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Le bouffon des rois

Le bouffon des rois

Titel: Le bouffon des rois Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Francis Perrin
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reconnaissant à l’homme
d’État de bonne volonté ; la seule politique qui lui plaise, même s’il en
murmure, c’est la politique de prestige : prestige politique bien sûr,
mais aussi prestige guerrier, prestige intellectuel, prestige religieux,
prestige humanitaire selon le temps et l’humeur.
    Et François était de taille à les exercer tous. Parfaitement
à son aise, avec sa taille de géant, son grand nez qui savait si bien flairer
le parfum des femmes et les embûches de ses adversaires, ses lèvres de faune au
sourire bienveillant un brin moqueur, sa majesté tempérée et sa bonne grâce. Il
dégageait une impression de puissance. C’était le roi gentilhomme ! Beau,
racé, brillant, joyeux, il était de l’espèce « à traîner tous les cœurs
après soi ». L’amour des femmes était une ardeur de famille mais il ne
voulait en user que par les moyens que l’honnêteté commandait.
     
    Où êtes-vous
allées, mes belles amourettes
    Changerez-vous
de lieu tous les jours ?
    À qui dirai-je
mon tourment
    Mon tourment et
ma peine ?
    Rien ne répond à
ma voix,
    Les arbres sont
secrets, muets et sourds
    Où êtes-vous
allées, mes belles amourettes ?
    Changerez-vous
de lieu tous les jours ?
    Ah !
Puisque le ciel le veut ainsi
    Que mon mal je
regrette
    Je m’en irai
dedans les bois
    Conter mes amoureux
discours.
     
    C’était aussi un poète à ses heures dans une inspiration
exclusive de l’Amour et des amours.
    Tiens, je me sens tout à coup en verve lyrique pour te faire
comprendre ce que pouvait être la magnificence à la cour de François I er .
    Imagine-toi une fin de journée d’octobre quand le ciel
traîne encore le souvenir de l’été défunt. La foule bruissante des courtisans
et des nobles dames trépigne, à l’instant même où l’ombre proche commence à
estomper les lointaines frondaisons du parc tout doré par les derniers feux
d’un soleil couchant d’automne. Voici qu’étincellent là-bas, au bord de
l’horizon, les points lumineux des torches qui encadrent une troupe de
cavaliers, revenant de la chasse à courre. Mêlés à la fanfare éclatante des
cors, on entend les abois des meutes découplées. Le galop des chevaux
s’amplifie, s’affirme et l’on distingue en même temps les appels des piqueurs
qui rassemblent les chiens. De la foule des courtisans agitant des mouchoirs
montent des cris d’enthousiasme qui s’ajoutent à la rumeur grandissante des
équipages chatoyants. Tout à coup s’ouvre l’éventail coloré des livrées et des
costumes où dominent les rouges, les verts, les bleus. C’est un joyeux tumulte
où l’on peut voir les pages se précipiter aux étriers. Et c’est l’apparition
non pas divine, mais royale. On a l’impression en voyant le roi qu’il a reçu
tous les dons du ciel et l’on comprend à cet instant qu’il est fait pour
commander.
    Les femmes, ah ! Les femmes surtout cherchent son
regard, dépensent les mille ressources de leur coquetterie afin qu’il les
remarque et que tout à l’heure, peut-être, il murmure à l’oreille de l’élue de
ce soir ou du proche demain qu’elle réunit pour lui tous les attraits et tous
les charmes.
    Au souper bientôt servi dans la plus grande salle, ornée de
splendides tapisseries et d’inestimables tableaux, éclairée par des centaines
de flambeaux, c’est l’habituel échange de gais propos, dans une atmosphère de
fête galante, cette atmosphère qui plaît au roi sans qu’il permette qu’elle
s’égare hors des bornes d’une étiquette strictement observée. Nul n’ignore que
François adore la compagnie des dames et il s’est plu à répéter :
    « Une cour sans femmes est comme une année sans
printemps, et un printemps sans roses. J’entends que cette cour soit toujours
peuplée de jolies femmes beaucoup plus que par la coutume passée. Les dames
rendent aussi vaillants les gentilshommes que leurs épées. Donnons aux femmes
la place éminente qu’elles méritent et qu’il leur faut garder. Je serai plus
que vigilant à ce qu’elles conservent ce statut. On ne doit les abaisser en
aucune manière et ne jamais leur manquer de respect. Quiconque touchera à
l’honneur des dames sera pendu. »
    Soyons francs, s’il respectait scrupuleusement ses propres
règles à la cour, il ne se contentait plus de ses conquêtes faciles, il lui
fallait trouver d’autres plaisirs chez des filles simples, qu’elles soient
boulangères ou greffières ou

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