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Le Baptême de Judas

Le Baptême de Judas

Titel: Le Baptême de Judas Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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l’entre-cuisse étroit et la langue agile, selon votre bon plaisir. Et pour un léger supplément, je ne suis pas opposée à jouer au petit garçon.
    —    Passe ton chemin, répondis-je en désignant nos fers. Les friandises que tu offres sont bien aguichantes, mais les prisonniers n’y ont pas droit.
    La petite baissa la tête et joua avec la poussière au sol du bout de son orteil, dans une attitude de séduction étudiée, à mi-chemin entre la femme et l’enfant. Puis elle releva les yeux et les posa sur Ugolin.
    —    Voilà qui est fort dommage, dit-elle en battant des cils. Je n’aurais certes pas fait de mal à celui-là.
    Elle s’accroupit près du Minervois et fit remonter lentement la main le long de sa cuisse.
    —    Je te ferai un petit plaisir pour quelque chose à manger, minauda-t-elle. Je sais y faire, je te l’assure.
    Pernelle se releva d’un coup, empoigna la chevelure de la putain et la remit cruellement debout avant de l’apostropher vertement.
    —    Mon ami est cathare et l’impureté ne l’intéresse pas ! Allez, ouste ! Va offrir ton cul à d’autres, garce !
    —    Je ne suis pas certaine qu’il en pense la même chose, rétorqua la petite. N’est-ce pas, mon gros, que tu aimerais me lutiner un peu ?
    Elle releva sa jupe et se passa la main entre les cuisses.
    —    Euh. Non. non merci, balbutia le Minervois.
    —    J’espère bien être ici quelques heures, dit-elle. Si jamais tu changes d’idée.
    Elle tourna les talons et se dirigea vers un groupe de soldats non loin de nous. Quelques instants plus tard, elle en entraînait deux dans un buisson.
    —    Deux ! Pfffff ! En tout cas, personne ne pourra jamais lui reprocher de ne pas être entreprenante, dit Pernelle, une moue réprobatrice sur les lèvres. Dieu seul sait quels maux se terrent dans son féminage. N’est-ce pas, Ugolin ?
    Le Minervois avait toujours les yeux fixés sur l’endroit où s’était tenue la puterelle.
    —    Ugolin ? insista Pernelle.
    Il sursauta, tiré de sa rêverie.
    —    Quoi ? Euh, oui, bien sûr, dame Pernelle, fit-il.
    Un peu plus tard, un soldat nous apporta trois bols remplis d’une bouillie de chou à l’odeur plus que suspecte. Je pris le mien, le reniflai et le posai sur le sol.
    —    Quoi ? Avec tous ces marchands qui troquent des choses fraîches, on ne nous donne que ce brouet tout juste bon pour les cochons ? m’enquis-je avec un sourire narquois. Tu peux certainement faire mieux.
    —    Les ordres de sire Guillaume sont que ceux qui ont de quoi payer peuvent acheter ce que bon leur semble. Tu as de l’argent ?
    —    Tu sais bien que non.
    —    Alors mange ce qu’on te donne ou prive-toi. Ça m’est égal.
    Le soldat s’assit un peu en retrait et se mit à déguster un pain
    frais et un morceau de viande séchée, arrosant le tout de vin. Malgré moi, je l’observai, en essayant en vain d’empêcher mon estomac de crier. Pernelle ne toucha pas non plus à la bouillie. Mais rien ne pouvait venir à bout de l’appétit d’Ugolin, qui passa à travers sa portion en moins de temps qu’il ne faut pour roter avant de s’emparer des nôtres.
    Une demi-heure plus tard, il était malade comme un chien.
    —    Corne de diable, le ventre va me fendre, gémit-il, les mains sur l’abdomen.
    —    Tu n’aurais pas dû manger cette saloperie, lui reprochai-je.
    —    Je crois bien que je vais chier dans mes braies.
    —    Hé, toi, interpellai-je urgemment notre gardien. Le gros a un besoin !
    —    Et alors ? rétorqua-t-il avec arrogance.
    —    Alors, bougre de simplet, gronda le Minervois, à moins que tu ne souhaites passer la nuit à humer mon fumet, tu serais bien avisé de me permettre de m’éloigner un peu.
    Comme s’il désirait appuyer ses dires, Ugolin émit un pet tonitruant dont la légère brise ramena l’odeur malodorante vers nous. Même Pernelle, pourtant habituée à ce genre de choses, ne put s’empêcher de plisser le nez en agitant la main devant son visage.
    —    Pouah ! s’écria le soldat, horrifié. Tu te corromps de l’intérieur ou quoi ?
    Il se leva d’un trait, toute arrogance disparue, et détacha le fer qui enserrait la cheville d’Ugolin. Puis il l’entraîna avec lui jusqu’à l’orée des bois. Une fois là, je le vis attacher une des extrémités de la chaîne à une branche basse avant de s’écarter en secouant la tête, maudissant sans

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