir son ennemi près de soi. Ainsi, au moins, on peut le garder à l’œil et savoir ce qu’il fait.
    —    Il en va de même pour lui, me prévint le Minervois. Rappelle-toi comment la femmelette t’a mené par le bout du nez. Ces maudits Montfort sont rusés et vicieux.
    —    Et sadiques, murmura Pernelle.
    Je tendis la main, trouvai celle de mon amie et la serrai dans le noir avec toute la tendresse dont j’étais capable, ce qui était bien peu. De toute manière, les mots et les regards eussent été inutiles. Je savais pertinemment à quoi elle faisait allusion, et Ugolin de même. Il ne se passait pas une journée sans que je revoie en esprit les outrages que cette maudite chiure de Raynal lui avait fait subir sur l’ordre de Simon de Montfort. Tout cela sans que je puisse intervenir, malgré mes belles promesses. C’était plutôt Bertrand de Montbard qui, même à l’agonie, s’était sacrifié pour qu’elle vive. Cela, je ne l’oublierais jamais. Certes, j’avais exercé une vengeance cruelle sur Raynal, mais j’étais le seul à en avoir joui. Montfort, toutefois, figurait toujours au haut de ma liste et si Dieu me prêtait vie assez longtemps, il me le paierait chèrement, soit en personne, soit par ceux qui lui étaient chers.
    —    Comment te sens-tu, Ugolin ? m’enquis-je, autant par inquiétude pour mon ami que pour dissiper le malaise que j’éprouvais.
    —    Beaucoup mieux, grâce à dame Pernelle. J’ai la peau du dos aussi raide que du cuir, mais ça ira.
    —    Maintenant, dis-moi la vérité.
    —    Ça fait un mal de chien dès que je me tourne, mais ça guérit, admit-il, contrarié. Assurément, la bataille ne m’a pas fait de bien, mais, pardieu, elle valait chaque pincement !
    —    Pernelle ?
    —    Il dit vrai. Il se porte bien. J’ai examiné ses plaies tantôt et, à part une, toutes sont restées bien fermées.
    Je sentis la main de Pernelle qui quittait la mienne, puis y déposait quelque chose.
    —    Mange, dit-elle. Nous t’avons gardé une part de pain et de fromage.
    —    C’est tout ce que ces mécréants nous ont donné, se lamenta le Minervois.
    —    Je te promets que si nous finissons par nous en sortir, je te laisserai manger le gros Guillot.
    —    Au complet ? Bougre. Je crois qu’il me faudrait au moins deux repas. Et puis, tu sais, moi, le lard.
    Nous nous esclaffâmes et goûtâmes le simple plaisir d’être à nouveau ensemble et de blaguer ainsi.
    —    Parlant de nous en sortir, il y a du nouveau ? s’enquit Pernelle après quelques instants.
    À voix basse, je pus enfin leur parler du mystérieux étranger. Je racontai en essayant de ne rien omettre, d’abord notre première rencontre lorsque les templiers avaient revendiqué le chemin, puis la façon dont il avait surgi pendant l’embuscade. Ils m’écoutèrent sans m’interrompre. Même dans le noir, je pouvais sans peine imaginer leur expression stupéfaite.
    —    En tout cas, il est rusé, dit Ugolin lorsque j’eus terminé. J’avais bien aperçu cette petite collision, au passage des templiers, mais je n’ai pas remarqué qu’on te remettait quoi que ce soit.
    —    Tout le monde n’y a vu que du feu. Il est aussi vif qu’un magicien.
    —    Et tu ne sais vraiment pas qui il est ? s’enquit Pernelle.
    —    Que je sois changé en cochon et rôti sur la broche si j’en ai la moindre idée. Je ne l’avais jamais vu avant qu’il me tombe dans les bras.
    —    Lui, en tout cas, semble en savoir long, reprit mon amie, perplexe.
    —    Et ni des Barres, ni Pierrepont ne semblent savoir qui il est ? ajouta Ugolin.
    —    S’ils le savent, ils donnent bien le change.
    —    Alors, foutre de Dieu, d’où sort-il et que vient-il faire dans cette

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