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Le Baptême de Judas

Le Baptême de Judas

Titel: Le Baptême de Judas Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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brandir la dague pour l’accueillir, mais sa main enserra fermement mon poignet pour l’écarter pendant qu’il me tombait sur la poitrine. Le souffle à moitié coupé, je parai de mon mieux les coups de poing répétés qu’il m’abattait sur le visage, ma maudite senestre n’était pas apte à répliquer pareillement. En désespoir de cause, je lui enfonçai les jointures de mes doigts dans les yeux. Véran grogna, mais maintint sa prise sur mon poignet. Profitant de son aveuglement momentané, je relevai les genoux dans son dos. Poussé vers l’avant, il se retrouva allongé de tout son long sur moi. Jetant toute dignité aux orties, je lui mordis l’oreille. Je sentis qu’un morceau s’en détachait et le cri d’agonie qui suivit me le confirma. Sous le coup de la douleur, Véran relâcha malgré lui sa prise et j’en profitai pour dégager mon bras droit. Prenant appui contre le sol, je pivotai sur moi-même et le fis rouler sous moi.
    À cheval sur sa poitrine, je lui appuyai la lame sur la gorge et, à mon grand étonnement, il cessa de résister. Toute volonté de lutter semblait l’avoir abandonné. Son corps se détendit et il plongea ses petits yeux sombres dans les miens. Je crachai le bout d’oreille sur le sol.
    Nous restâmes longtemps ainsi, haletants, à nous dévisager. Le sang qui coulait de son oreille à moitié entamée semblait l’indifférer.
    —     Que notre gorge soit tranchée si nous disons mot ! dis-je, citant le rituel des Neuf.
    —    Si tu crois que tel est ton devoir, Gondemar, accomplis-le, finit-il par dire d’une voix empreinte de résignation. Mais sache que ma mort ne changera rien. Tu participes à un vaste tournoi dont tu ignores les règles et l’enjeu.
    À ces mots, je restai stupéfait. Depuis un moment déjà, je soupçonnais qu’en plus des Neuf et des hommes du pape, d’autres personnes s’intéressaient à la Vérité. Voilà maintenant que Véran me le confirmait indirectement. Si je voulais me tirer de mon merdier, je devais à tout prix en savoir plus. Je posai la lame sur ce qu’il restait de son oreille.
    —    Qui d’autre souhaite que la Vérité soit livrée ? demandai-je.
    —    Si tu avais eu à le savoir, on te l’aurait dit, dit-il avec défiance.
    Sans hésitation, je tranchai d’un coup sec. Il hurla à la mort et se débattit sous mon poids, mais jamais ses yeux ne quittèrent les miens. Je plaçai aussitôt la lame sur son oreille restante et répétai ma question.
    —    Tue-moi si tu veux, mais tu n’apprendras rien, répondit-il, les dents serrées.
    Je taillai de nouveau, avec le même résultat, sinon que des larmes se mêlèrent à ses cris. À court d’excroissances, j’eus recours à une technique éprouvée et j’appuyai la pointe de la dague sur ses génitoires.
    —    Tu tiens peut-être davantage à cela qu’à tes oreilles ?
    —    Je ne tiens plus à rien, sinon au repos, rétorqua-t-il.
    Sa vitesse me surprit. D’un mouvement sec et désespéré, il parvint à tirer son bras gauche de sous mon genou, ferma sa main sur la mienne, ramena mon bras devant moi et poussa vers le bas. La lame s’enfonça dans son ventre jusqu’à la garde. Ses yeux s’exorbitèrent sous le choc et un sourire moqueur se dessina sur son visage souffrant.
    —    Remets. les parchemins. à. Montfort, haleta-t-il.
    Je l’empoignai par la chemise et le secouai.
    —    Pourquoi ? m’écriai-je. Qui donc le souhaite tant ? Dis-le-moi, coquin !
    Véran ne répondit pas. Il avait fermé les yeux. Je me levai et laissai mon regard courir sur lui. Cet homme avait renié une parole donnée sur sa vie. Il s’était allié avec Amaury et Montfort. Il m’avait accompagné vers Montségur pour s’assurer que j’en sortirais la Vérité et peut-être même pour mettre fin à mes jours une fois que ce serait fait. Malgré tout cela, je regrettais sa mort. Bien qu’il l’ait admis en expirant, j’avais toujours du mal à croire qu’il avait trahi. Et qui étais-je pour le juger, moi qui avais envisagé la même chose ? Je ne valais pas mieux que lui.
    Je me secouai, le dépouillai de son ceinturon et me relevai pour le boucler à ma taille. Le poids d’une épée contre ma cuisse me rassura aussitôt, même s’il ne s’agissait pas de Memento. J’essuyai la dague avec la couverture puis la glissai dans la ceinture avant de fouiller les braies de Véran. Lorsque j’eus mis la main sur la clé, je

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