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Le Baptême de Judas

Le Baptême de Judas

Titel: Le Baptême de Judas Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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coups d’atrocités et il n’en était pas digne.
    —    Je n’en doute pas, répondit des Barres.
    Tour à tour, l’homme salua élégamment Guy, Guiburge, Pierrepont et Thury, mais il ignora Guillot. Le visage du moine s’empourpra devant ce nouveau camouflet, mais je fus le seul à le remarquer. Puis l’officier me désigna de la tête.
    —    C’est lui ? s’assura-t-il en avisant mes fers.
    —    Oui, confirma des Barres.
    —    Bien, veuillez me suivre.
    Guillaume descendit de sa monture et détacha la cassette qui était fixée à sa selle depuis qu’il avait rejoint le convoi. Il la prit sous le bras et attendit, sans doute pressé de la livrer. Les trois autres hommes s’approchèrent de moi et firent mine de m’empoigner pour me faire descendre de cheval, mais le regard que je leur adressai les en dissuada. Je mis pied à terre sans aide puis, d’un geste de la main, leur indiquai qu’ils étaient les bienvenus s’ils désiraient m’encadrer. Soucieux de ne pas déroger aux ordres et de protéger la peau de leurs fesses, ils me fouillèrent consciencieusement, palpant mes membres et les recoins les plus intimes de ma carcasse à la recherche d’une arme quelconque. Tenant mon irritation en laisse, je les laissai faire. Lorsqu’ils furent satisfaits, l’officier nous conduisit vers le bâtiment, suivi de Guillaume et des autres. Derechef, Guillot fut ignoré et dut se contenter de suivre piteusement derrière, tel un chiot à la remorque de son maître. Quant à moi, je marchais à leur suite, les trois autres soldats m’escortant avec prudence.
    L’officier frappa à la porte et le guichet fut aussitôt glissé, laissant paraître une paire d’yeux méfiants. Un mot de passe fut échangé et on ouvrit. Nous entrâmes et fûmes guidés d’un pas rapide dans une enfilade de couloirs. L’intérieur de la demeure était sombre, frais et luxueux. La plupart des murs étaient ornés de lourdes et somptueuses tapisseries. Elles étaient savamment exécutées dans les tons de rouge, de jaune, de vert, de bleu et d’ocre qui coupaient la fraîcheur de la pierre tout en créant une impression accueillante. Elles montraient des scènes religieuses et champêtres d’un temps pas si lointain, avant que l’horreur n’envahisse les terres du Sud.
    Nous aboutîmes devant une lourde porte ferrée à laquelle l’officier frappa trois coups et qui s’entrouvrit. Il se posta sur le seuil, mais n’entra pas.
    —    Qui va là ? s’enquit une sentinelle.
    —    Monsieur le comte de Chalons, sire, annonça notre guide.
    —    Qu’attends-tu, bougre d’incapable ? tonna une voix profonde que je connaissais trop bien. Fais-le entrer !
    L’homme ouvrit la porte sur toute sa grandeur et s’écarta pour nous céder le passage. Je pus lire sur son visage l’irritation que lui causait le traitement qu’il subissait aux mains de son seigneur, mais aussi la résignation de celui qui n’a d’autre choix que d’endurer.
    Je me retrouvai dans la salle comtale du château, là où le seigneur des lieux tenait audience. Les murs étaient décorés de magnifiques fresques peintes par une main très habile. L’une d’elles évoquait un furieux combat de cavalerie entre des chevaliers francs et des hommes étrangement vêtus et armés d’épées à la lame large et recourbée, que je devinai être des Sarrasins. Une scène de la croisade en Terre sainte, semblable à celles qu’avait vécues Bertrand de Montbard. L’arme brandie, le visage déformé par la luxure de la bataille, le personnage central ne pouvait être qu’un des vicomtes Trencavel, qui avaient fait construire le château. Je songeai que, maintenant qu’il était en possession du château, Montfort devait avoir l’impression que ses anciens propriétaires le narguaient quotidiennement à travers cette fresque et je m’étonnai qu’il ne l’ait pas fait effacer.
    Mais je n’eus pas le temps d’admirer les autres œuvres, car nos regards se croisèrent. Il était assis au fond de la fastueuse salle, sur un fauteuil de bois ouvragé juché sur une estrade haute de trois marches et qui tenait bien plus du trône que de la simple chaise. De chaque côté, des braseros remplis de braises rouges le gardaient au chaud. Les mains posées à plat sur les bras du meuble, ses jambes puissantes écartées, la tête au port altier, il me toisait sans essayer de masquer son sentiment de triomphe. Je le regardai avec

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