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Le cercle de Dante

Le cercle de Dante

Titel: Le cercle de Dante Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matthew Pearl
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en verre que lui avait remise Agassiz.
    « Lowell, je dois vous dire quelque chose. Mais je ne voudrais pas que cela dégénère en dispute.
    — Pietro Bachi ? »
    Holmes hocha la tête timidement.
    « Vous voulez dire que rien, dans toute cette affaire, ne correspond à ce que nous savons de lui ? demanda Lowell. C’est vrai, notre théorie vole en éclats !
    — Bachi est un homme amer, colérique et ivrogne, c’est exact, mais lui prêteriez-vous une dissimulation à ce point cruelle et méthodique ? Mettre en scène un spectacle dénonçant les torts de ceux qui le firent venir en Amérique, oui. Mais reproduire les châtiments de Dante avec un tel souci de précision et d’absolu, non ! Où que nous nous tournions, nos erreurs apparaissent, aussi nombreuses que les salamandres sous les feuilles après la pluie. »
    Subitement, Holmes se mit à agiter les bras comme un fou.
    « Que faites-vous ? s’étonna Lowell, car ils n’étaient plus qu’à une courte de distance de Craigie House où ils étaient attendus.
    — Il y a un fiacre libre là-bas. Je voudrais réexaminer ces échantillons au microscope. C’est dommage qu’Agassiz ait tué votre larve, car la nature révèle bien mieux sa vérité à l’état vivant. Ces petites bêtes auraient pu nous apprendre des choses sur le meurtre. Je ne partage pas son opinion que ces insectes sont tous morts à l’heure qu’il est. Agassiz est sourd aux théories de Darwin, cela obscurcit ses vues.
    — Voyons, Wendell, les insectes sont sa vocation ! »
    Holmes ne se laissa pas démonter par l’incrédulité de son ami.
    « Les grands savants sont parfois les plus grands obstacles sur le chemin de la science, Lowell. Les révolutions ne sont pas faites par des hommes à lunettes. Les gens qui ont besoin de trompe acoustique ne perçoivent rien des premiers chuchotements d’une nouvelle vérité. Pas plus tard que le mois dernier, j’ai lu dans un livre sur les îles Sandwich qu’un vieil homme de Fidji, transplanté de force parmi des étrangers, priait pour qu’on le reconduisît dans son pays où son fils pourrait lui extraire le cerveau du crâne en lui tapant sur la tête, selon la coutume pratiquée dans ces contrées. Pietro, le fils de Dante, répétait à qui voulait l’entendre que son père ne prétendait pas du tout être vraiment allé en Enfer et au Ciel. Les fils extraient le cerveau du crâne de leurs pères bien souvent. »
    Et certains plus souvent que d’autres, songea Lowell en pensant au fils aîné du docteur. Mais déjà celui-ci grimpait dans la voiture de louage.
    Lowell regretta de ne pas avoir pris sa monture et accéléra le pas : il était attendu à Craigie House. Au croisement d’une rue, il eut un mouvement de recul, l’esprit soudain en alerte. L’homme de haute taille, portant chapeau melon et gilet à carreaux, était là, dans la foule, sur la place du marché ! L’homme aux traits fatigués et au regard intense qui l’avait observé dans la cour de Harvard, adossé à un orme… Celui-là même qu’il avait vu parler avec Bachi sur le campus… Après une matinée si riche en découvertes, Lowell eût pu ne pas le remarquer, mais il se trouvait que l’individu était en train de causer avec son étudiant, Edward Sheldon. Et un Sheldon qui faisait bien plus que parler, qui tempêtait en vérité, comme l’on crie sur un domestique qui néglige une tâche depuis trop longtemps. Un Sheldon qui, brusquement, se drapa dans sa cape noire d’un mouvement furieux et partit sans plus de façons.
    Lequel des deux Lowell devait-il suivre ? Sheldon ? Non, il le retrouverait facilement à l’université. Mieux valait emboîter le pas à l’inconnu qui se frayait un chemin dans la cohue de voitures et de passants.
    Il s’élança donc parmi les étals, écartant d’une tape le commerçant qui brandissait une langoustine sous son nez.
    « Un tract, monsieur ? » lui lança une fille qui distribuait des prospectus et en fourra un d’office dans sa poche.
    Lowell aperçut son homme de l’autre côté de la rue. Le fantôme avait grimpé dans un omnibus bondé et attendait que le receveur lui rendît sa monnaie.
    Lowell atteignit la station au moment où celui-ci tirait la cloche. Le lourd véhicule démarra sur ses rails en direction du pont. Courant le long de la voie, Lowell n’eut aucun mal à le rattraper. Il venait d’agripper la rampe de l’escalier donnant accès à la plateforme

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