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Le camp des femmes

Le camp des femmes

Titel: Le camp des femmes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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expérimenté « le jet » au-dessous de zéro. Lorsqu’il quitte son bureau, il dit simplement : « Six douches. »
    Le traitement est simple : on attache la prisonnière nue, dehors, à un poteau et on l’arrose pendant un quart d’heure en utilisant la lance à incendie à haute pression. À la fin de la séance « on laisse rafraîchir » une heure. Si la détenue n’a pas parlé… c’est qu’elle est morte. Stanislawa tient une séance… trois jours plus tard, deuxième traitement. Le supplice se prolongera trois semaines, à raison de deux « douches » par semaine. De nouveau table, cuvette, questions.
    — Nous vous reverrons dans deux mois. Deux mois de section disciplinaire avec une soupe chaude tous les quatre jours…
    Toute la colonie polonaise solidaire « gave » littéralement Stanislawa qui se présente en grande forme devant Ramdohr à la fin du temps de punition. Une heure plus tard, le corps de la Polonaise est une plaie. Elle n’a pas parlé. Ramdohr la croyant morte la fait porter au Revier. En un mois, Stanislawa est sur pied. Ramdohr préfère abandonner et oublier.
    *
    * *
    — Les prisonnières de l’Armée Rouge ne veulent pas travailler.
    — Ce n’est pas de mon ressort !
    — Elles disent qu’elles sont prisonnières de guerre et qu’elles doivent être traitées en prisonnières de guerre.
    — Voyez le commandant.
    Ramdohr, il le dira en 1947 au procès des criminels de guerre de Hambourg, trouvait le « morceau un peu trop gros ».
    — Là, pour la première fois, j’ai senti que je ne devais pas mettre le nez dans cette affaire. Le morceau était un peu trop gros pour moi. Plus tard, on m’obligea à entendre certaines « soldates » qui avaient refusé de travailler en usine. Je me suis contenté de prendre note de leur déposition.
    Tout avait commencé au début de 1943. Cinquante-trois « soldates » considérées comme indésirables à Maïdanek sont expédiées à Ravensbrück.
    Nous passons (lxxxv) la visite médicale. Encore cette attente humiliante, nues, dans le couloir, l’examen du docteur…
    Après une nouvelle vérification, nous apprenons que l’on ne veut pas nous reconnaître comme des prisonnières de guerre. On nous donne des numéros matricules comme aux civils russes. Nous refusons de coudre le « Winkel » russe (un triangle rouge avec la lettre R) à notre tenue, car les prisonniers de guerre n’en portent pas. Tout va bien au Block de quarantaine, mais la quarantaine une fois terminée, nous passons par le Arbeitseinsatz (bureau de répartition du travail) et là, c’est une autre affaire.
    — Votre triangle ?
    — Prisonnières de guerre.
    — D’où ?
    — De Lublin.
    — Nous ne vous reconnaissons pas comme prisonnières de guerre, ce n’est pas nous qui avons ôté votre uniforme. Revenez dans une demi-heure avec vos triangles.
    — À d’autres !
    Nous revenons une demi-heure plus tard.
    — Alors, vos triangles ?
    — Nous sommes prisonnières de guerre, personne n’en porte dans notre camp.
    — Vous reviendrez à sept heures du matin avec vos Winkels. Allez, ouste !
    Nous nous obstinons, nous voulons lutter. Nous mourrons, mais nous ne nous rendrons pas.
    Nous revenons le lendemain sans triangles. On nous mène vers la place de la chancellerie. Nous attendons. On nous envoie au Bunker, la prison. Nous avons peur. Le Bunker ? Les « vingt-cinq coups » ? Après la quarantaine, l’air frais nous fait vaciller de faiblesse. Nous avons parmi nous deux vieilles femmes malades et Lisa, enceinte, qui est arrivée tout récemment. Elles ne supporteront pas les vingt-cinq coups… Que faire ? On nous aligne par cinq devant la prison, pour nous punir. Nous nous tranquillisons quelque peu. Rien que ça ?
    Nous rions.
    Les détenus regardent à travers les barreaux de la prison. Beaucoup portent l’uniforme allemand. Cela nous console : la présence de tant de militaires allemands nous confirme que le fascisme craque sur toutes les coutures. Il n’est pas si facile que ça de rester debout. Deux, trois, cinq heures passent. C’est l’heure de la soupe. Puis l’appel. Nous sommes toujours debout. Il fait chaud. Les jambes font mal et les reins aussi. Chourka-le-bourreau passe vers l’administration. Nous tressaillons. Encore pour nous ? Elle nous rassure.
    — Ne craignez rien, les nôtres, les Russes, je les bats moins fort que les autres.
    — T’as beau être Russe, tu n’es

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